Condamné à 25 ans de prison pour « complicité intellectuelle de détournement d'argent public », le Camerounais Marafa Hamidou Yaya sort de son silence. L'ancien secrétaire général de la présidence, détenu depuis 2012, a accordé mardi une interview à nos confrères de Jeune Afrique. Très critique envers le pouvoir, l'ancien collaborateur de Paul Biya, âgé aujourd'hui de 71 ans, lance un appel au secours à propos de son état de santé. Plusieurs personnalités, dont l'ancien président français François Hollande, avaient déjà appelé à sa libération pour raisons de santé.
Atteint d'un glaucome, Marafa Hamidou Yaya a déjà perdu l'usage de l'oeil droit. Il craint aujourd'hui pour son oeil gauche. « Je perds la vue, explique-t-il dans Jeune Afrique, tous les spécialistes recommandent "une opération de la dernière chance" pour m'éviter de devenir totalement aveugle ». Une opération qui ne peut se pratiquer qu'à l'étranger. Or, ses demandes d'autorisation d'évacuation médicale adressées au président Biya, sont restées, assure-t-il, sans réponse. Pour faire face à ce handicap, l'ancien secrétaire général de la présidence souhaitait être placé en résidence surveillée, mais ses demandes sont là aussi restées lettre morte.
Condamné en 2012 pour « complicité intellectuelle de détournement d'argent public », Marafa Hamidou Yaya ne comprend pas pourquoi il est encore derrière les barreaux, alors qu'assure-t-il, les cinq autres personnes condamnées dans ce dossier ont toutes été libérées. « Mon maintien en détention, estime-t-il, et la torture que je subis, en particulier à travers le refus de soins, car il s'agit bien de torture en termes juridiques, ne peuvent donc avoir qu'un caractère politique », juge-t-il.
Le septuagénaire estime que son cas n'est pas isolé. « Sous ce régime, le recours à la torture est devenu systémique », affirme Marafa Hamidou Yaya qui se dit par ailleurs « très inquiet du déclassement progressif » du Cameroun. Son idée pour réconcilier le pays ? La mise sur pied d'une sorte de Commission vérité, réconciliation et refondation afin d'exposer au grand jour, comme en Afrique du Sud après l'apartheid, les crimes et scandales d'état. S'il pense encore pouvoir aider son pays, l'ancien collaborateur de Paul Biya craint pour l'heure que son régime d'incarcération ne soit durci après la publication de cette interview.