Les éléments du Puzzle qui est en train de se mettre en place sont maintenant assez clairs. Le G5 Sahel qui était, il n’y a guère longtemps dans une profonde léthargie, suite au départ des pays de l’AES, semble recouvrer des couleurs avec les manœuvres militaires conjointes qui se tiennent actuellement au Nord Niger, impliquant les troupes des pays de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) plus le Tchad et le Togo.
C’est un signe avant-coureur de du cordon sécuritaire anti-djihadisme qui est en train de se mettre en place de manière concrète.
Sans nous aventurer dans des pronostics sur la finalité de cette initiative, on peut néanmoins dire qu’il ya les germes d’une ambition affirmée de bâtir un corridor sahel, à travers une mutualisation des moyens opérationnels.
Le « chainon manquant » aujourd’hui, est peut-être la Mauritanie membre du G5 sahel, dont le Président Mohamed El Ghazouani est par ailleurs président en exercice de l’Union Africaine. A ce titre sa présence à la récente cérémonie d’investiture du Président du Tchad, nouvellement élu, Mahamat Idriss Déby ITNO, à la tête d’une forte délégation, donne un signal assez fort de la dynamique en cours, qui à terme verra la constitution de territoires frontières entre l’Afrique du Nord et l’Afrique subsaharienne.
Il s’y ajoute que le Togo, voisin du Burkina Faso, lui-même frontalier du Niger se positionne en allié pivot, dans ce jeu des alliances en cours, étant entendu qu’il constitue un débouché intéressant sur la mer, au même moment ou le Niger et le Bénin sont en bisbille au sujet de l’acheminement du pétrole Nigérien via le Port de Cotonou, mais aussi sur le transport fluvial.
Que faut-il dès lors comprendre par ce rapprochement ?
Deux choses au moins. La première est que la Mauritanie, en tant que membre du G5 sahel, a été, il faut le signaler, le point d’accès à la mer pour le Mali, lorsque la CEDEAO a décidé de l’embargo contre ce pays enclavé comme le Niger et le Burkina.
La seconde, et pas des moindre, c’est que c’est une volonté afficher de prendre en charge les questions de sécurité sur la bande sahélienne de la Mauritanie au Tchad, et de renforcer l’interopérabilité et la coopération entre les forces des pays participants, face à l’inefficacité relevée, des différentes initiatives « Barkane » ou « Takuba » contre les djihadistes.
C’est donc une nouvelle carte qui se dessine avec ce cordon sécuritaire. Ceci ne laisse pas indifférents les pays membres de la CEDEAO, qui à un moment donné avaient envisagé une solution militaire (vite remise au placard) pour remettre le président Bazoum à son poste.
A cela s’ajoute l’extrême tension frontalière qui règne entre le Niger, qui assure le lead sur cette initiative (les manœuvres militaires se déroulent sur son territoire à Tilla non loin de la frontière avec le Mali), et le Bénin, concerné comme les autres par la menace Djihadiste, qui d’ailleurs sévit à l’intérieur de son territoire.
N’étant pas partie de la dynamique sécuritaire entre les 5 pays, et pris en tenaille entre le Togo, le Niger et le Burkina Faso, le Bénin paie au plan économique, un lourd tribut au conflit qui l’oppose au Niger, qui lui a fermé ses frontières.
Pour certains observateurs, il ya aussi un soubassement de « guerre des ports » entre Abidjan, Lomé, Cotonou, voire Dakar et Nouakchott, qui sont en concurrence, et ce n’est pas un secret, Lomé risque de rafler la mise, dès lors que les sanctions de la CEDEAO sont à ce jour maintenues du côté de la Côte d’ivoire, du Sénégal.
Le dessous des cartes n’a pas encore révélé tous ses secrets. Va-t-on vers une consolidation de l’AES autour du Niger, ou va -t-on vers une nouvelle réalité économique sous régionale ? Les prochains jours nous édifieront.