Afrique: Festival du cinéma européen-africain - La Tunisie à l'honneur avec « Ashkal »

Lancé en mai dans le cadre du mois de l'Europe par la délégation de l'Union européenne (UE) au Congo, le festival du cinéma européen-africain poursuit son périple. Il a posé ses valises, le 11 juin, au mémorial Pierre-Savorgnan-de-Brazza (PSDB) pour la projection du film tunisien « Ashkal ».

C'est en présence de l'ambassadeur, chef de délégation de l'UE-Congo, Giacomo Durazzo ; du chef de délégation adjoint de l'UE, Torben Nilsson ; de la directrice du mémorial PSDB, Belinda Ayessa ; de l'équipe du ciné-club de l'Institut français du Congo et de bien d'autres Brazzavillois de divers horizons que s'est déroulée la rencontre cinématographique.

Coécrit par Youssef Chebbi et François-Michel Allegrini, « Ashkal » est un thriller à la fois fascinant et mystérieux qui plonge le spectateur dans une enquête policière au coeur de la capitale tunisienne. Dans l'un des bâtiments des Jardins de Carthage, quartier de Tunis créé par l'ancien régime mais dont la construction a été brutalement stoppée au début de la révolution, deux flics, Fatma et Batal, découvrent un corps calciné. Alors que les chantiers reprennent peu à peu et qu'ils commencent à se pencher sur ce cas mystérieux, un incident similaire se produit. L'enquête prend alors un tour déconcertant.

Tout au long de ce long métrage d'environ 1h 32 min, le spectateur découvre plusieurs cas d'immolations à répétition où se greffe l'aspect politique de l'après Ben Ali. La révolution, les immolations, la religion et le feu sont, en effet, les ingrédients essentiels dont s'est servi le réalisateur Youssef Chebbi pour narrer un pan de l'Histoire tunisienne récente et l'interroger par la fiction. « Ashkal » utilise, certes, la figure traumatisante du brûlé vif, mais il laisse longuement planer un doute sur les motifs de ces immolations à répétition. S'agit-il de meurtres dont il faut trouver le coupable ? ou d'une vague de suicides ? ou d'un mouvement de révolte politique ? d'un appel à la rescousse ?

Le contexte est spécifique à la Tunisie mais les thématiques sont universelles : la cupidité, la pauvreté, la marginalisation, la corruption, les bavures policières, etc. « C'est vrai qu'il est tout de même inaccessible, mais je pense que c'est une découverte pour nous. Et je crois aussi que c'est ça le cinéma, avoir une certaine ouverture d'esprit, c'est aller piocher chez les autres et voir un peu comment est-ce qu'en réalité on nous montre, on nous présente la culture et l'identité tunisienne », a fait savoir la directrice du mémorial PSDB, Bélinda Ayessa. Dans ce même élan, elle s'est interrogée sur le titre du film qui paraît aussi ambigu que la trame.

Ori Kozia, réalisateur congolais et membre du ciné-club de l'Institut français du Congo coordonné par la Forge production, a répondu qu'Ashkal, à travers cette fiction, peut avoir plusieurs connotations. « Déjà, dans les croyances locales au niveau de la Tunisie, Ashkal a un rapport direct avec tout ce qui a trait à la géométrie, aux formes, à tout ce qui est à l'extérieur, aux formes basiques de construction, aux formes humaines, tout ce qui a trait à quelque chose de concret.

Et vous allez remarquer que le réalisateur nous présente, au tout début du film, une espèce d'indication sur ce qu'est l'Ashkal. La première image du film, ce sont des bâtiments. Vous voyez des bâtiments vides et inachevés. Et tout le long du film, on nous présente ces bâtiments-là. Ce qui importe vraiment, ce ne sont pas les personnages », a-t-il dit. Et d'ajouter que l'Ashkal, dans le folklore tunisien, pourrait aussi renvoyer à des êtres surnaturels capables de posséder des humains.

Intrigué mais tout de même satisfait par ce film singulier, le public a salué cette initiative de l'UE-Congo qui tout au long du festival fait balader le cinéma afro-européen dans les quartiers de Brazzaville. Le prochain rendez-vous est prévu pour le 14 juin aux ateliers Sahm à Mpissa autour du film « Augure ».

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