Sénégal: Restauration des terres agricoles - A Bignona, acteurs de développement et élus locaux prônent une riposte communautaire

Des acteurs de développement et des élus locaux du département de Bignona (sud) ont prôné, mardi, une riposte communautaire pour lutter contre la dégradation des superficies agricoles et rizicoles dans un contexte global de changement climatique.

Ils ont lancé cet appel dans le sillage de la Journée mondiale de l'environnement célébrée ce mercredi sur le thème "La restauration des terres, la lutte contre la désertification et la résistance à la sécheresse".

"Du Blouf à Diouloulou, en passant par Tenghory et les Kalounayes, l'état de dégradation des terres agricoles notamment des rizières est très avancé, du fait du changement climatique", a constaté Arona Diedhiou, le président de l'Entente de Diouloulou, une association spécialisée dans la multiplication de semences de riz pluvial et de semences maraichères.

Pour l'expert semencier, en plus de la salinité et de la toxicité des sols, il y a l'ensablement des rizières lié à l'érosion côtière, qui affectent, selon lui, les surfaces agricoles et rizicoles.

"D'année en année, il y a une perte considérable de la superficie rizicultivable", a-t-il déploré.

Prenant l'exemple du département de Bignona "dont les forêts classées comme les forêts communautaires sont actuellement touchées par une forte dégradation", M. Diedhiou a fait part de sa crainte de voir cette situation devenir "irréversible si rien n'est fait".

"Ce phénomène de dégradation est d'abord imputable au changement climatique avec la floraison d'arbres morts, mais il y a également l'action anthropique avec des activités de carbonisation notées dans plusieurs contrées du département de Bignona. Si les populations ne prennent pas conscience de cela, c'est toute la Casamance qui risque de perdre sa végétation", s'est-il alarmé.

Pour le président de l'association Entente de Diouloulou, la désertification s'explique aussi par le manque d'alternatives des populations, qui se tournent vers les ressources forestières pour subvenir à leurs besoins socioéconomiques.

"Si les populations n'ont pas à la portée de leurs mains de quoi manger, si on ne leur donne pas de quoi survivre, elles vont s'attaquer aux ressources forestières", a-t-il tranché.

La solution du reboisement

M. Diedhiou reconnait que l'État, de son côté, a fait beaucoup d'efforts, notamment avec le recrutement de jeunes qui sont mis à la disposition des services des Eaux et forêts dans le cadre d'activités de reboisement, estimant que le devoir des populations et des communautés est de protéger l'environnement.

"Il faut davantage inciter les jeunes au reboisement, qui constitue une riposte à la dégradation de l'environnement", a-t-il suggéré, non sans manquer de déplorer un manque de suivi par des activités de reforestation.

"Les campagnes de reboisement manquent de suivi. Ainsi, toutes les plantes reboisées, tous les efforts consentis sont souvent annihilés par les feux de brousse. C'est dire qu'il reste beaucoup à faire", s'est-il désolé, relevant que "les nombreuses scieries basées en Gambie sont alimentées par la forêt casamançaise, de Diouloulou à Vélingara".

Pour Malamine Sané de l'Association des jeunes agriculteurs de Casamance (AJAC), "les autorités, les services compétents doivent accompagner les communautés à lutter véritablement contre les trafiquants forestiers le long de la bande frontalière".

"La coupe abusive du bois visible à l'oeil nu aussi bien sur la RN4 qu'au niveau de la bande transfrontalière", a déploré Sagar Coly le maire d'Oulampane, qui appelle les autorités étatiques à davantage sécurité cette zone frontalière sénégalo-gambienne.

"La valse des camions de trafic de bois se multiplient entre la Gambie et le nord Sindian. C'est pourquoi nous sollicitons des autorités compétentes une plus grande sécurisation de la frontière", a-t-il dit.

Tout comme l'édile d'Oulampane, Baboucar Dji Coly, membre de la société civile locale, mise sur le reboisement comme riposte à la dégradation des terres et à la déforestation.

"Il faut que les communautés intensifient les activités de reboisement, car les arbres contribuent à la stabilisation des sols et contribuent à atténuer le ruissellement des eaux", a-t-il soutenu.

Selon lui, d'importantes surfaces sont envahies par le sable du fait du ruissellement des eaux de pluies. "Une situation qui réduit considérablement les superficies agricoles et rizicoles", a-t-il ajouté.

Face à cela, M. Coly plaide pour la construction de digues anti-sel au niveau des vallées pour "juguler le phénomène de la salinisation et restaurer les terres pour l'exploitation agricole et rizicole".

Malamine Sané de l'Association des jeunes agriculteurs de Casamance (AJAC) a, de son côté, insisté sur le niveau de dégradation des rizières et des vallées, devenu "inquiétant", du fait de la forte avancée de la langue salée et des eaux de ruissellement qui drainent, "énormément de sable au niveau des vallées".

"Cette situation doit être analysée à sa juste mesure, sinon nous allons être confrontés à une perte notoire des superficies rizicoles, car ce sont toutes les vallées du département de Bignona qui sont impactées", a-t-il argué.

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