Afrique du Sud: Élections - L'ANC fortement sanctionné, le parti perd sa majorité absolue

Alors que le décompte des voix des élections générales de mercredi en Afrique du Sud est quasiment bouclé, à 96 %, les résultats confirment le désamour des électeurs pour le parti au pouvoir. Le Congrès national africain (ANC) reste le premier parti du pays, mais est fortement sanctionné : le parti de Cyril Ramaphosa n'obtient que 40 %, environ. Il perd ainsi sa majorité absolue à l'Assemblée nationale, soit du jamais vu depuis la fin de l'apartheid.

L'ANC reste bien le premier parti du pays, mais avec seulement 40,26 % des voix, selon le décompte presque final : la désillusion est énorme, rapporte notre correspondante à Johannesburg, Claire Bargelès. La formation de Nelson Mandela devrait perdre plus de 15 points par rapport aux dernières élections générales de 2019, quand sa marge s'était déjà érodée (57,5 %).

Il n'y a plus de doute : les Sud-Africains ont bien décidé de sanctionner le parti dans les urnes, déçus par la situation économique, des inégalités immenses, et un taux de chômage qui touche un tiers de la population.

En deuxième position, l'Alliance démocratique peut compter sur environ 22 % des voix, quand le parti MK a pu se hisser en troisième position, à environ 15 %, toujours selon le décompte presque final.

L'ANC devrait aussi voir sa majorité absolue être confisquée dans plusieurs régions, alors que le pays votait également pour des scrutins provinciaux. Ce devrait être le cas pour le Gauteng, qui comprend Johannesburg et Pretoria, et encore plus surprenant, dans le KwaZulu-Natal : le parti MK de l'ex-président Jacob Zuma devrait y passer loin devant, à seulement quelques points de la barre des 50 %.

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Le comité exécutif de l'ANC doit se réunir au cours du week-end, pour se concerter avant de s'exprimer et d'entamer de possibles discussions en vue de former des coalitions. Une fois les résultats officiels proclamés, la place sera ensuite aux discussions pour de possibles coalitions : les partis auront 14 jours avant la première séance à l'Assemblée Nationale et le vote pour désigner un futur président.

Car si l'ANC veut nommer un président de la République issu de ses rangs - probablement l'actuel chef de l'État Cyril Ramaphosa, qui brigue un second mandat -, il devra former une coalition à l'Assemblée nationale.

Pari réussi pour Jacob Zuma et son nouveau parti MK

Parmi les causes expliquant l'affaiblissement de l'ANC se trouve son ancien président : Jacob Zuma a fait défection en décembre pour former le parti MK. De l'ombre à la lumière, son parti dissident a réussi l'exploit de devenir la troisième force politique d'Afrique du Sud. La formation n'a pourtant pas de réelle structure et a tout misé sur la figure de Jacob Zuma, rapporte notre correspondant à Johannesburg, Romain Chanson.

Si pour certains l'ancien président est le symbole de la corruption qui a affaibli le pays, pour d'autres, il reste un président charismatique, populaire et gardien des traditions. D'origine zouloue, Jacob Zuma a su mobiliser les électeurs de la première ethnie d'Afrique du Sud : la province du KwaZulu-Natal a très largement voté pour lui. Cette province, où se trouve Durban et son port, l'un des plus importants d'Afrique, pourrait d'ailleurs être dirigée par le MK.

Six ans après avoir été évincé de la présidence de la République par son propre parti de l'époque, l'ANC, pour des affaires de corruption, Jacob Zuma prend sa revanche.

Il n'est pourtant candidat à rien, car son casier judiciaire l'empêche de siéger à l'Assemblée nationale. Pourtant, même sans mandat de député, Jacob Zuma n'est pas sans pouvoir : il a de l'influence. À 82 ans, il vient de prouver qu'il fallait encore compter sur lui.

Selon le porte-parole du MK Nhlamulo Ndhlela, ces résultats ne sont pas une « surprise », mais « c'est du jamais vu » qu'un parti créé en décembre se hisse en troisième force politique.

Je ne dirais pas qu'on est surpris : on savait qu'on aurait un impact, massif. On est un bébé de 5 mois qui se bat contre des dinosaures. C'est du jamais vu, on a une belle histoire à raconter. Cela en dit aussi long sur la confiance que les gens ont dans le président Jacob Zuma et dans son génie politique. Bien sûr qu'ils l'aiment, ils se sentent liés à lui. Ils savent que sous la présidence de Jacob Zuma, la vie était très différente. Il y avait du travail, de l'électricité, des hôpitaux étaient construits. Aujourd'hui, est-ce que vous pouvez me citer un projet réalisé ces sept dernières années qui ait du sens ? Aucun, et c'est bien cela le problème. Les gens en ont marre et ils veulent voir du changement. Le gouvernement de Cyril Ramaphosa ne sert pas le peuple. Et la conséquence, ce sont les résultats que nous voyons aujourd'hui. Il faut qu'ils perdent le pouvoir, ils méritent de prendre une bonne leçon. C'est la seule façon pour que ce pays change vraiment.

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