Burkina Faso: Pression sur le couvert végétal - Des Foyers améliorés pour réduire la déforestation

L'utilisation des Foyers améliorés (FA), prônée en 1984 par le capitaine Thomas Sankara pour lutter contre la coupe abusive du bois, a connu un boom durant la Révolution. Malheureusement, de nos jours avec la crise sécuritaire, des populations à la recherche de leur pitance, s'acharnent sur les ressources forestières. A cela s'ajoute l'exploitation frauduleuse du bois. Face à cette situation alarmante qui appauvrit le couvert végétal, des associations s'affirment sur le terrain et ravivent la promotion des FA avec des techniques de construction "pointues", en vue de ralentir la déforestation.

Samedi 2 mars 2024, à Ralo, village situé à une vingtaine de kilomètres de Koudougou, la région du Centre-Ouest. Dans la cour de Boukaré Zongo, devant la maisonnette de la septuagénaire Mariam Zongo, est posé un foyer de type Trois pierres amélioré (3PA), renforcé en ciment, où sont fourrés des vieux sacs de riz. Dans la cuisine, une marmite remplie d'eau est posée sur un foyer Trois pierres traditionnelles (3PT), avec six bois à l'intérieur. Les yeux agressés par la fumée, la vieille confie que cela fait plus de 20 ans qu'elle possède ce foyer, mais elle l'utilise rarement, du fait qu'il soit en ciment et dénature selon elle, le goût de la nourriture.

Blandine Bayala, cette autre habitante du village, possède ce même type de foyer. Elle ne l'exploite que le jour où elle n'a pas d'argent pour recharger sa bouteille de gaz de 12 kilogrammes. Bâti à partir de la tradition des trois pierres, le Foyer amélioré (FA) est fabriqué avec des matériaux locaux (termitière morte, crottin d'âne et de la paille). Ce vendredi 8 mars 2024, une vingtaine de femmes de Yaoghin Bola, dans la commune rurale de Poa, province du Boulkiemdé, consacrent leur journée à la fabrication de FA.

Sous un grand karité, sont déposés pêle-mêle, des bidons d'eau, des marmites de toutes sortes de capacités. Des enfants assis sous le même arbre s'amusent. Leurs cris s'entremêlent avec ceux des femmes qui se taquinent, rigolent et se rivalisent à l'oeuvre. Au total, 44 foyers seront construits. L'animatrice de l'Association les mains unies du Sahel (AMUS), Mariam Ouédraogo, supervise et corrige les imperfections. Elle est à sa 3e diffusion de foyers dans ce village. « L'approche n'a pas été facile mais avec les sensibilisations, les hommes ont compris que les forêts s'assèchent. Dans certaines localités, ce sont les maris qui aident les épouses pour le ramassage du banco », raconte-t-elle.

Les hommes dans la danse

Adama Ouédraogo, chef de ménage, apprécie positive-ment le FA, qui à son avis, fait bien cuire les aliments que le foyer traditionnel. « Avec le FA, nos poussins ne meurent plus. Il y a moins de brûlures d'enfants. Le premier jour, quand ma femme a préparé le tô avec ce foyer, j'ai fini le plat sans sauce, parce qu'il avait un très bon goût. Les foyers 3PT doivent se conjuguer maintenant au passé », dit-il, tout taquin.

L'octogénaire Pauline Baki, du village de Poa, qui cuisine avec le foyer amélioré depuis plusieurs années, estime qu'il est facile, rapide, économique en bois et ne dégage pas de fumée. Elle relate qu'à l'époque, le bois était disponible et que de nos jours, il se fait rare et coûte plus cher. La présidente du quartier de Yaoghin, Salamata Kaboré, qui avait vu la construction des foyers comme une perte de temps, loue dorénavant ses avantages et mobilise les femmes pour leur confection. L'animatrice Mme Ouédraogo dispose d'une boite à images. Après la construction des foyers, les femmes sont suivies sur les bonnes manières de leur utilisation. Elle dit former au moins 300 femmes mensuellement dans ses zones d'intervention.

Le directeur de recherche en énergétique physique à l'Institut de recherche en sciences appliquées et technologiques (IRSAT), Dr Oumar Sanogo, atteste que des programmes pour la maitrise de la consommation du bois (dont les FA) dans les différents pays du CILSS ont été mis au point avec les structures de recherches telles que l'Institut burkinabé de l'énergie (IBE) à l'époque et le ministère en charge de l'environnement. A l'IRSAT, il existe un musée de tout type de foyers : des foyers à bois, à gaz, de balles de riz et de tourteaux de karité.

A en croire Dr Sanogo, l'institut était la structure technique en arrière garde pour les tests de ces foyers et au temps de la Révolution, il y a eu un grand boom de FA en banco comme en métallique. Un FA métallique « Roumdé », en mooré, qui signifie « la préférée », était offert à chaque couple nouvellement marié à la sortie de mairie. Rachelle Ouédraogo, agent des Eaux et forêts à la retraite, résidant à Dédougou dans la région de la Boucle du Mouhoun, a soutenu cette initiative. Celle qui forme régulièrement des femmes à la construction des FA, moyennant une rémunération, souhaite que ces dernières abandonnent les foyers traditionnels au profit des FA.

En 2006, le projet FAFASO, sous l'égide de la coopération allemande GIZ, qui était l'initiatrice des premiers foyers au plan national, selon Dr Sanogo, avait réussi à mettre le label « Roumdé », qui caractérisait le foyer de bonne qualité.

Près de 200 000 foyers vulgarisés

C'est compte tenue de cette qualité, de l'avis du Directeur général (DG) de l'économie verte et du changement climatique, Saïdou Mahoumoudou Soro, que FAFASO, a pu vulgariser près de 200 000 Foyers améliorés durant sa mise en oeuvre. La promotion de ces foyers a contribué à créer des emplois pour des artisans. Sont de ceux-là, Idrissa Guigma, ferblantier à Ouagadougou. Formé depuis 1987, il fabrique des foyers à gaz, à charbon et à bois. Les prix varient en fonction de la matière première utilisée et du type de foyer souhaité.

Il souligne que les prix des tôles ont « grimpé » de 14 000 à 18 500 F CFA, alors que dans les années 88, ils étaient de 2000 F et les foyers pouvaient se vendre à 2 500 F CFA. Aujourd'hui, il faut débourser 5000 F CFA, voire plus. « Nos foyers sont de bonne qualité et peuvent durer pendant 4 ans, c'est la grille seulement qui a besoin d'être renouvelée », détaille-t-il. Oumarou Dao, également ferblantier et qui reçoit beaucoup de commandes, dit reconnaitre l'importance de ces foyers pour les ménages, en termes d'économie de bois et de protection de l'environ-nement. Ces deux « experts » en FA, ont transmis leurs connaissances à plusieurs artisans, dans presque toutes les régions du Burkina Faso.

« Si le gouvernement burkinabè relance les FA, en nous soutenant avec l'acquisition des matières premières, nos forêts vont « respirer" mieux et nous allons profiter de notre métier », renchérissent-ils.

La GIZ avait ouvert en 2018, cinq unités de production de FA à Fada N'Gourma, Kaya, Dédougou et deux unités à Bobo-Dioulasso, équipées en matériels. A ce jour, seules les deux unités de Bobo-Dioulasso sont fonction-nelles. Celle de Kaya n'est opérationnelle que sur grande commande. Le centre de Dédougou dans la Boucle du Mouhoun, logé au sein de la direction régionale en charge de l'environnement est hermétiquement fermé. Il y a de cela 3 ans, que les coups de marteaux ne se font plus entendre. Le jeudi 21 mars 2024, les anciens occupants des lieux expliquaient que depuis l'ouverture de l'unité, ils n'ont reçu que de petites commandes.

Le hic est qu'avec la situation sécuritaire, la direction régionale a été clôturée et il n'y avait plus de visibilité de leurs chefs-d'oeuvre. Ce sont ces raisons qui les ont poussés à rejoindre la ville, où chacun travaille dans son propre atelier. « Depuis la construction du mur, nous avons compris que nous allons perdre nos clients. Ces derniers se sont aussi plaints, qu'ils ne peuvent pas à tout moment présenter leurs cartes d'identités à l'entrée de la direction, avant d'avoir accès à nos produits », se remémore le responsable du centre, Seydou Djibo. Les artisans se disent prêts à revenir, à condition qu'ils trouvent des partenaires et que le ministère accepte ouvrir une porte d'entrée pour les clients.

Tiipaalga révolutionne les FA

Le directeur régional en charge de l'environnement de la Boucle du Mouhoun, Aly Coulibaly, dit plaider auprès de toutes les ONG qui interviennent dans le domaine bois-énergie, afin qu'elles se réfèrent à ses artisans pétris de compé-tences, en cas de commande de FA.

Le projet de diffusion des Foyers trois pierres améliorées, dénommé

« F3PA/Beoog-Neeré », est un projet avec quatre Voluntary project activity (VPA). Ce sont des micro-projets au sein du F3PA qui englobent environ 3 000 ménages.

Le chargé de programmes-centre / Tiipaalga, Serge Zoubga explique que lorsque les Foyers améliorés construits atteignent 3 000 ménages, ils forment un VPA et ensuite le projet passe à un autre VPA. « En termes d'objectifs, nous visons environ 12 000 ménages et il est exigé que chaque femme ait au moins deux foyers.

Le projet a déjà démarré avec un enregistrement de plus de 1 600 ménages », justifie-t-il. Et d'ajouter que Tiipaalga envisage pour 2024, toucher deux VPA, 61 VPA en 2026 avec 190 600 ménages dans au moins 1 106 villages.

Avec des partenaires, l'association a diffusé de nombreux foyers dans certaines régions du Burkina Faso. « En termes de femmes formées, d'utilisatrices et de diffusion de FA dans la durée de façon constante, nous pouvons dire aujourd'hui que nous avons dépassé le nombre de foyers qui étaient diffusés sous la Révolution », s'enthousiasme M. Zoubga. A l'entendre, l'association a opté pour les FA en banco avec des matériaux locaux accessibles. « Que ce soit les foyers en ciment ou métalliques, la femme est obligée de faire appel à une expertise extérieure. Mais avec le banco, ce sont ses compétences et son temps qu'elle met à disposition. Si le foyer est bien construit et entretenu, il peut durer 5 ans », se convainc-t-il.

Le FA trois pierres en banco puise ses racines dans le foyer 3PT. L'accent est mis sur la sensibilisation pour qu'il soit accepté, car il respecte la valeur culturelle des trois pierres, symbole de la stabilité et de l'équilibre dans le foyer. Dr Sanogo de l'IRSAT souligne que des études ont révélé que dans certains ménages, les Foyers améliorés ne sont pas acceptés parce que des chefs de famille les considèrent comme une perte de leur pouvoir en cas de mésentente avec leurs épouses. Pour l'octogénaire Pauline Baki de Poa, en pays « moaga », lorsque le mari déterre les trois pierres, la femme ne peut plus rester. Il faut l'intervention d'un neveu, avant qu'elle ne réintègre le foyer conjugal, mais avec le foyer amélioré, le pouvoir de l'époux est réduit.

Réduire les émissions de GES

Le directeur général en charge de l'économie verte, fait savoir qu'un secrétariat permanent a été créé en 2023 par le ministère, pour prendre en charge la question de réduction des émissions de Gaz à effet de serre (GES) due à la déforestation et à la dégradation des forêts (REDD+). Il souligne que pour le moment, il n'y a aucune idée véritable de ce qui est émis comme GES et de ce qui est séquestré comme carbone, à travers les forêts et les plantations.

« Nous voulons voir, comment à travers nos activités quotidiennes, nous réduisons les émissions. Il y a une prise en charge des technologies sobres en carbone par l'Etat. La promotion de ces technologies est mentionnée dans cette stratégie bas-carbone », détaille-t-il. Le représentant-Pays de Solidagro pour le Burkina Faso et le Mali, Alain Touta Traoré, indique que cette ONG belge, accompagne les communautés dans la réduction de la consom-mation de bois de 40 à 50%, à travers le système-carbone. Il révèle que le projet recherche des entreprises qui polluent beaucoup et prêtes à financer des projets permettant de séquestrer le carbone ou d'éviter les émissions.

L'association Tiipaalga, qui évolue dans la diffusion des Foyers améliorés depuis 2008, a obtenu en 2014, un financement pour un projet dénommé "projet carbone". Ce projet selon Serge Zoubga, se base sur la réduction de la consommation de bois traduit en crédit carbone et vendu sur le marché volontaire, en permettant aux industriels en Europe, qui veulent réduire leur emprunt carbone, d'acheter les crédits.

« Cela devient une source de finance-ment pour nous, de pouvoir implémenter les projets Foyers améliorés dans de longs termes, pouvant aller de 10 à 12 ans », clarifie-t-il. Ces projets carbones, démarrés en 2014-2015, à l'en croire, ont un système de suivi-évaluation très rigoureux. Il note que dans chaque zone d'intervention, il y a une liste de tous les ménages.

« Nous nous assurons que ces ménages ont des FA et le nombre de fois qu'ils les utilisent.

Ces informations nous permettent de faire l'évaluation parce que, lorsque les ménages brûlent le bois, c'est du CO2 qui est émis dans l'atmosphère. S'il n'est pas brûlé, c'est du CO2 qui est évité », clarifie le chargé de Programmes-Centre. Pour ces projets carbones qui couvrent les régions du Centre-Sud, Centre-Nord, Nord et le Plateau central, il martèle que c'est une obligation, que les objectifs fixés soient atteints, car, en cas d'échec, il n'y a pas de validation.

Il précise d'ailleurs que les objectifs soient toujours atteints, car dans leur approche de diffusion de FA, des campagnes de sensibilisa-tion sont menées au préalable. Un travail d'amélioration de l'efficacité des foyers a été également fait, à travers un test d'efficacité énergétique, les normes sont respectées et les monitrices sont suivies. Dans le cadre des projets carbones, Tiipaalga dit avoir un partenariat avec Solidagro, qui a permis d'implémenter un autre projet dans les provinces du Passoré et du Boulkiemdé. Il argumente que pour qu'un foyer soit efficace, il faut qu'il soit « vert » et non fissuré. S'il commence à se fissurer, il passe du vert à l'orange et il doit être réparé rapidement. « S'il est totalement cassé, il doit être reconstruit.

Au cas contraire, ce ménage est déclassé et ne fait plus parti de la base de données », avertit-il. Il félicite les femmes de la province du Nahouri, qui se sont appropriées les technologies et les ont intégrées dans leur culture avec une multitude de décorations.

Saïdou Mahoumoudou Soro de l'économie verte, soutient que les foyers utilisés par les dolotières, surtout qu'ils sont en banco, sont une bonne technologie.

Ils sont adaptés d'une part, pour réduire la consommation du bois et d'autre part, d'emmagasiner suffisam-ment de chaleur pour la cuisson.

Le directeur de recherche en énergétique physique, Dr Oumar Sanogo, de renchérir que si les dolotières, ont adopté les FA, c'est parce qu'au-delà de l'efficacité recherchée qui est de réduire la consommation du bois, il y a la réduction de certaines maladies respiratoires. La dolotière Rosalie Kondé du secteur 5 de Dédougou, apprécie son FA en banco de quatre marmites de n°25.

Elle utilise deux tricycles de bois pour cinq préparations en raison de 15 000 F CFA le tricycle. La présidente régionale des dolotières, Bibiane Ouaro qui était dans les foyers traditionnels depuis 1994, les a abandonnés, au profit des Foyers améliorés « Roumdé ». « Nous avons fait la promotion de ces foyers, sensibilisé les dolotières et entre 2014 et 2016, chacune d'elle avait son foyer », s'enthousiasme-t-elle. Dr Sanogo avoue que l'armée était une des plus grandes consommatrices de bois et l'IRSAT avait développé des foyers à gaz qui étaient utilisés dans toutes les cantines militaires au Burkina Faso. Ces types de foyers ont été également développés pour les dolotières, même si des fois, le consommateur à son avis, estime qu'il y a une différence de goût du dolo préparé avec le bois de chauffe et celui du gaz. Au cabaret de Mme Ouaro, une plaque du projet SNV collée à un mur, retient notre attention.

A l'intérieur, sont fixées quatre marmites de n°60, qui fonctionnent avec du gaz. L'idée du projet dénommé « Tuuma » en mooré (travail), aux dires de la présidente, était que les femmes s'associent en groupe pour la préparation de la bière locale et se la partagent pour la vente. Malheureusement, ce foyer test qui utilise huit bouteilles de 12 kilogrammes est abandonné depuis 5 ans.

« Le foyer est très bénéfique, mais, une seule personne ne peut pas l'utiliser au regard du coût de la bouteille de gaz qui est de 6 000 F CFA et parfois plus élevé en cas de rupture. Nous souhaitons avoir des partenaires qui vont nous proposer des foyers métalliques plus adaptés », plaide-t-elle. En plus des Foyers améliorés métalliques, le directeur général en charge de l'économie verte, M. Soro, note qu'il y a eu le foyer métallique d'origine kenyane importé, dont une partie en céramique permet de réduire les pertes de chaleur.

Polycéramique (Poceram) briqueterie, cette entreprise a mis sur le marché en 2012, le foyer Tilgré, d'une durée minimale de deux ans pour les ménages. Composé de de tôle et de céramique réfractaire, il réduit la consommation de bois et de charbon de bois, selon la gérante de Poceram, Bintou Traoré, à au moins 50%.

La structure dispose aussi des foyers institutionnels, construits sur place pour des associations, brasseries et coopératives « Le prix d'un foyer Tilgré multimarmites est de

8 500 F CFA. Nous voulons vulgariser ce foyer et passer à un stade industriel pour réduire le coût afin de permettre aux populations d'acquérir un foyer de haut rendement », envisage-t-elle. Mme Traoré affirme qu'un foyer spécifiquement en bois ou mixte, verra bientôt le jour. En 2023, Poceram a sillonné 55 villes et villages du Burkina, pour la promotion de ses produits. Tilgré est exporté au Sénégal, en Côte d'Ivoire et au Niger.

L'entreprise compte relever le défi avec la diffusion de 300 000 foyers, car elle n'est qu'à 50 000 pour le moment. Les Foyers améliorés, qu'ils soient en banco ou en métallique, réduisent considérable-ment la consommation du bois. Selon la direction des forêts et de la reforestation, la consom-mation par type d'énergie en 2016 par tonnes était de 735 984 pour le bois, 411 564 pour le charbon et 98 342 pour le gaz.

Des actions de préservation

Le directeur général en charge de l'économie verte, M. Soro, chagrine que les ressources forestières se portaient déjà mal avant la crise sécuritaire et la situation s'est aggravée avec l'installation des groupes terroristes dans les aires classées.

A l'entendre, depuis 2005, le ministère en charge de l'environnement, à travers un arrêté, avait interdit l'exploitation du bois d'oeuvre, mais malgré les contrôles, le phénomène persiste. « Que cette situation ne perdure pas parce que la diversité de ces ressources a toujours fait la fierté de notre pays, qu'elles soient forestières ou fauniques », soutient-t-il.

Il estime que si au temps de la Révolution, le FA a été adopté, c'est parce qu'il y avait un lien étroit entre son utilisation et la préservation de l'arbre. Pour lui, si des dispositions sont prises pour subventionner aussi les FA comme le gaz, pour les ménages en milieu rural, cela impacterait positivement sur la préservation de l'environ-nement et les ressources forestières. « C'est surtout en milieu rural qu'il faut véritablement mettre l'accent sur la sensibilisation et la communication », conseille-t-il.

Le ministère est engagé dans la lutte contre la déforestation parce que le Foyer amélioré, de l'avis du directeur général, fait partie des technologies sobres en carbone. Ce sont des engagements que l'Etat burkinabè a pris au niveau mondial pour réduire ses émissions de GES. Il confie qu'en 2022, le ministère, à travers le programme Appui à la gestion durable des ressources forestières (AGREF), a acquis 1400 foyers Roumdé multimarmites au profit des Personnes déplacées internes (PDI). Une bonne quantité a été déjà envoyée au centre de formation des Volontaires pour la défense de la patrie (VDP).

Une remise sera également faite pour les PDI du Centre-Nord et du Plateau central. L'inspecteur des Eaux et forêts, Aly Coulibaly, par ailleurs directeur régional en charge de l'environ-nement de la Boucle du Mouhoun, est sans voix, quant à la coupe abusive du bois dans la région.

« Avec la crise sécuritaire, les zones d'exploitation sont devenues réduites et la pression est forte sur les ressources naturelles », déplore-t-il. Pour lui, les espaces qui jadis pourvoyaient en bois de chauffe, ne sont plus maitrisés et les exploitants ne peuvent plus aller au-delà d'une certaine limite pour la coupe du bois.

« Du coup, le bois vert est devenu la source première d'approvisionnement. C'est le constat amer qui est fait sur le terrain », s'attriste M. Coulibaly.

Opter pour des foyers de cuisson propre

Si de nos jours, on constate un ralentissement dans l'utilisation des FA, Dr Sanogo de l'IRSAT, pense que c'est parce qu'il n'y a pas eu d'initiatives secondaires pour accompagner les acteurs, lorsque le projet FAFASO est « mort ». Le directeur général en charge de l'économie verte, M. Soro a fait savoir qu'en dehors de AGREF, le ministère n'a pas eu un autre programme de FA. Quant au représentant-Pays de Solidagro, Alain Touta Traoré, il révèle que des études ont montré qu'au temps de la Révolution, l'utilisation des FA était une imposition. « Vu sous cet angle, il n'y a pas eu de sensibilisation. Il n'y avait pas de suivi, ni d'accompagnement.

C'est la raison pour laquelle beaucoup de projets échouent », avance-t-il. Dr Oumar Sanogo de l'IRSAT, confie que depuis 2010, on parle de foyers de cuisson propre, à l'initiative de l'ancienne secrétaire d'Etat des Nations unies, Hillary Clinton. « Le Foyer de cuisson propre, est un foyer amélioré qui n'émet pas beaucoup de particules et de monoxyde de carbone pour la santé. C'est un foyer qui a un caractère supplémentaire, qui préserve la santé et l'environnement », explique-t-il. Il souligne qu'il a été mis en place une alliance mondiale pour les foyers de cuisson propre à laquelle l'IRSAT et d'autres acteurs ont adhéré.

Pour lui, l'Etat doit se réapproprier sa mission régalienne et créer un cadre pour toutes les actions, notamment dans la promotion des foyers de cuisson propre. Il affirme que dans le monde, environ un milliard de personnes dépend de la cuisson due au bois. Sept millions de personnes meurent par an à cause de l'utilisation des technologies non propres de cuisson parce qu'elles génèrent des éléments nocifs pour la santé des utilisateurs. « Si nous ramenons ce chiffre en Afrique, c'est un million de personnes par an qui meurent. L'OMS fait remarquer qu'il y a quatre millions parmi eux, qui utilisent des foyers de cuisson non propre », regrette-t-il.

Dr Sanogo, poursuit que les Etats-Unis ont fait l'évaluation du coût des maladies liées à cette situation et c'est plusieurs milliards de dollars par an qui sont dépensés. « De nos jours, au niveau sous régional et international, beaucoup de pays, surtout anglophones, se sont engagés dans des stratégies de cuisson propre. C'est le cas au Ghana et au Kenya. Dans les pays francophones et au Burkina Faso particulièrement, il n'y a pas de stratégies de promotion de cette cuisson propre, c'est à ce niveau que toute la difficulté se pose », remarque-t-il. Depuis 2018, au niveau mondial, une norme ISO pour les foyers de cuisson propre a été adoptée. Elle permet de tester les foyers de façon standardisée et l'IRSAT le fait, en suivant cette norme.

« Les foyers sont catégorisés de 1 à 5, suivant la norme ISO et au regard du niveau de développement de chaque pays, aucun foyer ne peut être diffusé, s'il n'est pas de catégorie 2 ou 3, suivant le niveau », conseille Dr Sanogo. A son avis, l'institut a développé certains foyers qui ont de bons rendements, qui malheureusement, ont du mal à prendre le marché, au regard des aspects culturels et culinaires du pays des Hommes intègres.

« Le Burkina doit mettre en place, des stratégies de cuisson propre. Tant que l'Etat ne va pas créer l'environnement habilitant, nous n'irons pas loin.

Ce sera des actions ponctuelles sur la base de projets et lorsque ces projets prendront fin, nous reviendrons à la case départ », insiste-t-il.

La crise sécuritaire que traverse le pays est une des raisons qui doit amener le pays, selon lui, à diffuser les Foyers améliorés afin d'éviter que les populations ne s'acharnent sur les ressources forestières.

Aussi, des équipements mis à la disposition pour les personnes déplacées par certains organismes doivent être une opportunité pour l'Etat de faire une diffusion à grande échelle afin qu'elles puissent utiliser des ressources locales en les préservant.

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