Ce samedi 4 mai, se tenait à Paris un colloque intitulé « Des routes et des femmes, le parcours migratoire de nos mamans ». Une initiative pour mettre en avant le récit de femmes arrivées en France dans les années 1960-1970-1980 et dont l'histoire est peu contée.
Dans une salle bondée de la Maison des conversations du XVIIIe arrondissement de Paris, l'assemblée était constituée de plus de 90% de femmes des deuxième ou troisième générations issues de l'immigration ouest-africaine.
Face à elles, cinq femmes, dont deux installées en région parisienne depuis plus de 40 ans qui racontaient leur vécu. Ces deux dernières sont arrivées en France dans le cadre du regroupement familial pour rejoindre des époux, des travailleurs immigrés.
« Elles sont arrivées très très jeunes »
« Ces femmes-là, elles n'ont pas toujours eu le choix, elles sont arrivées très très jeunes, raconte Koudedji Sylla, organisatrice de l'événement et qui s'en fait leur porte-voix. Elles ont quitté leur cocon familial, elles ont quitté un pays chaud pour un pays froid, dont elles ne maîtrisaient absolument pas la langue. Tous ces traumas, elles n'en parlent pas. Ce n'est qu'aujourd'hui, moi en grandissant, en étant moi-même maman, que je me rends compte que c'était violent. C'est un parcours qui a dû les faire souffrir. »
Des souffrances parfois méconnues par leurs propres progénitures. Durant plus de trois heures, les témoignages et les questions fusent. Lors des échanges, plusieurs thématiques sont abordées : l'éducation, le racisme, la transmission des cultures africaines, mais aussi les mariages forcés et les violences sexuelles au sein des communautés. Des sujets sur lesquels il existe des avis divergents selon les générations.
« On est passé du rire aux larmes »
« Ces femmes, elles ne sont pas silencieuses, elles ont été "silenciées", explique Mame Fatou Niang, maîtresse de conférence à l'université de Pittsburgh aux États-Unis. Et on l'a vu là, dans cette salle où on est passé du rire aux larmes. Il y a eu des moments de tensions, il y a eu aussi beaucoup d'amour et on se rend compte qu'au milieu de tout ça, il y a de l'incompréhension. Donc en parler c'est aussi en parler entre nous et pour nous. »
L'initiative était en partie organisée par la marque Sarakulé, qui s'emploie à mettre en valeur les tissus africains et les artisans maliens. En donnant la parole à ces femmes qu'on appelle affectueusement « les mamans », dans une forme de « thérapie collective », cette conversation intergénérationnelle aura permis, de l'aveu du public, de lever le voile sur certains tabous liés à l'immigration.