Afrique: Treize millions de cas de paludisme évités en Afrique subsaharienne grâce à de nouvelles moustiquaires

Les moustiquaires imprégnées d’insecticide sont un moyen efficace pour lutter contre le paludisme. (photo d'archives)

Genève/Liverpool — On estime que les 56 millions de moustiquaires de pointe introduites dans 17 pays de l'Afrique subsaharienne ont permis d'éviter 13 millions de cas de paludisme et 24 600 décès, si on les compare aux moustiquaires classiques.

Le projet Nouvelles moustiquaires est une initiative financée par Unitaid et le Fonds mondial et dirigée par l'Innovative Vector Control Consortium (IVCC). De 2019 à 2022, il a permis de mettre à l'essai des moustiquaires à double action dans des pays où le paludisme est endémique, en réponse à la menace croissante de la résistance aux insecticides.

Les moustiques anophèles sont de plus en plus résistants aux insecticides pyréthrinoïdes utilisés dans les moustiquaires imprégnées d'insecticide (MII) classiques, qui risquent ainsi d'offrir une protection moins efficace contre le paludisme. Pour cette raison, nous devons continuer de développer et de tester de nouveaux outils.

La MII Interceptor® G2 de BASF est enduite de chlorfénapyr, un insecticide à base de pyrrole de nouvelle génération, qui est associé aux pyréthrinoïdes standard. La MII Royal Guard® de Disease Control Technologies (DCT) est quant à elle tissée de fils dans lesquels est incorporé un assemblage de pyriproxyfène et de pyréthrinoïdes. L'une comme l'autre sont plus efficaces contre les moustiques résistants aux pyréthrinoïdes que les moustiquaires classiques.

De 2019 à 2022, le projet Nouvelles moustiquaires a accompagné le déploiement de 38,4 millions de moustiquaires en Afrique subsaharienne. Parallèlement, le Fonds mondial et l'Initiative du Président des États-Unis contre le paludisme ont soutenu le déploiement de millions de moustiquaires supplémentaires dans le cadre d'une initiative interne, l'initiative Moustiquaires en transition (NTI). Au total, 56 millions de moustiquaires ont ainsi été introduites dans 17 pays d'Afrique subsaharienne.

Financés par un partenariat dans le cadre du projet Nouvelles moustiquaires, deux essais cliniques et cinq études pilotes ont démontré que les nouvelles MII ont permis d'améliorer la lutte contre le paludisme d'environ 20 % à 50 % par rapport aux moustiquaires classiques dans les pays d'Afrique subsaharienne où a été observée une résistance aux insecticides.

Les données épidémiologiques collectées tout au long du projet ont conduit l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) à publier de nouvelles recommandations appelant à utiliser des moustiquaires imprégnées d'une combinaison de pyréthrinoïdes et de chlorfénapyr plutôt que de pyréthrinoïdes seuls dans les pays confrontés à une résistance à cet insecticide. L'OMS a également formulé une recommandation conditionnelle en faveur du déploiement des moustiquaires imprégnées de pyréthrinoïdes-pyriproxyfène à la place des moustiquaires imprégnées uniquement de pyréthrinoïdes pour la prévention du paludisme chez les adultes et les enfants dans les régions affectées par la résistance aux pyréthrinoïdes.

Dr Philippe Duneton, directeur exécutif d'Unitaid : « Le projet Nouvelles moustiquaires a contribué massivement aux efforts de lutte contre le paludisme en participant à accélérer l'introduction des moustiquaires de nouvelle génération, un outil d'une importance cruciale pour réduire le nombre de cas de paludisme et de décès dus à cette maladie. Nous n'avions aucune garantie de réussite au début de ce projet, mais nos efforts conjugués pour abattre simultanément les multiples obstacles à l'accès ont permis de faire parvenir les nouvelles moustiquaires aux communautés aussi rapidement que possible. Ces partenariats nous seront utiles pour continuer à étudier des innovations prometteuses qui nous aideront à relever les défis de la lutte contre le paludisme. »

Le coût supplémentaire par cas de paludisme évité en utilisant les moustiquaires Interceptor® G2 au lieu des moustiquaires classiques se situe entre 0,66 et 3,56 dollars US*. La réduction du nombre de cas de paludisme et de décès grâce à l'utilisation des moustiquaires Interceptor® G2 par rapport aux moustiquaires classiques correspond à une économie potentielle de 28,9 millions de dollars US pour les systèmes de santé.

Plus les MII à double action seront utilisées au fil des ans, plus les systèmes de santé réaliseront des économies, démontrant les avantages financiers et pour la santé publique de cet investissement sur le long terme.

Par ailleurs, les projets pilotes mis en place au niveau opérationnel ont également permis d'élaborer une série de lignes directrices pour l'intégration efficace de ces nouvelles moustiquaires dans les campagnes multiproduits et les circuits de distribution continue.

Peter Sands, directeur exécutif du Fonds mondial : « Nous sommes ravis de constater l'impact exceptionnel des moustiquaires imprégnées d'insecticide à double action pour la lutte contre le paludisme. Le succès du projet Nouvelles moustiquaires nous prouve qu'en encourageant la collaboration entre les partenaires mondiaux de la santé, en exploitant les innovations et en privilégiant des approches d'orientation des marchés, nous pouvons lutter contre la résistance aux insecticides, assurer une meilleure rentabilité de nos interventions et accélérer le progrès dans la lutte contre le paludisme. Aux côtés de nos partenaires, nous continuerons d'investir pour l'innovation dans les moustiquaires imprégnées d'insecticide afin d'éviter davantage de cas, sauver plus de vies et nous remettre sur la voie des objectifs mondiaux de lutte contre le paludisme. »

Le travail catalytique d'orientation des marchés réalisé dans le cadre du projet Nouvelles moustiquaires a permis d'accroître l'offre et la demande de moustiquaires à double action, garantissant aux programmes de lutte nationaux et aux populations vulnérables un accès équitable et abordable aux nouveaux produits de lutte antivectorielle.

La société de finance sociale britannique MedAccess et la Fondation Bill & Melinda Gates ont favorisé l'accès aux MII Interceptor® G2 dans plus de 20 pays en assurant une garantie de volume qui a permis à BASF de réduire le prix payé par les fournisseurs pour les moustiquaires. Cette initiative, associée aux efforts continus des partenaires pour étendre l'introduction de toutes les moustiquaires à double action à mesure qu'elles reçoivent la préqualification de l'OMS, contribuera à assurer la pérennité du projet au-delà de son achèvement.

David McGuire, directeur Accès et Orientation des marchés à l'IVCC : « Le travail catalytique d'orientation des marchés réalisé dans le cadre du projet Nouvelles moustiquaires pour accroître l'offre et la demande de moustiquaires à double action a permis de jeter les bases d'un accès équitable et abordable à ces nouveaux produits de lutte antivectorielle. Le projet Nouvelles moustiquaires, en même temps que le projet NgenIRS, a démontré l'importance et l'impact potentiel des interventions d'orientation des marchés sur l'accès aux meilleures solutions de lutte antivectorielle pour les plus vulnérables. Il s'avérera essentiel d'adopter des approches similaires pour les nouveaux produits issus de la filière de développement de l'IVCC. »

Les données recueillies sur l'utilisation des MII à double action dans le cadre du projet Nouvelles moustiquaires témoignent de l'importance du développement de produits et des interventions catalytiques d'orientation des marchés pour fournir et mettre à l'échelle des outils de prévention rentables et à fort impact qui répondent aux besoins des pays où le paludisme est endémique.

Dr Michael Charles, directeur général du Partenariat RBM pour en finir avec le paludisme : « Les constats tirés du projet Nouvelles moustiquaires prouvent l'intérêt d'investir dans les outils de pointe pour lutter contre le paludisme. Nous répétons toujours qu'il n'existe pas de solution miracle pour mettre fin au paludisme et qu'il ne faut pas miser sur des interventions ponctuelles, mais plutôt investir dans un ensemble d'outils qui, combinés, auront un impact plus grand pour vaincre cette maladie. L'un de ces outils est la moustiquaire à double action. Ses remarquables performances, associées aux économies réalisées au niveau des systèmes de santé, plaident en faveur de la poursuite de son déploiement à l'échelle mondiale. »

* Les économies réalisées sont calculées sur la base des prix relevés à la fin du projet. Elles diffèrent d'un site à l'autre en fonction de facteurs locaux, notamment l'infrastructure locale et l'échelle des activités d'achat.

À propos du projet Nouvelles moustiquaires et des produits associés

Le Fonds mondial et Unitaid ont chacun investi 33 millions de dollars US durant la période 2018-2022 dans la mise en service de nouvelles moustiquaires imprégnées d'insecticide contre les moustiques vecteurs du paludisme. Le projet Nouvelles moustiquaires avait vocation, d'une part, à rassembler des éléments probants sur la prochaine génération de moustiquaires, qui sont traitées avec deux types distincts d'insecticides afin d'améliorer la protection contre les moustiques, et d'autre part, à amorcer le marché.

Le projet a produit des preuves de l'efficacité et du rapport coût-efficacité de ces nouvelles moustiquaires à double action insecticide. En plus d'apporter un éclairage à l'OMS pour la formulation de ses recommandations sur les MII, ces données ont permis d'orienter la prise de décision pour aider les programmes nationaux de lutte contre le paludisme à sélectionner les moustiquaires les plus efficaces pour les contextes où les ressources sont limitées. Le projet Nouvelles moustiquaires, avec sa conception unique de collecte parallèle des données épidémiologiques et d'études d'optimisation des ressources, va considérablement réduire le délai d'entrée sur le marché des nouvelles moustiquaires.

L'Initiative du Président des États-Unis contre le paludisme, MedAccess et la Fondation Bill & Melinda Gates sont des partenaires opérationnels et financiers clés du projet. Sa mise en oeuvre est assurée par une coalition dirigée par l'IVCC, qui comprend l'Alliance pour la prévention du paludisme, l'Imperial College London, la Liverpool School of Tropical Medicine, PATH, PSI et la Tulane University.

Interceptor® G2

Développée par BASF, l'Interceptor® G2 est une moustiquaire de deuxième génération qui associe du chlorfénapyr et de l'alpha-cyperméthrine pour lutter contre les moustiques résistants aux insecticides. Ce mode d'action innovant dans la lutte antivectorielle exploite les systèmes enzymatiques des moustiques contre eux-mêmes et ne présente pas de résistance croisée avec d'autres classes d'insecticides. Contrairement aux pyréthrinoïdes, le chlorfénapyr ne cible pas le système nerveux des insectes : après avoir été métabolisé par les enzymes P450 au niveau cellulaire, il agit en perturbant les voies respiratoires et les gradients de protons grâce au découplage de la phosphorylation oxydative dans les mitochondries. La moustiquaire Interceptor® G2 est préqualifiée par l'OMS.

Royal Guard®

La Royal Guard® est une moustiquaire imprégnée d'insecticide mise au point par Disease Control Technologies. Cette solution de lutte antivectorielle permet d'une part la protection des personnes en assurant la paralysie (par effet de choc) et la mort des moustiques, et d'autre part la réduction de la fécondité des moustiques qui survivent à l'exposition à l'ingrédient actif pyréthrinoïde du produit. Le régulateur de croissance des insectes, le pyriproxyfène, a pour effet de réduire la fécondité des moustiques femelles adultes et, par conséquent, d'entraîner une réduction globale de la population de vecteurs en inhibant la ponte, la transition de la phase larvaire à pupale et l'émergence de jeunes moustiques actifs. La moustiquaire Royal Guard® est préqualifiée par l'OMS.

À propos de l'IVCC

L'IVCC est le seul partenariat dédié au développement de produit qui se spécialise dans les solutions de lutte antivectorielle. Il a été créé en 2005 grâce à une première subvention octroyée à la Liverpool School of Tropical Medicine par la Fondation Bill & Melinda Gates. Organisme caritatif enregistré au Royaume-Uni, l'IVCC est financé par la Fondation Bill & Melinda Gates, UK Aid, l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), la Direction suisse du développement et de la coopération et le ministère australien des Affaires étrangères et du Commerce extérieur. Il travaille en partenariat avec différentes parties prenantes de l'industrie, des institutions scientifiques et des pays à maladies endémiques en vue de faciliter l'élaboration et la mise à disposition de nouveaux insecticides et formules optimisés pour répondre aux besoins de santé publique et combattre le problème croissant de la résistance aux insecticides. L'IVCC a également reçu des fonds d'Unitaid et du Fonds mondial pour mettre en oeuvre des projets catalytiques d'accès au marché comme NgenIRS et Nouvelles moustiquaires, qui soutiennent le déploiement rapide et à grande échelle d'instruments de lutte antivectorielle. Le partenariat, l'innovation et le respect sont les trois valeurs fondamentales de l'IVCC, qui s'efforce de les mettre en oeuvre dans toutes ses relations avec ses partenaires.

À propos d'Unitaid

Unitaid sauve des vies en s'assurant que les pays à revenu faible et intermédiaire ont accès aux nouveaux produits de santé à un prix abordable. En collaboration avec ses partenaires, Unitaid identifie les nouveaux traitements, tests et outils les plus prometteurs, lève les obstacles à leur mise sur le marché et les fournit rapidement aux personnes qui en ont le plus besoin. Depuis sa création en 2006, Unitaid a participé au déploiement d'une centaine de produits de santé révolutionnaires pour s'attaquer aux plus grands défis de la santé mondiale : le VIH, la tuberculose et le paludisme ; la santé des femmes et des enfants ; et la prévention, la préparation et la riposte en lien avec les pandémies. Chaque année, plus de 170 millions de personnes bénéficient de ces produits. Unitaid est un partenariat hébergé par l'Organisation mondiale de la Santé.

AllAfrica publie environ 500 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.