Gabon: Relations France-Gabon - Pas de vagues au Palais du bord de mer

A partir d'aujourd'hui mardi 28 mai 2024, le président de la transition gabonaise, le général de brigade Brice Oligui Nguema, entame une visite de travail en France.

Pour son premier voyage officiel en Europe, le tombeur d'Ali Bongo Ondimba a choisi l'Hexagone pour un déplacement de cinq jours. Un séjour qui sera ponctué, entre autres, par une participation au forum économique « Invest in Gabon », coorganisé par le patronat français, un entretien avec son homologue français, Emmanuel Macron, et une sortie dans la Somme à l'occasion de la commémoration de la bataille d'Airaines de 1940, à laquelle ont pris part de nombreux Tirailleurs sénégalais.

Si depuis l'indépendance du pays, en août 1960, le voyage d'un président gabonais sur les bords de la Seine passait pour classique, voire anodin, celui du général Brice Oligui Nguema revêt un cachet particulier.

En effet, il intervient après le coup d'Etat du 30 août 2023 qui a mis fin au pouvoir d'Ali Bongo Ondimba et par la même occasion à plus de cinq décennies de règne de la dynastie Bongo. Un demi-siècle de patrimonialisation du pouvoir et de prédation des ressources de l'une des plus vieilles colonies françaises d'Afrique avec la bénédiction de l'ancienne métropole.

Depuis que cette lame de fond s'est abattue sur le Palais du bord de mer, tout naturellement l'on se demandait vers quels horizons les militaires comptent diriger le pays.

%

Allaient-ils s'inscrire dans la continuité ou fallait-il s'attendre plutôt à la rupture ?

La question se posait d'autant plus qu'en Afrique occidentale, sur fond de sentiment anti-français, des militaires ont accaparé le pouvoir au Burkina Faso, au Mali et au Niger, notamment au grand dam du Coq gaulois, accusé à tort ou à raison de ne pas faire assez dans la lutte contre le terrorisme, quand une partie de l'opinion ne l'accuse pas ouvertement de collusion avec les groupes djihadistes qui ensanglantent le Sahel.

Mais au fil du temps, ceux qui rêvaient d'une French Bashing à la sauce bantou ont dû déchanter, car force est de reconnaître qu'à l'opposé de ses frères d'armes du Sahel, le général Nguema a opté, sinon pour la continuité du moins des réglages par la méthode douce.

« Bien sûr qu'avec la France, il y a une histoire avec des hauts et des bas. Et s'il y a des ajustements à faire, nous les ferons, mais nous ne sommes pas dans une logique pseudo-révolutionnaire panafricaniste. Paris n'a aucune raison de s'inquiéter », a déclaré une source proche du pouvoir gabonais, selon RFI.

C'est donc dire que cette visite du numéro un du Comité pour la transition et la refondation des institutions (CRTI) s'annonce comme un renouvellement de voeux de fidélité aux relations qui ont toujours unis Paris et Libreville. Donc pas de vagues au Palais du bord de mer.

Il n'est pas superflu de penser que ce déplacement, préparé avec minutie entre les deux Etats, s'inscrit dans une sorte de logique de normalisation des rapports avec l'Hexagone.

En effet, sous le président déchu, Ali Bongo Ondimba, le Gabon avait fait le choix d'un rapprochement diplomatique avec les Britanniques et les Américains suite à son adhésion au Commonwealth alors que sur les plans commercial et économique, le tapis rouge était déroulé sous les pattes de l'Ogre chinois.

Mais depuis l'arrivée des militaires aux affaires, Libreville ne cesse de multiplier les gages d'assurance. En direction de l'Elysée.

Ainsi, par exemple, de l'audience, au lendemain du coup d'Etat, accordée par le nouvel homme fort à l'ambassadeur français et le patron de la DGSE.

Ainsi également de son entretien avec Emmanuel Macron en marge de de la COP 28, tenue en décembre dernier à Dubaï.

A cela s'ajoute le rétablissement par la junte des signaux de RFI et France 24, interrompus quatre jours avant le pronunciamiento.

Intervenant dans un contexte d'effritement de l'influence française en Afrique occidentale et centrale notamment, cette visite du chef de l'Etat gabonais vaut bien son pesant d'enjeux pour Paris, dont l'âge d'or diplomatique, économique, géopolitique et géostratégique est entré dans son âge critique.

AllAfrica publie environ 500 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.