Abidjan accueille le 5e forum régional Afrique-Europe de l'Institut français, « Notre Futur », du 20 au 22 avril. L'enjeu de cette édition, qui se tient entre plusieurs lieux d'Abidjan est de mettre en lumière les enjeux de valorisation de patrimoines et de mémoires sous le prisme des Industries Culturelles et Créatives (ICC). Parmi les pistes proposées par les intervenants : la numérisation du patrimoine architectural menacé.
Érosion et montée des eaux, changement climatique, conflits armés... Les menaces qui pèsent sur les patrimoines architecturaux africains sont nombreuses. Pour y remédier, la start-up Iconem, qui bénéficie de financements institutionnels (Unesco, ambassades et institut français, British Council), effectue des missions de numérisation de patrimoines architecturaux en danger.
La technologie utilisée, explique le Franco-Libanais Bachaar Tarabay, chargé des projets scientifiques à Iconem, s'appelle la photogrammétrie. « C'est une technologie qui consiste à prendre des milliers de photos selon une trame et des paramètres précis pour reconstituer un jumeau numérique identique d'un site. On utilise des drones, des appareils photos... Et ce qu'on fait dans les missions de formation, c'est qu'on achète les mêmes équipements aux acteurs qu'on va former pour qu'ils puissent eux-mêmes scanner le reste de leur patrimoine dans leur pays. »
Le Togolais Nicolas-Etienne Sohou N'gani est venu assister à la table ronde. Expert-consultant en culture, tourisme et développement, enseignant sur les questions de gestion du patrimoine audiovisuel à l'université Senghor d'Alexandrie (Egypte), il dirige un projet répondant au même objectif, mais a opté pour une autre technique de numérisation : la vidéo immersive à 360 degrés.
Et pour rendre les trésors naturels et architecturaux du Togo accessibles à sa population, son projet pilote propose des expositions virtuelles itinérantes. « La majeure partie de la population se retrouve en zone rurale et n'a pas forcément accès aux musées. Pour nous, l'objectif est de ramener ce patrimoine vers ces populations avec des casques de réalité virtuelle, d'où l'organisation des expositions itinérantes. Par exemple, nous avons fait des expositions dans des marchés, où nos mamans n'ont pas forcément le temps de se déplacer pour visiter des lieux. On a apporté ces sites vers ces personnes », explique-t-il.
« Devant son étalage, elle porte le casque, elle change de localité virtuellement, elle va visiter un site qui se trouve à des centaines de kilomètres de son marché, détaille Nicolas-Etienne Sohou N'gani. Comme le Tata Tamberma, le seul site du Togo inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco, le palais de Lomé qui a été restauré en lieu culturel après avoir été occupé par le gouverneur allemand et le gouverneur français, la Maison des Esclaves... Il y en a une qui a témoigné en disant que c'est intéressant, parce que ça leur permet de savoir quoi répondre à leurs enfants quand ils leur posent des questions sur la culture locale », ajoute-t-il.
Nicolas-Etienne Sohou N'gani a également entrepris de numériser le patrimoine immatériel togolais, comme les danses traditionnelles et les contes, afin de le conserver, lui aussi, pour les générations futures.