Madagascar Oil - « Nous comptons faire au pays ce que nous avons réussi ailleurs » dixit Al Njoo, PDG de Benchmark Group

interview

Al Njoo est PDG de Benchmark Group, l'actionnaire principal de Madagascar Oil, qui est confrontée ces derniers temps à des conflits judiciaires, bien que la restructuration financière de l'entreprise ait pu être achevée. Ce membre actif de l'organisation internationale Energy Council revient sur les récents sujets chauds. Entretien.

Madagascar Oil dit avoir achevé sa restructuration financière, de quoi s'agit-il exactement ?

Au début de l'année 2023, le créancier de la maison-mère de Madagascar Oil a déposé un recours auprès du tribunal des Bermudes aux fins d'une restructuration financière. La première étape de la restructuration financière a été achevée au niveau de la maison-mère de Madagascar Oil aux îles Bermudes. La Cour a publié un arrêt en faveur de Benchmark Group le 2 avril 2024.

D'ailleurs, nous croyons savoir qu'il n'y eut aucune autre offre. Nous nous réjouissons de sortir de cette phase de restructuration avec une santé financière plus forte et de pouvoir entreprendre au plus vite le développement de la réserve de Tsimiroro pour les bénéfices mutuels de notre société et de ceux de la population de Madagascar.

Est-il vrai que la société-mère de Madagascar Oil, enregistrée à Maurice, est en cours de liquidation ?

Ce qui a été repris dans la presse est incorrect. Après la décision de la Cour Suprême des Bermudes, le créancier qui a sollicité la restructuration financière aux Bermudes est allé déposer de nouveau la même requête à un tribunal de l'île Maurice et non pour une quelconque liquidation. Je rappelle que Madagascar Oil est une entreprise qui continue de fonctionner normalement, avec des revenus et un flux de trésorerie positif.

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L'ancien DG, Scott Reid, réfute son remplacement, et porte l'affaire devant la justice...

L'Assemblée générale des actionnaires est moralement et juridiquement dotée du plein pouvoir pour remercier ou nommer de nouveaux dirigeants. La loi est claire là-dessus, le vote unanime des actionnaires est définitif et ne peut être contesté. Le 8 avril 2024, par un vote unanime, les actionnaires ont nommé deux nouveaux administrateurs généraux, en la personne de Willy Ranjatoelina et de Charlie Thurston.

Tous deux ont une grande expérience du secteur extractif, Willy Ranjatoelina ayant travaillé un moment pour l'OMNIS et aussi dans le secteur privé tandis que Charlie Thurston est un ancien de la compagnie Chevron et a été dans l'équipe de gestion du projet Wafra, le plus grand projet d'exploitation de pétrole lourd au monde. Consécutivement à cela, le contrat de Scott Reid a été immédiatement résilié par l'agent de la Cour Suprême des Bermudes le 12 avril 2024. Cette décision de l'Assemblée Générale est dûment enregistrée auprès des autorités compétentes et mise en oeuvre selon les dispositions de la loi sur les sociétés.

Il y a aussi cette histoire de vol présumé des affaires de l'ancien DG...

Toutes les affaires personnelles de M. Scott Reid sont dûment laissées dans son bureau qui est fermé à clé. Il s'agit d'une accusation à la fois infondée et folklorique, dans le seul but de nuire à Madagascar Oil en créant une incertitude préjudiciable.

Vous avez porté plainte contre Scott Reid pour détournement, une réponse du berger à la bergère ?

Afin de respecter les secrets de l'instruction, je n'ai pas de commentaires à faire sur ce sujet ; tout en sachant que la plainte déposée auprès du Pôle Anti-Corruption (PAC) est accompagnée de preuves détaillées et les investigations sont en cours.

Le ministre des Mines a rappelé qu'avant la Covid, vous auriez dû déjà produire 10 000 barils/jour, Pourquoi n'y êtes-vous pas parvenu ?

En vérité, les cours ont chuté significativement aussitôt après l'approbation du plan de développement qui aurait dû nous emmener vers ces objectifs de production. Pendant la majeure partie de la période 2014-2019, le prix du pétrole se situait entre 30 et 50 dollars, mettant en difficulté de nombreux opérateurs et banquiers, rendant difficile toute levée de fonds.

Au moment du COVID, les cours étaient à 20 dollars, voire négatifs même. Il faut aussi souligner que nous avons présenté un plan conceptuel de développement pour une production de 10 000 barils par jour à l'OMNIS en 2014, et ce avant que l'ensemble des données et des tests ne soit disponible. Il ne s'agit donc pas du plan définitif intégrant toutes les données d'exploitation. Depuis, notre programme de travail annuel et notre budget ont été discutés et approuvés par l'OMNIS chaque année.

Benchmark Group est perçu souvent comme de simples spéculateurs...

Benchmark Group et ses investisseurs américains, sont des développeurs reconnus de pétrole lourd dans le monde entier et ayant déjà développé avec succès des projets d'envergure au Kazakhstan, en Azerbaïdjan et en Californie pour une valeur totale de plus de 4 milliards de dollars. Vous noterez que nous sommes engagés dans le projet de développement de Tsimiroro depuis plus de 12 ans maintenant.

Benchmark Group est un développeur de projets et nous escomptons faire aussi à Madagascar ce que nous avons réussi ailleurs dans un esprit de bénéfices mutuels, il n'y a point de place pour l'hésitation là-dessus. Dans cet esprit, nous avons établi dans le passé une coopération entre l'Université Trisakti en Indonésie et l'Ecole Polytechnique d'Antananarivo dans une vision de développement de la capacité technique locale et de transfert de savoir-faire aux futurs ingénieurs pétroliers Malagasy.

Sans oublier l'affaire Apollo 21...

Je crois que les tribunaux se sont définitivement prononcés sur ce sujet et ont rétabli clairement les faits. Il est évident qu'une société privée n'a pas à s'immiscer et ne peut s'immiscer dans les affaires politiques de Madagascar. Ce n'est nullement sa raison d'être et d'ailleurs je ne crois pas qu'un investisseur y trouverait son intérêt. Benchmark Group est en activité depuis 35 ans dans le monde, nous n'avons aucun passé sur une quelconque interférence dans la politique.

Le fait d'être cité malencontreusement dans cette affaire a causé beaucoup de torts à Madagascar Oil bien au-delà de ce que nous pensons. Malheureusement, elle a augmenté la perception des incertitudes sur l'exploitation de Tsimiroro bien que les tribunaux aient établi sans équivoque que Madagascar Oil n'y était vraiment pour rien.

Vous mentionnez, dans vos communications, les débuts de négociations avec les banques d'investissement, qu'en est-il réellement ?

En réalité, nous avons eu des discussions pendant de nombreuses années avec les principales banques londoniennes du secteur pétrolier. D'ailleurs, c'est la raison pour laquelle nous déplorons vivement ces tentatives récentes de déstabilisation de Madagascar Oil, elles créent inutilement des perceptions d'incertitude qui pourraient compliquer les négociations futures avec ces banques et ce, en sus du risque-pays.

Heureusement, les banques d'investissement demeurent ouvertes à la coopération, notamment sur la base de notre réputation.Nous espérons engager dès que possible ces négociations afin que la production d'huile lourde à Tsimiroro puisse reprendre dans un délai raisonnable et ce, dans l'intérêt mutuel de Madagascar Oil et de la population de Madagascar. Nous savons combien cette huile lourde de Tsimiroro est importante pour la prospérité de Madagascar et de sa politique énergétique.

Dernier point, la JIRAMA profiterait bien de l'huile lourde de Tsimiroro, pourquoi ne l'approvisionnez-vous pas ?

Nous avons essayé d'établir un contrat qui permettrait de vendre l'huile lourde de Tsimiroro à la JIRAMA à plusieurs occasions mais sans succès. Et cela, entre autres, à cause du délai de paiement trop élevé qu'elle demande. Notre offre était pourtant en deçà des coûts de l'huile lourde importée. Vous aurez noté que nous fournissons depuis longtemps au secteur privé suivant des termes commerciaux normaux.

Nous sommes ouverts à de nouvelles discussions avec la JIRAMA, nous espérons vraiment que nos préoccupations lors des précédentes négociations soient résolues. Encore une fois, nous savons pertinemment l'importance de la conclusion de cette discussion pour la politique énergétique de Madagascar.

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