Plusieurs défenseurs des droits humains ont été arrêtés en RDC. Certains sont retenus dans des lieux tenus secret depuis plusieurs semaines.
Depuis le 17 mai dernier, jour de l'enlèvement de Gloria Sengha par des hommes cagoulés et vêtus d'uniformes de la police, Veronica Sengha est sans nouvelle de sa soeur.
"Jusqu'à présent, nous n'avons aucune nouvelle, nous ne connaissons pas l'évolution de son état de santé, nous ne connaissons pas le lieu exact où elle serait détenue. Nous sommes inquiètes, ma mère et moi, parce que nous ignorons l'endroit où elle se trouve présentement", confie-t-elle à la Deutsche Welle.
Dans un communiqué, Human Rights Watch dit avoir de "graves inquiétudes" concernant le sort de Gloria Sengha, une des fondatrices du mouvement Vigilance Citoyenne (Vici), enlevée en compagnie de deux autres militants de cette organisation, Robert Bunda et Chadrack Tshadio.
Carine Kaneza Nantulya, directrice adjointe de la division Afrique à Human Rights Watch, explique que les cas de ces activistes ne sont pas isolés. "A Human Rights Watch, nous sommes profondément inquiets pour la sécurité de Gloria Sengha, au regard de la multiplication des attaques et des arrestations arbitraires contre des activistes, depuis plusieurs mois, et nous pouvons citer plusieurs cas", explique-t-elle.
Lassitude au sein de la population
L'activiste et défenseur des droits de l'Homme, Emmanuel Mabunguta, fait remonter cette tension à six ou huit mois. Selon lui, la dégradation du climat social en RDC, avec la hausse de l'inflation et l'augmentation des inégalités, ont poussé plusieurs jeunes à travers le pays à organiser des manifestations pour interpeller les autorités.
"La dynamique des mouvements citoyens, en mars 2023, avait lancé la campagne To lembi passi qui veut dire, en français, Nous en avons marre de la souffrance. Plusieurs personnalités ont relayé ce message et plusieurs initiatives sont nées de cet appel. L'opposante Gloria Sengha a repris cette initiative récemment, quand elle appelait la population congolaise à prendre conscience de la précarité de la situation sociale. Il y a aussi le mouvement citoyen Biso peuple qui a manifesté le 20 mai dernier devant le Palais du peuple."
Pouvoir manifester sans être craindre pour sa vie
L'Association africaine de défense des droits de l'Homme demande au président congolais Félix Tshisekedi d'ouvrir l'espace civique et de permettre à tous ceux qui ont des préoccupations par rapport à la gestion du pays de pouvoir s'exprimer.
"Aujourd'hui, tous les jeunes qui organisent des manifestations, que ce soit ici à Kinshasa ou en province, même si ces manifestations ne sont pas violentes, sont arrêtés soit par l'Agence nationale de renseignement, soit par la police, et conduits au cachot. Ce qui est contraire à l'esprit même de la Constitution de notre pays. On ne peut plus parler d'un espace civique ouvert tant que ce comportement de la part des autorités, notamment de l'ANR, de la police, continue à mettre les jeunes dans des conditions où ils ne peuvent pas s'exprimer librement," déplore Me Katende.
Human Rights Watch souligne le fait que les autorités congolaises ont intensifié leur répression contre les membres de l'opposition, les activistes de la société civile, les détracteurs du gouvernement et les journalistes pendant toute la période électorale de 2023, et l'ont poursuivie depuis lors.