Les récupérateurs de la décharge à ciel ouvert de Mbeubeuss, dans le département de Keur-Massar, invitent les autorités à réfléchir à une meilleure politique de gestion des déchets à Dakar, à travers la mise en place d'usines de recyclage.
Par cette demande, ces récupérateurs espèrent une solution définitive permettant de mettre fin à leurs difficiles conditions de travail.
Dans ce dépotoir qui s'étend sur 114 hectares, l'équivalent de 200 terrains de football, c'est l'ambiance des grands jours pour ces travailleurs qui investissent chaque jour les lieux à la recherche de produits usagés recyclables.
Pas même la forte mauvaise odeur qui se dégage des détritus ne suffit à ébranler le courage et la volonté de ces hommes, femmes et enfants fréquentant quotidiennement les lieux.
Ici, c'est le grand rush et des bousculades à chaque arrivée de camion benne à ordures. Chacun voulant récupérer ce qui lui semble plus précieux. "Ne me filmez surtout pas", dissuade l'un d'eux en dissimulant son visage.
Selon le ministre de l'Urbanisme qui effectuait une visite sur les lieux, au moins 3 000 personnes travaillent de façon directe ou indirecte à la décharge de Mbeubeus.
Pourtant, ce dépotoir de déchets représente un grand danger pour la santé des nombreux récupérateurs qui s'y activent pour gagner leur vie. Conscients de cela, ils réclament à l'Etat de meilleures conditions de travail.
Ce réceptacle de tous les déchets de la capitale sénégalaise, niché au quartier Malika, dans la banlieue dakaroise, est source de grands risques sanitaires pour ceux qui le fréquentent.
"Si Dakar n'étouffe pas, c'est grâce à nous. Notre travail est important pour le bien-être des populations. Nous demandons aux autorités de nous assister à travers des usines de recyclage", confie Ndèye Ndiaye, une récupératrice.
"Dans ce pays, personne ne maîtrise mieux que nous ce secteur. L'État doit nous aider et nous associer dans l'élaboration des politiques de gestion des déchets. Nous pouvons beaucoup apporter dans la prise de décision", déclare, pour sa part, son collègue Daouda Sow.
A Mbeubeus, ce qui saute aux yeux, c'est la présence d'enfants sur le site, mais également d'animaux domestiques, des vaches notamment.
Les engagements du ministre Balla Moussa Fofana
"Nous arrivons ici très tôt le matin et repartons dans l'après-midi. Je ne vois aucun problème, même si certains se cachent pour fouiller les amas de détritus. Je ne sais pas pourquoi, mais l'essentiel c'est gagner sa vie, subvenir aux besoins de la famille en toute dignité", dit un autre récupérateur sous le sceau de l'anonymat.
"Nous sommes conscients des risques sanitaires, mais c'est notre gagne-pain", souligne-t-il.
Le 17 mai dernier, le ministre de l'Urbanisme, des Collectivités territoriales et de l'Aménagement des territoires, Balla Moussa Fofana, a effectué une visite sur les lieux.
En compagnie du directeur général du Projet de promotion de la gestion intégrée et de l'économie des déchets solides (PROMOGED), d'autorités locales et administratives de Malika et Keur-Massar, il a voulu voir de lui-même la décharge et écouter les doléances de ceux qui y travaillent.
La qualifiant de "bombe écologique", M. Fonana a déploré les difficiles conditions de travail des récupérateurs, tout en annonçant des mesures fortes.
"Les conditions dans lesquelles ces gens travaillent ici ne peuvent pas continuer, parce que c'est un danger pour leur santé. D'ailleurs, je me pose même des questions sur leur espérance de vie", a-t-il-dit.
Sortir les enfants de Mbeubeus
Le ministre a aussi souligné l'urgence de mettre en place sur la décharge des unités de traitement technique permettant de valoriser les déchets et de réduire leur impact sur l'environnement.
"Mbeubeuss est une bombe écologique. C'est une situation qui ne peut pas continuer. Aujourd'hui, la vision du président de la République et du Premier ministre, c'est de mettre en place des unités techniques ou mécaniques qui vont pouvoir traiter les déchets et les valoriser en toute sécurité, mais aussi réduire leur impact sur l'environnement", déclare-t-il.
"J'aimerai dire à ces récupérateurs qu'ils ne sont pas un problème, au contraire la récupération qu'ils sont en train de faire a un impact sur le volume de déchets sur la décharge. L'avenir pour eux est d'aller vers des métiers plus modernes, dans des unités industrielles de gestion et de transformation des déchets", a-t-il promis.
Balla Moussa Fofana a également affiché sa ferme volonté de mettre un terme à la présence des enfants sur la décharge de Mbeubeuss.
"C'est l'une des premières décisions qu'on prendra ici, on ne peut plus tolérer la présence d'enfants sur cette décharge. J'espère que ceux qui dirigent ce centre vont prendre bonne note. C'est assez clair, on ne peut plus tolérer les enfants à Mbeubeus", martèle le ministre.
"Il faudra faire en sorte que les enfants n'aient plus accès à la décharge de Mbeubeuss, qui n'est pas une place pour un enfant de cinq ou de dix ans, car il y a des enjeux de sécurité mais surtout des enjeux de santé publique", insiste-t-il.