Ile Maurice: Incohérences et lacunes

«L'environment Bill vient remplacer l'Environment Protection Act de 2002 par un cadre législatif moderne pour assurer une meilleure protection, gestion et conservation de l'environnement.

Ce projet de loi révisé découle des résultats des Assises de l'environnement en décembre 2019», indique le ministre de tutelle, Kavydass Ramano. Parmi les thèmes clés pour moderniser la législation et l'adapter aux défis futurs, un observatoire de l'environnement, qui servira de plateforme de communication et de partage des données, un mécanisme pour la protection, la gestion et la conservation d'Environmentally Sensitive Areas (ESA), le renforcement de la transparence du Preliminary Environmental Report (PER) et de l'Environmental Impact Assessment,(EIA), un National Oil Spill Coordination Committee, une coordination renforcée entre toutes les parties prenantes et l'introduction d'un cadre de gestion des plastiques pour réaliser la vision d'une île sans plastique.

Pays à risque

Pour Sunil Dowarkasing, consultant en environnement, Maurice étant un des petits pays les plus vulnérables - avec 1,5 % de forêts endémiques, 30 % de coraux vivants - et le deuxième pays le plus menacé au monde en termes d'espèces en danger. La qualité de l'air dépasse les niveaux acceptables, le site d'enfouissement est saturé. Nous sommes confrontés à une série de défis et l'impact continu du changement climatique, avec des inondations soudaines, une érosion des plages. Ce projet de loi compte de bons concepts, comme un observatoire de l'environnement, la réintroduction de l'évaluation environnementale stratégique qui existait dans la loi de 1991 et a été retirée en 2022, ainsi que l'introduction des zones sensibles sur le plan environnemental. «Cependant, ces points positifs sont accompagnés d'incohérences. Le concept du développement durable inclut l'environnement, le social et l'économie. Cependant, le projet de loi semble souvent faire une distinction entre le social et l'environnement, ce qui est contradictoire. De plus, son timing est mauvais, car il intervient en fin de mandat.»

%

Le consultant déplore aussi la lourdeur administrative qui sera rajoutée. «Des observatoires seront mis en place dans plusieurs secteurs, mais la composition laisse à désirer. Les ONG ne sont pas inclues. De plus, l'observatoire est lui-même une structure qui compte une Science to Policy Platform avec plusieurs niveaux. Cela rend très difficile et compliqué le suivi et la protection de l'environnement, alors que cela devrait être simple pour agir rapidement. Et il y a plus de dix structures. C'est du red tapism.» Il estime que le directeur de l'environnement aurait dû être détaché du ministère pour être indépendant. Dans ce sens il préconise la création d'un Ombudsman for Environment.

Une autre incohérence concerne les zones sensibles. Sunil Dowarkasing rappelle qu'un ESA Bill avait été présenté, mais n'a jamais été voté. Par la suite, une série de permis EIA ont été délivrés et ce n'est que maintenant qu'un comité sera mis sur pied. En ce qui concerne la réintroduction du SEA, il fait ressortir que les projets du gouvernement en seront exemptés. «Et on dit que c'est une loi moderne ? Les projets gouvernementaux n'endommagent pas l'environnement ? Il faut savoir que ces études protègent non seulement de protéger l'environnement mais aussi le projet lui-même.»

Droits des citoyens

David Sauvage de Rezistans ek Alternativ, relève, lui, que depuis 2009, l'étude des ESA démontrent que notre législation ne protège pas la nature. *«Au lieu de proposer un ESA Bill comme recommandé, le ministre de l'Environnement continue l'opération d'entourloupe avec une couche d'un vert bourgeois pathétique avant les élections. Un simple comité mis en place pour les ESA. L'étude d'impact cumulatif des projets fonciers n'est toujours pas imposée. Les citoyens n'ont toujours pas le droit de défendre la Nature !», déplore-t-il. Quant à l'usage du plastique, il fait ressortir qu'il n'y aura qu'un Plastic Management Committee sur lequel siègeront les producteurs. *«Il n'y a aucune interdiction des plastiques à usage unique de l'activité des boissons gazeuses jusqu'en 2030, tel que spécifié par le ministre dans son plan directeur de l'Environnement 2020-2030», fait-il ressortir.

Keshwar Beeharry-Panray, Chief Executive d'Environmental Protection and Conservation Organisation (EPCO), insiste sur la nécessité d'une volonté positive pour agir dans l'intérêt de l'environnement. Hormis les mesures pour protéger l'environnement, il observe que l'échec est souvent constaté dans la phase d'implémentation. «Les conséquences du changement climatique ne feront qu'empirer. Il y aura plus que les inondations auxquelles nous faisons face. Il y a l'aspect de la sécurité alimentaire, la sécheresse, etc. Il est donc impératif d'agir dès maintenant. Chacun a un rôle à jouer, que ce soit le gouvernement, les ONG ou les citoyens. L'environnement concerne tout le monde. Personne ne doit être mis de côté. Les décideurs doivent comprendre l'urgence de la situation et agir en conséquence. Cela n'est pas le cas et Maurice est en retard en ce qu'il s'agit des actions à entreprendre pour le développement durable.»

AllAfrica publie environ 600 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.