Madagascar: La vieille amitié germano-malagasy

(Suite)

Les ambassadeurs malgaches sont reçus par l'ambassadeur allemand à Londres, le 9 février 1883, lequel rend compte que ses hôtes «ont complètement évité de parler de leur querelle avec le Gouvernement français ou même de mentionner la France».

L'ambassadeur d'Allemagne rapporte également avoir été informé par le Ministère anglais des Affaires étrangères de la préparation d'une révision de la convention commerciale, entre l'Angleterre et Madagascar, en vigueur depuis 1865 : dans celle-ci, fidèle à des principes immémoriaux, la partie malgache refusait qu'un étranger puisse acquérir du terrain foncier à Madagascar.

Et le comte Münster, ambassadeur d'Allemagne à Londres, de commenter : «si le dernier principe doit être sauvegardé à Madagascar, on veut abolir ces inconvénients au moins par la permission de bail à longs termes (analogues aux leases anglaises)».

Sollicité pour une médiation par les Malgaches, le Gouvernement britannique n'a pas répondu favorablement après le refus du Gouvernement français de leurs bons offices. Suggéré à son tour par les Britanniques, le Gouvernement allemand a prévenu que, si les ambassadeurs malgaches soulevaient la question politique, l'Empire allemand n'avait aucun intérêt dans les différends entre la France et Madagascar et que la voie d'une entente directe était plus convenable.

%

Toutefois, dans ses instructions définissant l'attitude allemande, le Secrétaire d'État aux Affaires étrangères a été clair : «nous nous efforcerons d'éviter de prendre une position dans cette question, mais si cela n'était pas possible, nous préfèrerions nous prononcer en faveur de la France.

Les intérêts allemands qui entrent directement en considération (NDLR : huit Allemands résidant à Madagascar d'après un rapport de mars 1883) sont loin d'une importance qui justifierait une déviation de notre politique généralement favorable à l'égard de la France».

Nous sommes alors, treize ans après la fin de la guerre franco-prussienne et trente ans avant la guerre de 14.

À Berlin, l'ambassade malgache est reçue par le Secrétaire d'État aux Affaires étrangères, le 28 avril. Renonçant à soulever la question politique, Ravoninahitriniarivo et Ramaniraka, assistés de W. Tacchi («sujet britannique chargé des questions d'étiquette auprès de l'ambassade malgache»), s'appliquent à obtenir la conclusion d'un traité de commerce.

Mais, le ministre allemand prétend que les négociations en réclameraient trop de temps. En vérité, et comme il l'écrira à l'Empereur : «pour une utilisation occasionnelle de Votre Altesse, nous sommes en principe suffisamment prêts à conclure un traité détaillé sur le commerce, la navigation et les questions consulaires parce qu'un projet est prêt depuis quelques temps (NDLR : sur l'instance des villes hanséatiques qui commercent à Madagascar), mais nous souhaitons par égard pour la France, de raccourcir le plus possible le séjour de la Légation malgache sur place et d'éviter formellement toutes discussions sur des points du traité qui actuellement font l'objet de différends entre la France et le Gouvernement des Hova, ou pourront l'être dans un proche avenir».

C'est le dimanche 13 mai 1883 que Ravoninahitriniarivo et Ramaniraka furent reçus par l'Empereur Guillaume I. Le 15 mai 1883, les Ambassadeurs malgaches et le Secrétaire d'État allemand aux Affaires étrangères procèdent à la signature du traité de paix, d'amitié et d'entente au nom de la Reine de Madagascar et de l'Empereur germanique, Roi de Prusse. Texte original en malgache et en allemand avec traduction anglaise.

Post-scriptum : Dans sa thèse de doctorat («Les relations extérieures de Madagascar de 1960 à 1972»), Césaire Rabenoro cite, dans Le Monde du 21 septembre 1968, Philibert Tsiranana qui évoque «à Alger, la maison dans laquelle fut assignée à résidence la dernière reine de Madagascar» (Césaire Rabenoro, p.122, note 3). «Évolution remarquable», que relève justement l'alors Secrétaire d'État aux Affaires étrangères à l'époque concernée, quand on sait que pour nombre d'intellectuels «côtiers», le «Royaume de Madagascar» s'écrit avec les guillemets de rigueur.

AllAfrica publie environ 600 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.