Mali: Libération d'Hamadoun Bah - Les autorités maliennes plient, la justice aussi

Au Mali, le syndicaliste Hamadoun Bah est sorti lundi 10 juin, dans l'après-midi de la maison d'arrêt de Bamako, où il était détenu depuis mercredi dernier après avoir été inculpé de « faux et usage de faux » dans une affaire de conflit syndical interne. Une issue qui met en lumière l'intrusion des plus hautes autorités politiques dans le système judiciaire malien.

Le Synabef, syndicat des banques et assurances, et l'UNTM, première centrale syndicale du Mali, dénonçaient une incarcération abusive et une atteinte à la liberté syndicale. Cinq journées de grève plus tard, leur dirigeant recouvrait la liberté, même s'il reste poursuivi.

Libéré sous pression

Hamadoun Bah a été libéré sous la pression conjointe des syndicats, avec une grève massivement suivie dans les banques et stations-service du pays, et du président de transition en personne, le Colonel Assimi Goïta étant personnellement intervenu auprès d'un plaignant et du ministre malien de la Justice. Le secrétaire général de l'UNTM, Yacouba Katilé, n'a d'ailleurs pas manqué de remercier le président de transition « pour avoir honoré son engagement lors de l'audience » qu'il lui avait accordée mercredi dernier, en urgence, le soir même de l'incarcération d'Hamadoun Bah. Une victoire pour les défenseurs des libertés syndicale et d'expression, mais qui révèle aussi l'état actuel de l'appareil judiciaire.

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« L'implication personnelle du président de la Transition dans la gestion d'une affaire pendante devant les tribunaux est une violation flagrante de la séparation des pouvoirs, une grave atteinte à l'indépendance de la justice malienne. Le président est intervenu parce que le climat social, il est déjà très fragile. Une grève illimitée lancée par des organisations syndicales et notamment les banques, cela aurait pu mettre en difficulté le président de la Transition, raison pour laquelle il a essayé de sauver les meubles avant qu'il ne soit trop tard », estime Oumar Berté, avocat malien et politologue à l'université de Rouen.

Bras de fer

Ce traitement démontre la puissance des syndicats maliens, capables de mener un bras de fer avec les autorités de transition. Il contraste aussi avec le sort réservé à de nombreux autres détenus. Parce que leur incarcération n'a pas fait vaciller le régime, Etienne Fakaba Sissoko, Clément Dembélé, Ras Bath, Kalilou Doumbia ou encore l'ancienne ministre Bouaré Filly Sissoko - et la liste n'est pas exhaustive - ont été condamnés à de lourdes peines après avoir exprimé des propos trop critiques ou attendent en prison, parfois depuis plusieurs années, d'être jugés.

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