Le Haut-commissariat aux droits de l'Homme de l'ONU a dénoncé vendredi « l'intimidation et le harcèlement » dont sont victimes en Tunisie des avocats et des membres de médias critiques du pouvoir. Parmi eux, Saadia Mosbah, figure de la lutte contre le racisme. La LDH proteste contre son arrestation.
« L'État de droit doit être respecté et les personnes détenues arbitrairement, y compris pour avoir défendu les droits des migrants et lutté contre la discrimination raciale, doivent être libérées », exige le Haut-Commissariat, alors que des voix s'élèvent pour protester contre l'arrestation le 7 mai de Saadia Mosbah, figure de la lutte contre le racisme. Avec son association Mnemty, Saadia Mosbah est fortement engagée pour la défense des droits des migrants subsahariens qui ont été l'objet de violences racistes ces derniers mois en Tunisie. Des violences nourries par le discours officiel, à commencer par celui du président Kaïs Saïed que dénonçait Saadia Mosbah, y compris sur l'antenne de RFI.
« Elle est fondatrice d'une association antiraciste, qui a obtenu d'ailleurs de très bons succès dans ses combats puisqu'en 2018, elle a été l'une des associations qui a permis une loi contre les propos racistes, rappelle Patrick Baudouin, avocat et président de la Ligue des droits de l'Homme, joint par Magali Lagrange du service Afrique. Mais depuis un an, on est dans une situation bien différente puisque le président, lors d'un discours qui avait provoqué, d'ailleurs, des violences, avait pris à son compte ce qu'on appelle la thèse du grand remplacement, qui entraînait une volonté de rejet de ces migrants subsahariens et même de rejet des Tunisiens noirs ayant la citoyenneté tunisienne. Donc c'est dans ce contexte que Saadia Mosbah est arrêtée. Et là, on a estimé absolument nécessaire d'exiger qu'elle soit immédiatement libérée, que cesse toute poursuite à son encontre et que la Tunisie redevienne un pays d'ouverture et non pas de fermeture, qui calquerait sa politique migratoire sur les pires dérives qu'hélas, on peut rencontrer du côté de certains pays européens ».
Le racisme anti-Noirs en Tunisie et les restrictions aux libertés individuelles, notamment d'expression, sous la présidence de Kaïs Saïed, c'était le thème de Carrefour du Maghreb, hier samedi sur RFI.