Soudan: El Fasher, des habitants pris en tenaille entre les bombardements, les snipers et la famine

Au Soudan, la bataille d'El Fasher se poursuit. Depuis vendredi 10 mai, les forces paramilitaires du général Hemedti ont lancé leur offensive sur la ville d'El Fasher, capitale du Darfour-Nord. Il s'agit de la dernière grande ville du Darfour toujours sous contrôle de l'armée fédérale, dirigée par le général al-Burhan. Alors qu'ils sont 1,5 million à y être, les habitants ont fait part, par téléphone, de bombardements intenses et de la présence de snipers embusqués dans les rues de la ville.

Ce sont les quartiers est d'El Fasher qui sont les plus touchés par les affrontements de ces derniers jours : la journée de mercredi 16 mai a été sanglante, explique un habitant contacté par téléphone.

Les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR, dirigées par le général Hemedti) ont réussi à s'infiltrer dans certains quartiers, l'armée a répondu en bombardant, puis des obus sont tombés sur une dizaine de maisons et sur une école qui abritait des déplacés. De nombreux civils ont été tués et blessés, affirme ce même habitant.

L'ONG Médecins sans frontières, qui opère un des deux seuls hôpitaux encore ouverts de la ville, dit avoir reçu plus de 450 blessés depuis vendredi, dont 56 ont succombé à leurs blessures. Le nombre de morts et de blessés est probablement plus élevé, estime un médecin de l'ONG, car les combats sont continus et si intenses que de nombreux habitants ne parviennent pas à atteindre l'hôpital.

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Un journaliste local dénonce également la présence de paramilitaires embusqués sur les toits dans ces quartiers Est, et qui tirent sur les civils qui tentent de regagner leurs habitations après les bombardements.

Selon Mathilde Vu, porte-parole de l'organisation Norwegian Refugee Council (NRC), « la situation humanitaire « est terrible ». « Un collègue a fait part d'artillerie lourde au milieu des quartiers résidentiels, il y a eu le bombardement d'un hôpital pédiatrique avec des enfants qui sont morts. Cela fait plusieurs jours que les combats ne cessent pas, avec aucun respect du droit international humanitaire, aucun respect pour les civils », poursuit-elle, choquée.

Des habitants « obligés de manger des feuilles », des « femmes obligées de se prostituer pour avoir accès à de la nourriture »

Mercredi 15 mai, l'ONU a à nouveau mis en garde contre le risque de famine dans le pays et appelé les belligérants à autoriser l'entrée de l'aide humanitaire dans la région du Darfour.

En raison des combats féroces, la situation alimentaire à travers le pays est « complètement catastrophique », explique Mathilde Vu. « On est dans une situation de famine, avec des gens qui sont obligés de manger des feuilles, de la terre, des insectes pour survivre, s'indigne la porte-parole de NRC. On a des personnes qui mangent des chats dans la capitale et, dans le Darfour, beaucoup de femmes sont obligées de se prostituer pour avoir accès à la nourriture. »

02:35 Au Soudan, la situation est « complètement catastrophique» de «famine», avec des gens obligées « de manger des feuilles, de la terre, des insectes et des chats pour survivre», explique Mathilde Vu, porte-parole de l'organisation Norwegian Refugee Council (NRC)

Une centaine d'organisations humanitaires ont également appelé les belligérants à rétablir les télécommunications dans le pays. Celles-ci ont été coupées à l'échelle nationale pendant « plus d'un mois » en février, avec de graves conséquences pour les habitants. Des vastes zones du Darfour en sont toujours privées. Pourtant, ces liaisons sont vitales pour la population et peuvent sauver des vies, notamment pour savoir où ont lieu les combats et comment les fuir, explique Mathilde Vu.

00:59 Selon Mathilde Vu, du Norwegian Refugee Council, rétablir internet est essentiel, car «les civils dépendent d'internet pour recevoir de l'argent de l'étranger, des ONG, mais aussi ne pas savoir se sauver ou trouver des routes sécurisées pour fuir dans la nuit»

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