Sénégal: À Dakar, le petit commerce est victime des opérations de désencombrement

Dakar — Une opération de désencombrement menée dans les communes d'arrondissement de Colobane et de la Patte d'oie prive de nombreux fripiers, gargotiers et mécaniciens de leur lieu de travail.

Ils étaient nombreux à squatter le terrain du Parc à mazout de Colobane, où ils pratiquaient diverses activités allant du commerce des vêtements et de divers objets d'occasion à la mécanique automobile.

L'opération de désencombrement menée à Colobane, jeudi 18 avril, laisse encore des traces. "Tout a été rasé et incendié à la demande du propriétaire du terrain", raconte Khadim. Il accepte avec résignation de quitter cet endroit qui abritait depuis plusieurs années ses occupations.

Les commerçants, marchands ambulants et mécaniciens n'en reviennent pas, presque une semaine après l'opération de désencombrement, d'avoir été privés du terrain du Parc à mazout, situé dans la commune de Fass-Gueule Tapée-Colobane. Les visages assombris, certains d'entre eux viennent jeter comme un dernier regard sur leur ex-lieu de travail. Là où ils gagnaient leur vie en menant divers petits métiers. Ils ramassent des objets et des bagages à même le sol.

L'homme considéré comme le propriétaire du terrain a fini de le faire entourer d'une longue palissade. Il est impossible de lui arracher un mot sur la récupération du terrain. Une voiture de police est immobilisée sur place, les flics guettant la moindre tentative de réoccupation de la vaste parcelle.

Khadim, l'un des ex-occupants du terrain, lave des chaussures d'occasion pour les revendre. "Je travaille ici depuis 2012. Le déguerpissement va porter préjudice à ceux qui avaient des places fixes. Moi, je suis un marchand ambulant. Tantôt je suis là, tantôt je mène mes activités dans d'autres endroits", raconte ce fripier originaire de la région de Diourbel (centre).

L'opération de désencombrement prive les ex-occupants du terrain du Parc à mazout de revenus, car ils n'ont plus d'endroit où dérouler leurs activités. Il y va de la question de l'emploi des jeunes, que les nouveaux dirigeants du pays doivent prendre à bras-le-corps, selon Khadim. "L'État doit nous aider à trouver des espaces où nous pourrons dérouler nos activités. Les jeunes que vous voyez ici ne demandent qu'un coup de main pour travailler, subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. Nous demandons aux nouvelles autorités de réfléchir là-dessus le plus rapidement possible", plaide-t-il.

Fallou Gadiaga est l'une des victimes du désencombrement. Il observe de nombreuses voitures circuler aux abords de son ancien lieu de travail. "On nous avait déjà avertis. Mais nous pensions que ça allait s'arrêter là. À notre grande surprise, la police est venue nous dire que le propriétaire du site voulait le récupérer", raconte M. Gadiaga. Il vendait des chaussures d'occasion depuis près de dix ans à Colobane.

"On gagnait bien notre vie ici [...] Ce n'est pas à minimiser", dit-il, amer, en parlant de l'impossibilité pour lui et les autres fripiers de dérouler correctement leurs activités, faute d'espace.

"L'État doit nous aider à bien nous organiser. Les nouvelles autorités doivent nous chercher des endroits où nous pourrons travailler en toute quiétude", réclame-t-il.

Dame Niang est venu récemment de Touba (centre). À Colobane, il s'est lancé dans le petit commerce. "On travaillait bien ici, ce n'est plus possible", observe-t-il, ajoutant : "Nous demandons aux autorités de penser à nous. L'emploi des jeunes est un facteur de stabilité sociale."

Diop, âgé d'environ 40 ans, a l'air très détendu, même s'il dit s'inquiéter du désencombrement du terrain du Parc à mazout, qui l'empêche de mener ses activités. "Nous avons été prévenus depuis un mois mais certains d'entre nous pensaient que tout devait s'en arrêter là. Nous demandons maintenant au chef de l'État et au gouvernement de penser à nous", plaide-t-il.

Assis sur des gravats, des mécaniciens discutent de la récente opération qui les prive de leur espace de travail, chacun tenant à dire comment il en est victime. "Le gouvernement doit nous trouver un site. C'est tout ce que nous demandons. Rien n'empêchait l'État de racheter le terrain que nous occupions et de le mettre à notre disposition", propose l'un d'eux, suggérant le versement d'une contrepartie par chacun des fripiers, gargotiers et commerçants.

Au centre commercial de la Patte d'oie, des marchands ambulants et des commerçants obligés de déguerpir sont déjà revenus squatter le même espace d'où ils étaient partis. Dimanche, ils étaient là, chacun à leur place habituelle, obligeant les piétons à se frayer difficilement un passage sur les petits trottoirs ou au milieu des nombreuses voitures dans cette voie routière très empruntée.

"Le maire menace souvent de nous faire partir. Il finit toujours par changer d'avis. Il est très compréhensif. C'est notre ami", commente un vendeur de vêtements d'occasion.

Un vendeur de chaussures exerçant depuis une dizaine d'années à la Patte d'oie dit compter sur la bienveillance des autorités municipales pour continuer à dérouler son commerce au même endroit.

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