Ile Maurice: Perpétuellement en campagne électorale

Après les élections du 27 février 2022, l'île Rodrigues, également la 21e circonscription de la République de Maurice, s'apprête à vivre une autre campagne électorale en pratiquement deux années.

À vrai dire, les 32 551 électeurs rodriguais sont toujours en campagne électorale. Après les prochaines élections générales, les politiciens ne mettront leur machine en veilleuse que pour quelques mois avant d'entamer une nouvelle campagne électorale pour les élections régionales.

Les enjeux de ces élections générales sont simples à Rodrigues. L'Organisation du peuple de Rodrigues (OPR) devra défendre les sièges à l'Assemblée nationale occupés depuis 1982. L'OPR a remporté toutes les élections générales depuis 1982, sauf celles de 2010, quand le Mouvement Rodriguais de Nicolas Von-Mally a édité l'exploit. Cependant, l'OPR a toujours été représentée à l'Assemblée nationale. En 2010, Francisco François a été nommé député correctif malgré la défaite de son parti. Il devra aussi prouver que la défaite lors des élections régionales de 2022 n'a été qu'un accident de parcours.

L'alliance poste électorale, composée du Front patriotique rodriguais écologique (FPRe), du Parti Mauricien social-démocrate Rodrigues (PMSD-Rodrigues), de l'Union du peuple de Rodrigues (UPR), du Mouvement Militant Rodriguais et Mouvement indépendantiste rodriguais, devra tenter de mettre fin à l'exploit de l'OPR sur le plan national.

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De plus, une victoire pour elle sera une confirmation de sa popularité après avoir remporté les élections régionales de 2022 en prenant le pouvoir que l'OPR contrôlait à l'Assemblée régionale de Rodrigues depuis 2012. Cependant, cette alliance a connu des secousses internes depuis les élections de 2022. Il y a eu des tensions entre Johnson Roussety, le leader du FPR, et d'autres commissaires de l'Assemblée régionale dans le sillage de la passation de pouvoir pour le poste du chef commissaire, entre lui et le leader de l'UPR, Franceau Grandcourt, en mars. De son côté, son principal adversaire, l'OPR, a fait peau neuve.

Une chose est certaine : Francisco François, qui est député de la circonscription n°21 depuis 2010, ne sera pas candidat aux prochaines législatives. Il est le nouvel homme fort de l'OPR, succédant à Serge Clair, un des fondateurs de ce parti et leader emblématique. Désormais, il vise le poste de chef commissaire de Rodrigues et, pour l'obtenir, il devra briguer les élections régionales de 2027. Buisson Léopold, le secrétaire général de ce parti, sera certainement candidat aux législatives et, d'après nos informations, il aura une colistière. L'alliance gouvernementale de Rodrigues n'a pas encore proposé ses deux candidats. Pour sa part, Nicolas Von-Mally, le leader du Mouvement rodriguais, pourrait probablement briguer ces élections.

Par ailleurs, le paysage politique a bien évolué depuis les dernières élections générales. Il y a eu, bien évidemment, une alliance qui s'est concrétisée entre différents partis de l'opposition, mais sans la participation du Mouvement rodriguais. Le parti de Nicolas Von-Mally a connu une scission après les élections générales de 2022. Plusieurs membres de ce parti, notamment Franceau Grandcourt, ont reproché à leur leader de n'avoir pas voulu faire une alliance avec le PMSD-Rodrigues avant les élections. Franceau Grandcourt et d'autres élus de l'Assemblée régionale ont quitté leur parti pour fonder l'UPR.

Cette circonscription est particulière. Il n'y a que deux élus selon le système first-past-the-post, mais le best loser system peut bien repêcher des candidats rodriguais comme cela a été le cas en 2005 quand les Rodriguais ont eu droit à quatre représentants au Parlement. L'OPR avait fait élire Jean Alex Nancy et Robert Spéville alors que les deux candidats du Mouvement rodriguais, Christian Léopold et Nicolas Von-Mally, avaient été décrétés best-losers.

Des attentes fondamentales

Joyce Jhabeemissur, de Nassola : «Davantage de femmes»

«Dans un premier temps, j'aimerais voir deux ou quatre femmes participer à cette joute. Certaines ont la capacité de défendre les intérêts du pays plutôt que les intérêts personnels. Des femmes compétentes qui ont du mal à s'impliquer dans la vie politique. Je suis également favorable aux candidats masculins, mais ils devraient être des élus déterminés à défendre les intérêts et les aspirations des Rodriguais.

Zita Jean Louis, la dernière femme à avoir siégé au Parlement national, cela remonte à plus de 30 ans. Ensuite, afin de permettre aux Rodriguais de se faire entendre, il est temps que nos élus ne se joignent pas au gouvernement, comme cela s'est produit précédemment. Ils ne parviennent pas à accomplir le rôle de véritable député en se concentrant uniquement sur les intérêts du gouvernement. S'ils gardent leurs distances, ils pourront mieux nous représenter. Cependant, s'ils continuent à être membres de la majorité gouvernementale, ils devront le faire à certaines conditions.

Il faudrait d'abord que le portefeuille du ministère de Rodrigues soit rendu à un fils ou à une fille au sol. Il est impératif de mettre en place un Rodriguan desk afin de résoudre les difficultés auxquelles font face nos concitoyens à Maurice, ainsi que ceux qui se déplacent pour des soins, des études et d'autres transactions. La participation du chef commissaire au Conseil des ministres est une autre condition, conformément à la Rodrigues Régional Assembly Act. Finalement, en cas de non-inclusion de notre chef commissaire au cabinet, il serait nécessaire de modifier cette loi pour accorder plus de pouvoir au conseil exécutif.» Telles sont les revendications de cette militante, trentenaire.

Ravina Jameson alias Bruno, de Mt-Goyaves : «La jeunesse doit se sentir concernée»

«Les élections générales à Rodrigues sont très attendues chez les deux principaux blocs politiques de l'île, l'OPR et l'Alliance de libération. Après un changement de régime au ni- veau régional, les deux partis vont pouvoir faire un constat de leurs forces et faiblesses. Cette élection se fera notamment avec la participation de la jeunesse, car de nombreux jeunes attendent ces élections avec impatience.

Elle sera aussi déterminante dans la conjoncture actuelle, où après dix ans, Rodrigues pourra avoir quatre députés au niveau national. En effet, en fonction des pourcentages de votes obtenus lors des dernières élections régionales, deux députés rodriguais auront peut-être la chance d'être élus «best losers». D'un point de vue personnel, je pense que cette élection sera très disputée, non seulement du point de vue des votes, mais aussi grandement dépendante du choix des candidats par les deux principaux blocs de l'île.

De plus, la forte affluence lors du dernier meeting des deux blocs le 1er-Mai, l'OPR semble indiquer une dynamique ascendante. Selon la taille des foules présentes, cette élection s'annonce très serrée. En tant que jeune, je veux que la jeunesse prenne conscience de l'importance d'une élection, car c'est à nous, les jeunes, que reviendra la responsabilité de prendre le flambeau et de mener le pays vers un avenir meilleur.

La jeunesse est l'avenir de demain, et j'invite donc toute la jeunesse rodriguaise à s'intéresser davantage à la politique et à se sentir concernée. Pourquoi ne pas avoir un novice comme candidat ? Rien n'est impossible quand on croit en sa capacité de réussir et d'apporter des changements positifs dans notre société. Comme mot de la fin, je dis : Zenes pran to plas, kar okenn rev pa tro gran ek okenn rev pa tro tipti.» Bruno, 31 ans, est détenteur d'un Degree in Public policy and governance with economic finance. Actuellement, il poursuit un Master in Economic law.

Jean Danoel Jolicoeur, de Coromandel: «Assez dilapidé»

«Rodrigues se trouve actuellement dans une conjoncture plutôt drôle. Nous avons deux membres élus sous la bannière de l'OPR dans le gouvernement qui n'ont servi à rien et qui ont soutenu le gouvernement Mouvement socialiste militant (MSM) dans ses déboires sans même prendre aucune responsabilité morale et éthique quant aux termes récurrents durant ce mandat - la mort de Kistnen, le coût de la vie, les dépenses survenues lors de la pandémie de Covid-19, le law and order et récemment, la polémique autour de la carte d'identité et le réenregistrement des cartes SIM. Si le PMSD s'allie avec le MSM, le gouvernement de l'alliance régionale va se retrouver contre son gré en alliance avec l'OPR.

Je pense que nous attendons la même chose de ce futur gouvernement, une attente qui dure des siècles et des siècles. L'augmentation du Budget ; qu'on arrête de dilapider les biens communs, les fonds et institutions publiques et arrêter les lobbies du secteur privé sur le plan local. Malerezman ziska ler, malgre ki boukou dir bizin ena enn pretandan Premye Minis dan sak parti pou diel elektoral, zamin nou'nn trouv enn pretandan Premie Minis dan Moris, ansam ek so parti, amenn enn manifes ou bann mezir ki montre ki li oule vinn minis enn Repiblik ek non pa enn Premye Minis enn zil ou enn Premye Minis zis pou so bann», analyse cet enseignant quadragénaire.

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