Ile Maurice: 13 questions au ministre des Finances

La préparation de la loi de finances 2024-25 entre dans sa dernière étape. Au ministère des Finances, l'on est conscient qu'aucun faux-pas n'est permis puisque c'est le dernier Budget de la présente mandature.

C'est une chance ultime pour le ministre des Finances de frapper un grand coup et de convaincre les agents économiques que ce gouvernement a l'étoffe, l'expertise et la vision pour mener le pays sur la voie de la prospérité lors du prochain quinquennat.

Il ne faut pas s'y méprendre: ce Budget engage avant tout la réputation du gouvernement. Ayant lui-même piloté de nombreux budgets, le Premier ministre, Pravind Jugnauth, sait pertinemment qu'il dispose d'une arme politique redoutable. Bien ficelé et saupoudré d'une bonne dose de mesures populaires, pour ne pas dire populistes, un budget permet de créer un climat de confiance au sein de la population. Il peut s'avérer un game changer dans la perspective d'un scrutin national.

Ainsi, Renganaden Padayachy n'a pas tout à fait les coudées franches pour l'élaboration des mesures budgétaires. Sa principale mission, c'est surtout de s'assurer que le Budget reste cohérent avec la vision gouvernementale. Malgré la crise, le gouvernement est resté fidèle à son engagement pris lors du discours-programme en 2019 de prôner un modèle plus inclusif et plus équitable.

Pour donner la confiance aux agents économiques et insuffler de l'énergie à une économie au bord du gouffre, Renganaden Padayachy n'avait pas hésité à recourir à des techniques non orthodoxes comme aller solliciter la Banque de Maurice pour une contribution exceptionnelle de Rs 60 milliards pour financer le Budget 2020-21. Mal avisé, il avait, à la fin du discours budgétaire, évoqué un Budget en parfait équilibre entre les dépenses et les revenus, donc avec zéro déficit budgétaire.

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Alors qu'il présente son cinquième Budget, le Grand argentier a certainement beaucoup mûri. S'il faut s'attendre à des effets d'annonce et à un récital des projets qui seront développés dans les 21 circonscriptions de la République, c'est surtout par rapport à son contenu que ce Budget sera jaugé. Dans une récente déclaration, le ministre des Finances a donné un aperçu de ce que constituera l'architecture de son Budget. Trois axes seront priorisés : le capital humain, la résilience économique et l'environnement.

Ce triptyque social-économie-environnement laisse à penser que le Budget s'inscrira non seulement dans la continuité, mais aussi qu'il viendra répondre autant à des priorités de moyen et long termes que de courte échéance. Ce discours est encourageant et engageant à la fois car le pays est à une période charnière. Alors que le débat est lancé, les questions suivantes nous semblent pertinentes dans le contexte de l'élaboration du Budget.

Capital humain

1.Comment garder l'homme au centre du progrès dans un monde qui se digitalise et où l'intelligence artificielle est autant une menace qu'une source d'opportunités ?

2.Comment soutenir les couches les plus vulnérables tout en protégeant la classe moyenne ?

3.Quelle formule adopter pour résoudre la problématique de pénurie de main-d'oeuvre ?

4.Quelle stratégie pour améliorer l'inclusion des femmes et des personnes autrement capables dans les entreprises ?

Résilience économique

1.Comment accélérer la diversification de l'économie mauricienne et développer de nouveaux pôles de croissance ?

2.Comment élargir notre base industrielle et produire plus pour le marché local ?

3.Comment endiguer le creusement du déficit commercial ?

4.Comment sortir de ce cycle de roupie faible qui contribue à la paupérisation de la population ?

5.Quelle politique pour soutenir les PME qui, contrairement aux grandes entreprises, font davantage face à des problèmes de trésorerie ?

6.Comment renforcer notre cadre de lutte contre la corruption et le blanchiment d'argent ? Il s'agit là d'un élément crucial pour l'image du centre financier international de Maurice.

Résilience climatique

1.Comment renforcer notre résilience climatique face aux événements extrêmes ?

2.Comment éviter que les projets d'infrastructures de transport urbain n'accentuent notre vulnérabilité aux intempéries ?

3.Comment accélérer notre transition énergétique et réduire ainsi notre dépendance aux énergies fossiles qui déséquilibrent notre balance commerciale ?

S'il veut se démarquer, le Grand argentier doit venir de l'avant avec des mesures fortes, mais aussi des idées novatrices. Au-delà des mesures populaires et coûteuses pour renforcer l'État providence, le Budget devra avoir les allures d'une feuille de route. C'est grâce à des transformations structurelles que le pays pourra réussir une croissance résiliente et durable à long terme, et atteindre à nouveau le statut de pays à revenu élevé.

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