Afrique: Tuberculose - MSF révèle le coût de son essai clinique et exige plus de transparence sur les coûts de recherche et développement des médicaments

communiqué de presse

Lors de la 5ème conférence de l'OMS sur les politiques de tarification et de remboursement des produits pharmaceutiques, Médecins sans Frontières (MSF) a présenté le détail du coût de son essai clinique TB-PRACTECAL* qui a permis d'identifier un schéma thérapeutique plus court et entièrement oral pour la tuberculose multirésistante.

Celui-ci s'élève à 34 millions d'euros**. C'est la première fois que le coût détaillé d'un essai clinique est rendu public, remettant en cause le discours politique selon lequel les prix élevés des médicaments sont justifiés par les coûts importants liés à la recherche et au développement (R&D). C'est un premier pas vers plus de transparence sur les coûts réels de la R&D biomédicale, qui permettrait de garantir un meilleur accès aux traitements vitaux pour ceux qui en ont besoin partout dans le monde.

MSF a développé un guide pour la publication des coûts des essais cliniques, « Transparency CORE », et exhorte tous les financeurs publics et à but non lucratif à publier leurs dépenses pour les essais cliniques et à soutenir le développement d'une réglementation internationale rendant cette transparence obligatoire.

« Nous espérons que le fait d'avoir publié les coûts de notre essai clinique incitera d'autres acteurs à nous rejoindre, a déclaré le Dr Bern Thomas Nyang'wa, directeur médical de MSF et responsable de l'essai TB-PRACTECAL. Nous encourageons les financeurs et ceux qui mettent en oeuvre les essais cliniques à utiliser "Transparency CORE" pour faciliter la publication des données relatives à leurs dépenses. La transparence des coûts des essais cliniques est une étape décisive vers la démonstration du coût réel de l'innovation médicale et la construction d'un avenir où l'accès aux médicaments et aux outils médicaux n'est pas entravé par des prix élevés. »

Le coût des essais cliniques représente souvent la majeure partie du coût global de la R&D des produits de santé. Pourtant, les coûts réels restent confidentiels, aucune donnée détaillée sur les budgets de la R&D biomédicale n'étant disponible dans le domaine public.

Les discours politiques utilisent sans réserve les arguments de l'industrie pharmaceutique pour justifier les prix élevés des médicaments par le coût de la R&D et la nécessité de soutenir l'innovation. Or, la recherche a montré qu'il n'y a pas de lien entre les prix des médicaments et les dépenses en R&D. Une plus grande transparence sur le coût des essais cliniques est nécessaire pour orienter les politiques de tarification et les moyens de financer la R&D.

Pendant plus de dix ans, la bédaquiline, médicament indispensable pour le traitement de la tuberculose, est restée inaccessible aux personnes atteintes de la maladie en raison de son prix exorbitant. En révélant que les financements publics pour le développement de la bédaquiline ont été cinq fois supérieurs aux financements privés, des chercheurs ont fourni une information essentielle aux acteurs de la société civile luttant contre la tuberculose, conduisant à une réduction significative du prix de ce médicament qui permet de sauver des vies.

« Le mouvement mondial qui a conduit à une réduction du prix de la bédaquiline a démontré que plus de transparence sur les coûts de R&D peut conduire à un meilleur accès aux dispositifs médicaux et sauver plus de vies, explique Roz Scourse conseillère de MSF pour l'accès aux médicaments. La théorie dominante mais non-étayée selon laquelle des prix élevés sont nécessaires pour amortir les coûts élevés de R&D ne peut plus rester exempte de preuves. Ce sont des informations capitales qui peuvent influencer le prix des produits médicaux et le nombre de personnes qui y auront accès. »

Des données détaillées sur les coûts des essais cliniques peuvent contribuer à la conception de futures initiatives, à des incitations et des mécanismes de financement innovants, en particulier dans les cas où l'intérêt commercial fait défaut en l'absence de marchés rentables, comme la tuberculose, la résistance aux antibiotiques et les agents pathogènes susceptibles de provoquer une pandémie. Disposer de davantage de données sur ces coûts peut aussi améliorer la planification financière de futurs essais cliniques, notamment pour les essais cliniques réalisés en dehors des pays à revenu élevé. Le manque de données de ce type avait posé un problème lors de la planification de TB-PRACTECAL.

« Alors que l'Assemblée mondiale de la santé marque cette année le cinquième anniversaire de l'adoption de la résolution sur la transparence, tous les gouvernements doivent prendre des mesures urgentes pour adopter une législation rendant obligatoire la divulgation des coûts détaillés de la recherche et du développement, y compris les coûts des essais cliniques, en particulier lorsqu'ils ont bénéficié d'un financement public », a déclaré M. Scourse.

*MSF a dirigé l'essai contrôlé randomisé TB-PRACTECAL de phase 2b-3, qui a permis d'identifier un nouveau schéma thérapeutique pour la tuberculose multirésistante en 2022. Les résultats de cet essai historique ont conduit l'OMS à recommander un traitement oral de 6 mois à base de bédaquiline, de prétomanid, de linézolide et de moxifloxacine (BPaLM) comme traitement privilégié de la tuberculose résistante à la rifampicine. Ce traitement a été adopté dans 40 pays à ce jour.

**Les coûts totaux se sont élevés à 33,9 millions d'euros. Les résultats préliminaires ont été présentés lors de la conférence PPRI de l'OMS, mais les coûts détaillés de l'essai clinique ont fait l'objet d'une publication dans une revue scientifique. Dans la publication complète, les coûts sont ventilés en 27 catégories de coûts, par année et par site d'essai, afin d'offrir un niveau élevé de transparence.

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