Il faut aller dans des quartiers un peu reculés pour trouver un endroit où l'on vend les boissons traditionnelles. Ou encore dans des grands et petits marchés de la place, et à quelques rares endroits dans la ville pour s'en offrir un verre.
Le plus souvent se sont des personnes de quarante ans et plus qui restent fidèles à cette culture. « Les plus jeunes sont plutôt intéressés par les promotions de bières modernes, qui, aujourd'hui offre jusqu'à 3 bouteilles à 1000 FCFA », a dit Mme Anne vendeuse du vin de palme, avant d'ajouter que ceux qui sont dans la vingtaine et la trentaine ne s'intéressent pas vraiment aux boissons traditionnelles. Cette version semble se confirmer.
La baisse des prix des boissons modernes, l'omniprésence des petits whiskys importés et vendus à des prix très bas, dont la consommation reste l'apanage des jeunes, accentuent la situation. Avec le modernisme qui booste vers les habitudes qui sortent du cadre traditionnel, et les conservateurs de ce dernier, le contexte générationnel prend son sens. « Je n'ai jamais été accoutumé à ce genre de boissons. Je ne m'y connais pas trop, donc je ne suis pas attiré », a déclaré Franck, à 32 ans il n'a jamais été en contact d'une boisson traditionnelle quelconque, mais il affirme consommer au moins deux bouteilles de bières modernes par jour.
D'aucuns parlent de l'identité culturelle
Tout comme la langue, la boisson est un élément très essentiel dans la préservation de l'identité culturelle. Ne pas avoir de connaissance dans ce domaine serait un peu synonyme d'ignorance identitaire. En tout cas, c'est ce que pense M. Nkouka, 47 ans, consommateur de vin de maïs, lorsqu'il a dit : « On ne peut pas croire qu'un homme puisse ignorer sa langue ainsi que les boissons de son coin. Sinon ce serait ignoré ce que l'on est ».
Un autre pense que les jeunes ne sont pas assez briefés sur cette question en s'exclamant : « Bon, c'est une affaire compliquée pour les jeunes, car on ne leur enseigne pas nos traditions. Puisque les producteurs de boissons modernes utilisent les médias pour la promotion. C'est normal que les jeunes soient penchés vers là-bas ! ».
Pour d'autres encore, soit c'est le modernisme soit c'est le sous-développement. Il faut faire le choix. C'est le point de vue d'un jeune-homme abordé dans la rue tenant une bouteille de whisky en main. Selon lui, plus besoin d'évoquer l'identité culturelle, qu'il qualifie de quelque chose encore liée au sous-développement. « Je pense que si on veut avancer et se détacher du sous-développement, il faut épouser le modernisme et se détacher des vieilles choses », a-t-il dit. « C'est ça l'erreur de notre jeunesse actuelle », a répliqué Mme Céline, une vendeuse ambulante qui se tenait juste à quelques mètres. Mais il existe tout de même une minorité des jeunes qui s'y connaissent. Comme Grâce, 22 ans, il affirme consommer un demi-litre de boissons traditionnelle chaque jour. Le problème c'est que « je suis victime des critiques de mes amis. Mais je fais avec, car j'aime ça ».
À l'ère du village planétaire ou le mariage culturel bat son plein, il est difficile de concilier ces deux points de vue, lorsque l'on sait que c'est par sa culture qu'un peuple s'identifie et que le mariage culturel est un élément très stratégique du développement. Néanmoins, un mélange culturel équilibré serait un atout pour les deux générations. Notons que, l'apprentissage élargi de sa culture est un atout considérable pour toute réussite et pour tout développement. C'est en sachant ce que l'on est que l'on peut devenir meilleur.