Burkina Faso: Un tournant décisif

En Guinée, le procès du massacre du 28 septembre 2009 au stade de Conakry est entré dans une nouvelle phase, depuis hier lundi 13 mai, avec le début des plaidoiries des avocats. Depuis près de deux ans, la machine judiciaire est à pied d'oeuvre, pour situer les responsabili tés dans cette affaire.

Le 28 septembre 2009, des forces de sécurité guinéenne dont des membres de la garde présidentielle appelés les « Bérets rouges » avaient ouvert le feu sur des manifestants opposés à la probable candidature du Président d'alors, le capitaine Moussa Dadis Camara, à la présidentielle en vue.

Cette violente répression avait couté la vie à 156 personnes et fait de nombreux blessés. Le bilan faisait également état d'une centaine de femmes victimes de viol et autres formes de violences sexuelles. Ces événements sont bien évidemment

passés à la loupe par les juges qui cherchent le fin mot de cette ténébreuse histoire.

Après les interrogatoires et les confrontations entre la dizaine d'accusés avec en tête l'ancien Président, Moussa Dadis Camara, les victimes et les témoins, le temps est venu pour les conseils des parties civiles et de la défense de déployer leurs arguments en fonction des intérêts de part et d'autre.

Le but ultime de cette phase, pour la moins cruciale, est de convaincre le tribunal de l'innocence ou de la culpabilité des accusés, selon qu'on prêche pour leur chapelle ou pour celle des victimes. Mais le plus grand défi se pose aux avocats des accusés qui devraient convaincre le tribunal de l'innocence de leurs

clients. Le fait étant surtout que le ministère public souhaite une requalification des faits en « crime contre l'humanité », une question quidevra être tranchée sur la décision dans le fond. Ces avocats devraient aller dans le sens de leurs clients qui, pour la plupart, ont plaidé non coupable, face aux chefs d'accusation portés contre eux : meurtre, complicité de meurtre, violences sexuelles, actes de torture et enlèvements...

A commencer par la star du banc des accusés, Dadis Camara, qui n'a de cesse de crier au complot contre lui. Pour lui, le seul responsable du massacre du 28 septembre 2009, c'est son ex-aide de camp et chef de la garde présidentielle, Toumba Diakité, qui l'aurait forcé à rester dans son bureau, tandis que son assistant est allé au stade commettre le massacre. Suite à une discussion sur le sujet qui a mal tourné, ce militaire n'avait-t-il pas tiré sur Dadis Camara qui a miraculeusement survécu après des soins intensifs ? Le tribunal ne pouvait pas s'attendre à de grandes révélations dans une affaire impliquant des soldats qui, malgré leurs divergences, n'ont pas véritablement édifié les Guinéens en quête de vérité.

L'inquiétude est d'autant plus grande, que l'un des accusés clé, le colonel Claude Pivi, reste introuvable depuis son évasion de prison en plein procès, courant novembre 2023. Il est activement recherché par le gouvernement guinéen qui a promis plus de 50 000 euros de récompense à qui aiderait à le retrouver. Mais on a bien peur que le procès finisse sans que l'on ne mette la main sur cet autre militaire craint, qui n'a certainement pas tout dit lors de son passage à la barre. En tous les cas, il sera difficile pour Dadis Camara et ses coaccusés de sortir indemnes de cette affaire, tant leur inculpation n'est pas un fruit du hasard. Ils ne sauraient ignorer les faits, au point d'être blanc comme neige. Il est à souhaiter que la phase des plaidoiries se déroule sans accroc, de sorte à laisser place à celle des réquisitions et enfin... au verdict très attendu par les proches des victimes et les défenseurs des droits de l'Homme.

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