Ile Maurice: La justice des ministres et le sort des travailleurs étrangers

Pour défendre le ministre-notaire Ramano, l'exécutif a choisi d'envoyer l'Attorney General au front pour répondre à la PNQ d'Arvin Boolell cette semaine. Jusqu'ici on avait demandé à Maneesh Gobin de faire preuve de discrétion dans le sillage de la Stag Party et des démêlés de Franklin (dont l'extradition tardive avait été dénoncée par les autorités réunionnaises).

Au sein du MSM, on confiait même que l'ancien ministre de l'Agriculture et Attorney General était sur la voie de la sortie définitive du Sun Trust afin de faire place aux sang et visages neufs.

Au Parlement cette semaine, Gobin, soutenu par le speaker Phokeer, a répété à l'envi que l'étude de Ramano demeure opérationnelle mais que le notaire lui est en congé depuis qu'il est devenu ministre de l'Environnement, en charge notamment de la validation des licences EIA. Gobin a été le bouclier de Ramano mais cela ne veut dire pas dire qu'il a sauvé sa peau à lui. Gobin reste un abonné aux scandales politiques qui ont émaillé la présente législature ; scandales qu'il faudra tenter d'effacer.

Pratiquement six ans après l'affaire Yerrigadoo, son successeur Maneesh Gobin comme ministre (MSM) de la Justice s'est retrouvé, pour rappel, au coeur d'un scandale politique aux ramifications mafieuses. Si malgré sa proximité avec les Jugnauth, Ravi Yerrigadoo avait dû démissionner en septembre 2017 (dans le sillage de l'affaire Bet365), le sort de Maneesh Gobin demeure, lui, encore incertain.

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Avec l'affaire Franklin, les affaires prennent une autre magnitude. Si hier, le bureau de l'Attorney General avait émis une lettre qui faisait office de laissez-passer pour un self-confessed swindler (le désormais notoire Rahim), avec Franklin, recondamné depuis à six ans de prison à l'île soeur, on parlait de trafic de drogue inter-îles, protection de l'État accordée à un trafiquant et blanchiment d'argent sur une échelle jamais vue auparavant.

À l'époque, on écrivait qu'une analyse sommaire du dossier à charge contre l'ancien ministre de la Justice portait à croire que ce qui était reproché à Ravi Yerrigadoo semblait encore plus grave que l'affaire Bal kouler, qui avait coulé Raj Dayal, et l'Euroloan de Vishnu Lutchmeenaraidoo, qui avait démonétisé l'ancien ministre des Finances. Ces deux affaires avaient éclaté en avril 2016. Si Dayal, arrêté par l'ICAC, avait dû démissionner, en revanche, Lutchmeenaraidoo avait profité de la brouille entre les Jugnauth et Roshi Bhadain pour conserver, lui, son maroquin ministériel, pour quelques mois encore.

Ce n'était pas à nous mais aux autorités de déterminer si Ravi Yerrigadoo avait utilisé sa position pour violer la loi ou la contourner. Mais de quelles autorités parlions-nous ? La FCC (ex-ICAC) de Navin Beekarry ? Ou la police ? On a pourtant versé des éléments de notre enquête aux deux institutions, mais l'enquête n'a jamais progressé. Le DPP nous faisait récemment comprendre que les meilleurs avocats de la poursuite ne peuvent que se fier au travail, souvent mal fait, de la police.

Le bureau de l'Attorney General est central et hyperconnecté, d'où l'importance d'y placer des gens d'intégrité totale . Il importe de souligner que «the Attorney General's Office is the only institution that interacts with the three constitutional powers, namely the Legislature (National Assembly), the Judiciary (Courts) and the Executive (Government/Ministries)».

Risquons-nous aussi une poussée de Nationalisme face à l'Immigration encouragée des travailleurs étrangers pour pallier notre manque de main-d'oeuvre ?

L'immigration des travailleurs étrangers a toujours été un sujet brûlant dans les débats publics ; et son impact sur l'économie et le tissu social demeure, ici et ailleurs, un point de discorde majeur. Alors que certains prônent les avantages économiques et l'innovation que ces travailleurs pourraient apporter, si l'immigration est choisie, d'autres craignent que la présence des étrangers ne menace l'État providence et ne renforce les sentiments nationalistes, voire xénophobes.

L'un des arguments majeurs contre l'immigration (temporaire ou permanente) des travailleurs étrangers est la menace perçue qu'elle représente pour l'État providence. Les craintes sont multiples : les ressources limitées, telles que le logement et l'accès à l'eau, deviennent encore plus précieuses ; et la concurrence pour les emplois peu qualifiés s'intensifie. Cependant, l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) souligne que l'immigration, lorsqu'elle est bien gérée, peut stimuler l'innovation et répondre à des besoins cruciaux en main-d'oeuvre.

Les données montrent qu'une immigration qualifiée peut entraîner une augmentation des salaires, notamment pour les services spécialisés dans les services financiers ou la robotique, tandis qu'une immigration peu qualifiée peut avoir l'effet inverse, créant une sous-classe prolétarienne mal encadrée. De plus, le manque de stratégies claires pour l'intégration des immigrés, comme c'est le cas à Maurice, pourrait exacerber les tensions sociales et les perceptions négatives.

Pourquoi assiste-t-on à une montée de nationalisme en Europe ces derniers temps ? Entre 1968 et 2021, le nombre d'immigrés y a augmenté beaucoup plus rapidement que la population autochtone, ce qui reflète des raisons économiques et une forte demande de main d'oeuvre. Cependant, ce phénomène n'est pas sans conséquence. Le marché du travail se retrouve sous pression ; et les débats sur l'immigration deviennent des catalyseurs pour la montée du nationalisme et de la xénophobie. En France, par exemple, 70 % des citoyens souhaitent un référendum sur l'immigration, signe d'un malaise croissant.

La diaspora : une solution potentielle ?

La diaspora mauricienne, avec ses compétences et perspectives diversifiées, pourrait jouer un rôle crucial dans le développement économique de leur pays d'origine. Toutefois, cette idée soulève des questions complexes sur la définition de la diaspora, le droit de vote et l'impôt. Une stratégie bien pensée pourrait transformer cette émigration en un atout, mais les défis demeurent considérables.

Alors que le monde évolue, il est impératif de repenser notre approche de l'immigration. Les perceptions modérées et informées doivent prévaloir pour éviter que la peur et la désinformation n'alimentent le nationalisme. Des politiques équilibrées, qui reconnaissent à la fois les défis et les opportunités de l'immigration, sont essentielles pour un avenir harmonieux et prospère.

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