Comme ça, Laurent Gbagbo est candidat à la présidentielle de 2025 ! On devrait même ajouter « déjà », puisque c'est en octobre de l'année prochaine que le scrutin aura lieu.
Mais à 18 mois de l'échéance, le Parti des peuples africains-Côte d'Ivoire (PPA-CI) l'a désigné puis investi à l'issue d'une convention tenue le vendredi 10 mai 2024 à l'hôtel Ivoire de Cocody, devant des milliers de militants.
Un choix accepté de bon coeur naturellement par l'ex-enfant terrible de Gagnoa, lequel s'engage à ne faire qu'un mandat une fois élu. Morceaux choisis : « J'accepte d'être votre candidat pour aller à la bataille parce qu'il s'agit de la Côte d'Ivoire et de l'Afrique » ; « Je suis candidat pour 2025 et je pense que je vais faire un seul mandat seulement pour fixer les clous. Ils ont tellement mal géré qu'il faut fixer les clous » ; « Donnez-moi le pouvoir, je vous le rendrai. Les gens croient que gérer un pays, c'est une affaire d'économiste. Ce n'est pas vrai. De Gaulle, Pompidou, Jacques Chirac n'étaient pas des économistes. C'est l'homme qui décide de la politique économique et moi, je suis fier d'être historien »(SIC).
Mais une chose est d'être choisi comme le porte-drapeau de sa formation politique et une autre est d'être effectivement candidat le moment venu. Et là, force est de reconnaître qu'il y a loin de la manifestation de la prétention à la réalisation du voeu. Car sauf évolution ultérieure de sa situation judiciaire, le Woody de Mama, à l'heure où il était investi, ne pouvait pas faire acte de candidature. En effet, et cela ne remonte pas jusqu'à Mathusalem, il a été condamné à 20 ans de réclusion dans le casse de la BCEAO de Bouaké pendant la rébellion. Tant d'années après et après être passé par la case CPI, il est rentré d'exil le 17 juin 2021 et a bénéficié d'une grâce présidentielle. Ce qui n'arrange pas ses affaires, lui qui aurait préféré une amnistie en bonne et due forme qui aurait eu l'heur de rendre de nouveau vierge son casier judiciaire. Chose que le président Alassane Dramane Ouattara (ADO) ne semble pas près de faire jusque-là.
Déchu donc de ses droits civiques, le citoyen Laurent Koudou Gbagbo n'a d'ailleurs pas pu s'inscrire sur les listes électorales. Comment donc quelqu'un qui ne peut déjà pas être électeur pourrait-il réussir le tour de force d'être éligible ? On comprend donc que vendredi dernier, il ait appelé les politiciens à « apporter l'apaisement aux Ivoiriens ». Pour ainsi dire, le « gnaga » présidentiel, comme on le dit du côté de la lagune Ebrié, a déjà commencé. Cela d'autant plus que dans le même temps, les partisans d'ADO l'appellent de plus en plus ouvertement à se présenter et à prendre le départ de la course à la magistrature suprême après la modification constitutionnelle opérée en mars 2020 et qui lui permettrait de se taper un second et dernier mandat.
La guerre de tranchées politique est donc déjà ouverte sur un champ de bataille qui n'était déjà pas totalement apaisé. Et d'ici là, beaucoup d'eau peut encore couler sous les ponts. Le parcours du combattant du soldat Gbagbo ne fait donc que commencer.