Madagascar: « Fidinana ifotony » dans les Districts - Pouvoirs propres du président de la République

À l'instar de l'histoire de « chou-fleur » sur l'esplanade d'Analakely que le Collectif des 11 candidats avait voulu exploiter à son compte lors de la présidentielle, le communiqué d'une partie de la communauté internationale fait les ...choux gras de l'opposition qui engage un faux débat

Déclaration classique

L'opposition - toutes ailes confondues - a vite fait de conclure que la Délégation de l'Union européenne, les ambassades du Royaume Uni, d'Allemagne, de Suisse, des États-Unis et de France ainsi que la Représentation de l'OIF pour l'Océan Indien ciblent le régime en place. Tout particulièrement les tournées dans une trentaine de Districts du président de la République. En fait, force est de constater que le communiqué en date du 16 mai 2024 est, somme toute, une déclaration classique en période électorale et s'adresse à tous les acteurs politiques. Sans distinction. « La loi est la même pour tous, qu'elle protège, qu'elle oblige ou qu'elle punisse ».

Ni ruban ni invités

Dans le cas d'espèce, il s'agit de la loi organique relative au régime général des élections et des référendums promulguée en 2018, c'est-à-dire du temps du précédent régime. L'opposition brandit l'article 61 alinéa 1er qui édicte que « Toute inauguration officielle est interdite pendant la durée de la campagne électorale ». Une manière de viser l'actuel locataire d'Iavoloha qu'aucun texte n'interdit expressément d'effectuer en tout temps et en tout lieu, des « fidinana ifotony » en pleine...campagne.

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Dans les deux sens du terme. En tout cas, il n'y a eu ni coupure de ruban ni invités ni plaque commémorative qui symbolisent habituellement et protocolairement toute inauguration au sens de la loi électorale qui est d'interprétation stricte. La distribution de « kara-tany » ne peut, par exemple, être assimilée à une inauguration de « zava-bita ».

Fonctionnement régulier

De toute façon, en vertu de la hiérarchie des normes, la loi organique en question ne prime pas sur la Constitution qui dispose en son article 45 alinéa 3 qu' « Il est le garant, par son arbitrage, du fonctionnement régulier et continu des pouvoirs publics (...). Élections ou pas, il (le président de la République) assure sa mission dans le cadre des pouvoirs qui lui sont conférés par la Constitution de la Quatrième République de Madagascar qui est le copier-coller, enfin presque, de la Constitution de la Cinquième République Française. À savoir, l'article 5 qui stipule que « Il (le président de la République) assure par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'Etat ».

Aucun soutien explicite

Il est le président français qui dispose constitutionnellement de pouvoirs propres comme son homologue malgache. L'ambassade de France qui figure parmi les signataires du communiqué susmentionné sait très bien que la campagne pour les élections européennes n'a pas empêché Emmanuel Macron de se déplacer à La Sorbonne le 2 mai dernier où son discours avait un lien direct avec le scrutin du 09 juin 2024, à son corps défendant d'exprimer un soutien explicite à la liste de la majorité, sans se priver de pourfendre le camp d'en face.

Andry Rajoelina n'a pas non plus apporté de soutien explicite aux candidats de l'IRMAR lors de ses tournées présidentielles, même si cela n'empêche pas ses adversaires d'invoquer l'article 49 de la Constitution qui prévoit que « les fonctions de président de la République sont incompatibles avec toute activité au sein d'un parti politique, d'un groupement politique (...) ». Pour sa part, Andry Rajoelina ne peut empêcher un parti ou un groupement politique d'associer son nom ou sa personne à leurs activités, notamment en cette période électorale.

Pouvoirs régaliens

Concernant le communiqué de la communauté internationale, on est en droit - au propre comme au figuré - de se demander si les principes directeurs basés sur les bonnes pratiques et les standards internationaux en matière d'élection, ne sont pas les mêmes dans des pays comme Madagascar et dans les démocraties dites avancées, pour ne citer que la France dont la loi fondamentale a pourtant inspiré le système malgache.

Aux États-Unis, qualifiés de berceau de la démocratie et dont l'ambassade a également signé le communiqué en question, on ne fait pas le distinguo entre les tournées du président Joe Biden et celles du candidat à sa propre succession. La Constitution des États-Unis - pas plus que celle de la France d'ailleurs - n'exige la démission du président en exercice qui se porte candidat, tel que c'est le cas à Madagascar où les signataires du communiqué du 16 mai 2024 « encouragent l'ensemble des citoyens à participer activement au scrutin du 29 mai prochain ».

Si ce n'est pas une sorte d'ingérence, cela lui ressemble puisque les élections relèvent de la souveraineté nationale et des pouvoirs régaliens de l'État. On imagine mal les ambassades de Madagascar encourager l'ensemble des citoyens à participer activement au scrutin du 09 juin prochain en Europe et celui 05 novembre de cette année aux États-Unis.

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