Au Mali, Issa Kaou Ndjim a pris ses distances avec les autorités de transition. Il est même devenu l'un de leurs fervents contradicteurs. Voici son interview.
Issa Kaou Ndjim a été l'un des vice-présidents du Conseil national de transition, le CNT, au Mali. A ce titre, il a compté parmi les soutiens d'Assimi Goita, en 2020.
Mais depuis, Issa Kaou Ndjim a pris ses distances avec les autorités de transition. Il est même devenu l'un de leurs fervents contradicteurs.
L'année dernière, il a ainsi initié l'"Appel du 20 février pour sauver le Mali", une nouvelle plateforme d'opposition à la junte, dont le lancement a été perturbée par des personnes venues saccager la Maison de la presse où se tenait la conférence de presse.
Fin mars 2024, Issa Kaou Ndjim a signé, en tant que président du parti ACRT Faso Ka Wele et aux côtés d'autres responsables politiques, un appel en faveur de l'organisation rapide de l'élection présidentielle.
Dimanche (14.04), à l'aéroport de Bamako, Issa Kaou Ndjim s'est vu refuser l'embarquement à bord d'un avion qui devait l'emmener à Paris. Interrogé par la DW, il y voit une nouvelle manifestation de la répression contre les voix critiques vis-à-vis de la junte militaire. Voici son interview :
Issa Kaou Ndjim : "Hier, le 14 avril, j'avais un vol pour Paris. Je suis arrivé à l'aéroport, j'ai fait les premières formalités et quand je devais aller à la salle d'embarquement, une personne qui s'est présenté comme commissaire de police de l'aéroport, m'a dit qu'il avait eu des instructions pour que je ne puisse pas prendre le vol. J'ai demandé quelles en étaient les raisons. Il m'a dit que cela venait du sommet de l'Etat, qu'il n'avait pas d'autres explications à me donner. J'ai pris acte. Mais cette situation aujourd'hui est pesante parce que nous avons été interdits de faire des activités politiques, les regroupements à caractère politiques.
J'avais décidé d'aller me reposer à Paris, de continuer vers les Etats-Unis, pour essayer de voir d'autres perspectives.... J'avais même décidé de suspendre des activités politiques parce qu'aujourd'hui le Mali est en train de basculer vers un régime militaire pur et dur.
Si, aujourd'hui, nous ne pouvons pas mener d'activités politiques, nous sommes réduits au silence, et quand nous voulons voyager, on nous en empêche sans raison, ni administrative, ni judiciaire.
Je pense que c'est très inquiétant pour le Mali, et c'est vraiment de l'abus qui nous est imposé en tant que chef de parti politique."
Issa Kaou Ndjim explique à la DW également sa défiance vis-à-vis du "dialogue national" initié par les autorités de transition.
Issa Kaou Ndjim : "La politique de dialogue en cours, nous, nous avons décidé de la boycotter parce qu'on est nous-même déclassés de fait : on a suspendu nos partis politiques et regroupements des manifestations. On ne peut pas dire ce que nous voulons. Ce qui s'est imposé aujourd'hui, c'est vraiment le monologue.
Et puis, ils nous ont imposé leur propre tempo, ils ne veulent pas des voix dissonantes, ils ne veulent pas de contradictions. Nous ne croyons pas en ce dialogue, parce que ce dialogue est tout simplement là pour donner un semblant de nouvelle légitimité au régime de fait qui est en train de terroriser ses opposants que nous sommes.
Nous pensons que c'est juste de la diversion. Nous pensons que, vraiment, c'est du temps perdu. Ce qui est important aujourd'hui, c'est le retour à l'ordre constitutionnel, c'est de véritables élections qui sont des questions qui intéressent la vie de la nation."