Les problèmes d'alimentation en électricité ne faiblissent pas, au Mali. En dépit des engagements récurrents des autorités de transition, les habitants de tout le pays subissent des délestages massifs, les privant de courant pendant parfois des dizaines d'heures, voire plusieurs jours d'affilée.
Les conséquences sont dramatiques pour les petits artisans, pour les entreprises ou encore pour les hôpitaux. RFI s'en est souvent fait l'écho. Ces délestages massifs ont des conséquences aussi pour le secteur de l'art et de la culture. Le week-end dernier, un prestigieux centre culturel de Bamako annonçait devoir fermer ses portes. Les musiciens maliens témoignent également de leurs difficultés.
Le BlonBa, dans le quartier de Baco-Djicoroni, est à la fois un lieu de création et de spectacle qui a vu défiler de nombreux artistes, déjà prestigieux ou prometteurs : musiciens, comédiens, danseurs ou encore humoristes.
Fondé il y a dix-sept ans, en 2007, ce complexe culturel est parmi les plus réputés de la capitale, mais son fondateur, le cinéaste Alioune Ifra Ndiaye, a dû se résigner à fermer, faute d'électricité : « Avec les coupures régulières de courant, nous avons dû sur-utiliser notre groupe parce que le groupe électrogène est fait pour être utilisé peut-être quatre heures ou cinq heures... Nous avons été au-delà de ça, et donc nous avons perdu notre groupe, il a pris feu ! Nous devons utiliser de la lumière, du son, de la climatisation pour certaines pratiques que nous accueillons. Tout ça est impossible aujourd'hui ! Donc, on a dû se résoudre à fermer parce qu'on ne fait plus de recettes. »
À cause de la crise politique et sécuritaire, le BlonBa avait déjà cessé ses activités entre 2012 et 2017. Depuis deux ans, privé des financements publics français qui soutenaient ses activités, en raison des tensions entre Paris et les autorités maliennes de transition, il connaissait déjà d'importantes difficultés. La perte de son générateur lui a donc donné le coup de grâce. Nombreux sont ceux qui espèrent le voir une nouvelle fois renaître de ses cendres.
Kalil Touré, lui, dirige un studio d'enregistrement dans le quartier Niamana-ATT Bougou, mais il est trop souvent en pause forcée : « Au moment où je vous parle, je travaille pour une artiste qui fait souvent ses enregistrements chez moi. Tout de suite, même, j'ai son morceau dans la machine. Mais on ne parvient pas à travailler parce qu'il n'y a pas de courant. Parfois, je suis obligé de louer un groupe électrogène pour m'en sortir, mais c'est rare, parce que s'il n'y a pas suffisamment de rentabilité, ce n'est pas la peine... Je ne peux rien faire sans l'électricité ! Je suis bloqué. »
Kalil Touré est également guitariste et réparateur d'instruments de musique, des activités qui ne sont pas moins pénalisées par l'absence de courant. Et d'autres musiciens, joints par RFI font également part de leur détresse. Répéter ou se produire dans les maquis est devenu mission impossible, les coupures imposent leur triste loi du silence.