Mali: Dans des vidéos, un officier justifie les exactions de l'armée

Sur deux vidéos dont la date d'enregistrement n'a pas pu être formellement recoupée, un haut-gradé de l'armée malienne tient des propos qui pourraient constituer des aveux d'exactions passées. Il demande aux habitants d'un village de déposer les armes, et de faire passer le message aux jihadistes de la zone. Puis il menace les villageois violemment, dans des propos qui sembleraient confirmer les nombreuses accusations d'exactions portées contre les Forces armées maliennes. Les vidéos, qui semblent dater de la fin de semaine dernière, ont commencé à circuler lundi 13 mai au soir sur les réseaux sociaux.

D'après l'étiquette collée sur son uniforme, il s'appelle Koumaré. Et d'après ses galons, il est lieutenant-colonel, soit un grade élevé, à fortiori sur le terrain.

Dans un village apparemment soupçonné de collusion avec les jihadistes, cet officier supérieur invite les habitants rassemblés à reconnaître leurs torts et à déposer les armes avant l'hivernage - la saison des pluies commence habituellement au mois de juin au Mali. Il leur suggère même de s'adresser pour cela aux Tall, une famille religieuse emblématique de la ville de Nioro du Sahel, dans la région de Kayes.

« Faites passer le message », exhorte encore le lieutenant-colonel Koumaré, qui s'exprime en bambara, entouré d'autres soldats maliens, pendant qu'un civil traduit ses propos en langue peule.

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Le lieutenant-colonel Koumaré précise, dans son discours, se trouver dans un village à une quarantaine de kilomètres de Nioro. Selon plusieurs sources locales, il pourrait s'agir de la commune de Gavinané, à la frontière mauritanienne. Car le dialecte peul employé correspond bien à celui qui est utilisé dans la zone de Nioro.

Puis, le haut-gradé malien passe des promesses de pardon aux menaces : « vous ne nous avez jamais vu en opération, mais vous en avez entendu parler : nous avons coupé des personnes en deux, nous en avons égorgé d'autres, nous avons brûlé des villages. » Le militaire malien justifie ces actes, clairement assumés et même revendiqués, mais assimilables à des crimes de guerre - exécutions sommaires, punitions collectives -, par le fait que les jihadistes utilisent eux-mêmes la violence.

Il ajoute que l'armée a pour objectif de sécuriser le Mali. « Nous avons brûlé des villages parce qu'ils n'avaient pas compris », poursuit le militaire malien, comme une mise en garde. À aucun moment le lieutenant-colonel Koumaré ne cite les supplétifs russes du groupe Wagner, dont les autorités de transition n'ont toujours pas officiellement reconnu la présence aux côtés des forces armées maliennes.

Sollicitée par RFI au sujet de ces vidéos, l'armée malienne n'a pas donné suite.

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