Ouganda: Loi anti-homosexualité au pays - Un climat de peur permanente au sein de la communauté LGBT+

Il y a un an, fin mai 2023, la présidence ougandaise annonçait la promulgation de la loi anti-homosexualité. Considérée comme l'une des plus répressives au monde, elle prévoit la peine de mort pour des cas qualifiés « d'homosexualité aggravée ». Depuis, les organisations de défense des droits humains dénoncent de nombreuses violations et un climat de peur.

Le lieu de rendez-vous est donné au dernier moment. Pour rencontrer Frank, il faut rester discret. Ce militant pour la cause LGBT+ défend les droits de sa communauté depuis plus de 15 ans, ce qui n'est pas sans danger en Ouganda, surtout depuis l'adoption il y a un an de la loi anti-homosexualité dans le pays. Avec cette loi, toute personne considérée comme faisant la promotion de l'homosexualité encourt jusqu'à 20 ans de prison.

Pour sa sécurité, Frank se déplace donc avec un tracker, prêt à envoyer sa localisation à tout moment. « J'ai prévenu cinq de mes amis où je suis. Pour moi, ces trois dernières années sont les pires qu'ait connues la communauté LGBT+. Nous risquons d'être tués, battus, par n'importe qui. Ça, c'est le plus dangereux à mes yeux. Je parle ici de nos voisins, de nos propriétaires, des membres de notre famille... Moi, il y a des lieux publics où je ne vais plus. J'ai déjà été attaqué physiquement à plusieurs reprises. J'ai reçu des menaces de mort, avec une hausse en 2022 et depuis rien de s'arrange. J'ai failli quitter le pays », confie-t-il.

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Beaucoup vivent cachés

Si Frank a décidé de rester pour se battre, beaucoup ont déjà fui. Plusieurs personnes LGBT+ rencontrées disent vivre cachées depuis un an, dans la peur d'être identifiées.

Les militants dénoncent une loi discriminante. Les autorités ougandaises avancent que cette dernière vise à empêcher l'homosexualité, considérée comme une importation de l'Occident. Cette loi anti-homosexualité a reçu un large soutien à travers le pays. Au Parlement, elle a été votée à l'unanimité, moins une voix en mai 2023.

Dès son vote, elle a été dénoncée par la communauté internationale qui a annoncé plusieurs sanctions. Les États-Unis ont notamment déclaré en décembre qu'ils refuseront d'accorder des visas aux responsables ougandais qui appliqueront cette loi.

Pic de violence dès la promulgation de la loi

L'HRAPF, une ONG de défense des droits humains en Ouganda, indique que si en 2022, près de 200 cas étaient recensés, sur l'année dernière les agressions contre les LGBT+ dans le pays ont plus que doublé, atteignant 559 cas de violations. Évictions, violences et arrestations sont le lot de la communauté.

Si la majorité des cas n'arrivent pas au tribunal, faute de preuves, les militants LGBT+ dénoncent un climat de surveillance, encouragé par une vaste campagne de désinformation en ligne et dans les discours politiques et religieux. C'est ce qu'explique Edward Mwebaza, directeur adjoint de l'HRAPF.

« Dans les médias, il y a eu plein de débats autour de l'homosexualité depuis 2021. Il y avait par exemple des rumeurs infondées sur de potentiels recrutements d'enfants dans l'homosexualité. Le Parlement s'est donc emparé rapidement de la question. Et tout le processus qui a mené au vote de cette loi anti-homosexualité a encouragé le grand public, les personnes dans la rue, des villages, de nos foyers, à stigmatiser la communauté LGBT+ », rapporte le directeur.

« Pour moi, tout cela est le résultat direct de cette campagne médiatique. Et la conséquence, c'est que, dès que la loi a été promulguée, nous avons constaté un pic de violence. Les personnes LGBT+ ont été évincées de leurs logements. Nous recevions 30 cas par mois à travers le pays. Nous avons commencé à recevoir des plaintes de personnes LGBT+ qui avaient été harcelées dans la rue par les chauffeurs de motos-taxis par exemple, ou même par leurs propres familles. Nous avons aussi enregistré un nombre important d'agressions et d'arrestations par la police », déplore Edward Mwebaza.

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