Guinée: Les Guinéens se sentent libres de s'exprimer mais se méfient de ce qu'ils disent en politique

Les citoyens veulent des médias libres qui enquêtent et publient sur la corruption et les erreurs du gouvernement.

Key findings

  • Sept Guinéens sur 10 (70%) disent être « assez libres » ou « entièrement libres » de dire ce qu'ils pensent. Ce taux a baissé de 8 points de pourcentage depuis 2019.
  • Toutefois, plus de sept Guinéens sur 10 (72%) déclarent qu'ils doivent « souvent » ou « toujours » faire attention à ce qu'ils disent en politique.
  • Par contre, de fortes majorités estiment être libres de choisir sans pression pour qui ils veulent voter (93%) et d'adhérer à la formation politique de leur choix (86%).
  • La majorité des Guinéens soutiennent que les médias devraient être libres de publier sans le contrôle du gouvernement (65%) et qu'ils devraient constamment enquêter et publier sur la corruption et les erreurs du gouvernement (75%).
  • Cependant, plus de quatre répondants sur 10 (43%) déclarent que la presse en Guinée n'est « pas très libre » ou « pas du tout libre » de publier sans censure ni ingérence du gouvernement.

La liberté de la presse et d'expression en République de Guinée a connu une série de soubresauts. Avec l'avènement de l'Etat de droit et de la démocratie au lendemain de la mort du Président Ahmed Sékou Touré en1984, les autorités tentaient régulièrement de censurer les médias critiques du pouvoir. Après les « journées nationales de l'information et de la communication » en 1990, les projets réglementaires voient le jour, et aboutissent aux lois portant liberté de la presse ainsi qu'à un projet de texte portant création d'entreprises de presse publique et privée (Matras, Fra, Leroy, Camara & Curtis, 2015).

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Durant la période de transition politique consécutive au décès du Président Lansana Conté, le cadre juridique des médias va être totalement révisé et des avancées considérables seront enregistrées dans la nouvelle Constitution adoptée en 2010 par le Conseil National de la Transition. Cette Constitution garantit en ses articles 8 et 10 la liberté d'expression et d'occupation de l'espace public. En dépit de la dépénalisation des délits de presse, plusieurs journalistes ont été interpellés et condamnés sous le magistère du Président Alpha Condé. Les droits à la liberté d'expression sont violés et la production d'informations critiques et indépendantes reste difficile, particulièrement lorsque celles-ci mettent en cause des membres du gouvernement ou des forces de sécurité (Bangoura, 2019 ; France 24, 2018).

Les entraves à la liberté d'expression et des médias ont connu un rebondissement récemment sous la nouvelle transition politique actuellement en cours en Guinée avec les restrictions d'accès à l'Internet et aux réseaux sociaux, le brouillage des signaux radio, le retrait des chaines de télé des bouquets Canal+ et Startimes et les intimidations à l'encontre des journalistes (Reporters Sans Frontières, 2023 ; Sow, 2024).

Ce travail nous permettra de faire l'état des lieux sur la liberté d'expression et des médias ainsi que les libertés civiles à l'aide des données des enquêtes Afrobarometer.

Il ressort que la majorité des Guinéens se disent libres d'exprimer leurs opinions, de choisir sans pression pour qui ils veulent voter et d'adhérer à la formation politique de leur choix. Cependant, ils pensent qu'ils doivent faire attention quand ils parlent des sujets politiques.

Les Guinéens affichent un large soutien à la liberté de la presse, mais beaucoup d'entre eux déclarent que les médias ne sont pas libres de publier sans censure ni ingérence du gouvernement dans leur pays.

Mohamed Sylla Mohamed Sylla est le responsable de la communication à Stat View International, partenaire national d'Afrobarometer en Guinée.

Lionel Osse Essima Lionel is the assistant project manager for Anglophone West Africa and North Africa.

Aliou Barry Aliou Barry is director of Stat View International, the Afrobarometer national partner in Guinea.

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