Comme la plupart des pays d'Afrique de l'Ouest, le Mali est fortement tributaire des combustibles fossiles pour sa production énergétique, mais dispose d'un important potentiel en énergie solaire et éolienne. La stratégie du pays est orientée vers le développement des énergies renouvelables qui restent marginales à l'exception de l'hydroélectricité.
En 2020, le Mali a adopté la Feuille de route nationale « Desert to Power » quantifiant ses objectifs au niveau national, identifiant les actions prioritaires nécessaires pour atteindre les objectifs et ciblant un premier ensemble d'activités prioritaires. Les objectifs clés comprennent une capacité solaire supplémentaire de 399 MW d'ici 2025 et de 977 MW d'ici 2030.
En mars 2021, les Fonds d'investissement climatiques ont dévoilé le Programme d'intégration des énergies renouvelables (REI, sigle en anglais pour Renewable Energy Integration Program), conçu pour surmonter les obstacles qui entravent l'intégration des énergies renouvelables dans le système énergétique. Ce programme CIF-REI, premier du genre, envisage de soutenir les pays à revenu faible et intermédiaire qui transforment leurs systèmes énergétiques pour absorber des niveaux toujours plus élevés de production d'énergie renouvelable variable.
Le Mali a soumis sa proposition en 2021 et a été sélectionné en octobre de la même année, avec le Brésil, la Colombie, le Fidji, le Kenya et l'Ukraine pour participer au programme. Ces pays ont été invités à préparer un plan d'investissement soutenant l'accélération de la transition énergétique en améliorant la fonctionnalité et la flexibilité des systèmes énergétiques afin d'augmenter la pénétration des sources d'énergie renouvelable dans leurs réseaux électriques. Avec la promesse d'une allocation pouvant aller jusqu'à 70 millions de dollars pour les investissements et un don de 500 000 dollars pour préparer le plan d'investissement, le Mali a relevé le défi.
En collaboration avec des banques multilatérales de développement, dont la Banque africaine de développement, la Banque mondiale et la Société financière internationale - entité de la Banque mondiale pour le secteur privé -, le gouvernement malien a entamé le processus de préparation d'un plan d'investissement avec une mission de cadrage en ligne qui a réuni des entités nationales des secteurs public et privé et des organisations de la société civile autour d'un objectif commun.
Le Plan d'investissement du Mali a été approuvé en novembre 2023 sur une approche modulaire avec une première allocation initiale de 32,6 millions de dollars à partager entre la Banque africaine de développement et la Banque mondiale, et une deuxième allocation de 20 millions de dollars assujetti à la disponibilité des fonds supplémentaires, portant ainsi l'allocation totale du REI à 52,6 millions de dollars.
Hamathe Mane, chargé principal des énergies renouvelables à la Banque africaine de développement, explique que « dans le secteur des énergies renouvelables au Mali, nous avons actuellement un taux de pénétration couvrant 3 % de la demande, ce qui est relativement faible. Grâce à ce Plan, nous souhaitons atteindre un taux de pénétration solaire de 15 % à l'horizon 2030. Le financement concessionnel des CIF est crucial, car il permet non seulement de catalyser le financement du secteur privé, mais également d'attirer des financements d'autres partenaires techniques et financiers. Pour ce programme, le financement des CIF est indispensable. Ce plan d'investissement permettra de mobiliser des fonds supplémentaires pour mettre en oeuvre un programme d'un montant total de 670 millions de dollars, est extrêmement important pour le pays. »
Le Mali avait été sélectionné comme pays pilote en juillet 2010 pour le Programme d'expansion des énergies renouvelables (SREP, acronyme en anglais pour Scaling Up Renewable Energy Program) des CIF, au regard de ses défis climatiques, environnementaux et énergétiques. Grâce à une coordination stratégique et à l'expérience du SREP, le Mali, à travers son ministère de l'Énergie et de l'Eau, a préparé son Plan d'investissement CIF-REI, aligné sur les politiques nationales de développement du secteur énergétique, afin de stimuler les investissements à grande échelle dans l'intégration des énergies renouvelables, faisant ainsi écho à l'engagement du pays en faveur d'un avenir durable.
Le Plan d'investissement du Mali a été salué par le sous-comité des programmes mondiaux d'action pour le climat (GCAP) des CIF pour la qualité et la richesse de son contenu. Il couvre trois composantes clés et quatorze activités qui vont de la stimulation des investissements dans des solutions flexibles à l'augmentation de la part des sources d'énergie renouvelable, y compris les systèmes de stockage, en passant par la construction de réseaux nationaux de transport d'électricité et d'interconnexions, et l'établissement de mini-réseaux verts avec les systèmes de stockage associés. Une assistance technique sera également fournie pour aider les gouvernements à mettre en place des politiques adaptées et un environnement propice au développement des énergies renouvelables.
Moussa Ombotimbe, conseiller technique chargé de l'énergie au ministère des Mines, de l'Énergie et de l'Eau du Mali, déclare que « le plan comprend la création de centrales solaires, l'inclusion de lignes de transport, la mise en place de mini-réseaux et le renforcement des capacités, ce qui en fait un plan complet ».
Il servira de cadre d'orientation stratégique pour les politiques et les priorités du gouvernement du Mali dans ses efforts vers la zéro émission nette et des voies de développement inclusives et résilientes au climat.
L'élaboration du Plan d'investissement du Mali a coïncidé avec l'achèvement de l'étude REI financée par la Banque africaine de développement par le biais de sa Facilité d'appui à la transition, complétant le programme REI. Il analyse ses aspects techniques et économiques, y compris l'impact financier de l'intégration d'une part croissante d'énergies renouvelables intermittentes dans le système électrique du Mali.
L'étude a identifié un potentiel de 1 400 MW de capacité solaire à installer d'ici 2035 sur le réseau électrique malien, nécessitant un investissement de 1,146 milliard d'euros pour le système de production, 259 millions d'euros pour le système de stockage, et 102 millions d'euros pour le développement et le renforcement des réseaux électriques. Un atelier de validation pour diffuser les résultats de l'étude auprès du public malien sera organisé par la Banque en mai 2024.
Avec l'appui de la Banque africaine de développement et le financement des CIF, le gouvernement du Mali a organisé un lancement officiel du plan d'investissement lors de la troisième édition de la Semaine malienne des énergies renouvelables (SemR), qui s'est déroulée du 29 février au 2 mars 2024, afin d'informer le public de l'existence du plan et des opportunités qu'il offrirait.
Abdoul Kassim Fomba, ministre de la Jeunesse et des Sports, chargé de l'Éducation civique, représentant le Premier ministre, parrain de la SemR 2024, a déclaré : « Je pense que ce plan donnera à notre pays une certaine autonomie pour de nombreuses années. Le fait que toutes ces ressources nationales et internationales soutiennent ici la volonté politique de développement des énergies renouvelables est, à mon avis, une grande opportunité pour notre pays de se placer parmi les leaders en matière de production d'énergie ».
« Nous avons mis l'accent sur le développement des lignes de transport, et ce faisant, nous favoriserons la croissance des centrales solaires associées et canaliserons leur production vers ce réseau, a déclaré Aminata Fofana, directrice de l'énergie. Ce plan d'investissement soutiendra le secteur des énergies renouvelables et le secteur de l'énergie dans son ensemble, contribuant ainsi à l'électrification globale. Cela nous permettra de modifier notre mix énergétique au Mali de sorte que 30 % de notre énergie provienne de sources renouvelables d'ici 2030. »
Le Mali est mûr pour une transition à un rythme régulier de son passé chargé en combustibles fossiles vers un avenir plus propre en énergies vertes pour sa croissance socio-économique, selon son plan d'investissement.