Togo: La 5ème République et après ?

24 Mai 2024
analyse

La loi portant réforme constitutionnelle a été promulguée par le Président de la République du Togo, Faure Gnassingbé, le 06 Mai, après une seconde lecture et le vote de l’Assemblée nationale du 19 Avril 2024, faisant ainsi entrer le Togo dans l’ère des régimes parlementaires.

Dans la foulée des élections législatives et régionales, le parlement vient d’être installé le lundi 21 mai 2024, avec une  majorité de 108 députés en faveur du pouvoir en place sur les 113 que compte l’Assemblée nationale, quasi monocolore à la « soviétique ».

Si au plan politique la victoire écrasante de la coalition autour d’UNIR, le parti présidentiel, est maintenant établie, ses conséquences politiques n’ont pas été analysées en profondeur.

L’installation de l’Assemblée nationale du Togo donne déjà des éléments d’analyse sur la configuration future du débat politique, à la lumière des déclarations des deux camps.

En effet, si du côté du camp au pouvoir on semble appeler à tourner la page des contentieux politiques préélectoraux pour travailler à titre exclusif pour le peuple, du côté de l’opposition, en revanche, les opinions semblent diverger. Du côté de Jean Pierre Fabre et son parti l’Alliance nationale pour le changement (ANC), il y a le clair obscur sur sa future participation à l’Assemblée dont ils contestent toujours la légitimité, considérant qu’on leur a « octroyé » un siège. L’expérience du boycott des législatives de 2018, et ses conséquences, doit les amener à exclure tout boycott de l’Assemblée, acte qui les priveraient de toute tribune pour s’exprimer sur les questions nationales, y compris les questions institutionnelles.

Telle n’est pas la position de Brigitte Kafui Adjamavo Johnson, pour qui le débat sur la constitution n’est pas et doit pas être clos avec la fin du processus de révision de la Constitution. Il se posera selon elle, dans l’enceinte de l’Assemblée fondamentalement. Ceci peut se comprendre dans une certaine mesure car, l’Assemblée doit être le lieu du débat politique national dans une démocratie qui se respecte. A défaut le débat se fera dans la rue, ce qui peut être une source d’instabilité. Une telle option n’est pas souhaitable.

Maintenant, tout dépendra de l’attitude de la majorité vis-à-vis de l’opposition, mais aussi des règles du jeu au sein du parlement, qui désormais sous l’empire de la nouvelle Constitution, sera le siège de la légitimité démocratique de l’exécutif togolais.

Mais la question qui ne manquera pas de se poser, est celle de savoir quel est l’intérêt d’une élection présidentielle au suffrage universelle indirect, dès lors que le détenteur réel du pouvoir exécutif sera désormais le président du Conseil des ministres ?

Quel est donc la marge d’action dont dispose l’opposition aujourd’hui au Togo avec la nouvelle Constitution, qui ne lui permet pas, au vu de ses résultats, d’avoir un groupe parlementaire ?

L’après 5ème république pour parler trivialement, sera un faisceau de questionnements à tout au moins trois niveaux.

D’abord, au niveau de la durée du mandat, le président qui sera élu après le terme de celui de Faure Gnassingbé, exercera, même si c’est à la « Medvedev/ Poutine » ses prérogatives quoique symboliques, pour une durée de 4 ans, soit deux de moins que sous le régime de la constitution antérieure.  Du coup les députés et sénateurs qui ont un mandat de 6 ans, disposent, par ce simple fait, d’un ascendant sur le Président de la République.

Ensuite, le nouveau texte constitutionnel aménage dans ses dispositions transitoires, d’un délai de 12 mois pour la mise en œuvre du dispositif institutionnel complet à savoir : l’élection du président du conseil des ministres, la mise en place du Sénat après la désignation de ses membres, pour former le Parlement bicaméral du Togo.

D’ici là, bien sûr l’actuel président Faure Essozimna Gnassingbé reste aux commandes, et continu de présider au destin de près de 8,6 millions de Togolais toutes tendances confondues, avec des soupçons qui pèsent sur lui de vouloir aller au bout de son mandat en 2025, avant d’engager les réformes nées du nouveau texte constitutionnel. Les prochains jours permettront sans doute d’y voir clair.

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