Ile Maurice: Meurtre de Gérald Lagesse - Nouveau procès pour Ruhumatally neuf ans après sa condamnation

Dans un verdict de 26 pages rendu hier après-midi, les Law Lords ont annulé le procès de Jiaved Ruhumatally, condamné en 2015 à 40 ans de prison pour l'assassinat de Gérald Lagesse en 2005, et ordonné un nouveau procès.

Ils ont conclu que le juge de la cour d'assises avait commis des erreurs, entraînant une irrégularité grave et souligné que la poursuite avait évoqué la possibilité de changer l'accusation de meurtre en une charge moindre. Dans ces circonstances, l'accusé pourrait être poursuivi pour homicide involontaire.

Neuf ans après la condamnation de Jiaved Ruhumatally pour le meurtre du Customer Service Supervisor de la Mauritius Commercial Bank, Gérald Lagesse en 2005, le Privy Council donne une nouvelle direction à cette affaire. Le cadavre de Gérald Lagesse, ligoté et bâillonné, avait été retrouvé dans la salle des coffres de la banque. Ruhumatally avait été provisoirement inculpé de meurtre et placé en détention.

Il a été libéré sous caution après que cette charge a été annulée et transformée en accusation provisoire d'homicide involontaire. En avril 2012, ses deux complices ont été inculpés d'homicide involontaire. Cependant, en janvier 2014, une nouvelle accusation de meurtre a été portée contre lui seulement.

Traduit aux assises, Ruhumatally avait plaidé non coupable de l'assassinat de Gérald Lagesse. Ses deux complices avaient bénéficié d'un procès séparé et avaient plaidé coupable. Ils avaient écopé d'une peine de 16 ans de prison chacun alors que Ruhumatally avait été condamné à 42 ans de prison.

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Dans leur jugement, les Law Lords David Lloyd-Jones, Nicholas Archibald Hamblen et Ben Stephens, sir Timothy Holroyde et Dame Ingrid Ann Simler s'attardent sur les directives du juge au jury lors du procès aux assises en 2015. Ils constatent que Ruhumatally avait nié toute intention de tuer, et donc toute préméditation. «Il était donc particulièrement important que le juge soit précis lorsqu'il rappelait au jury les preuves de ce que l'appelant a fait à M. Lagesse. Malheureusement, en tout respect pour le juge, il a commis une erreur à cet égard», écrivent les Law Lords. De plus, ils notent une erreur grave dans une question centrale sur la mort de Gérald Lagesse.

Le jury, selon eux, aurait pu déduire que l'appelant avait attaché une chemise autour de la bouche de la victime pour renforcer le bâillon et réduire sa capacité à l'enlever. «Cependant, s'il y avait eu des preuves que l'appelant avait attaché la chemise pour empêcher la respiration par le nez, cela aurait été important pour déterminer s'il avait l'intention de tuer et si le meurtre était prémédité. Inversement, le fait que la chemise ait été attachée en laissant le nez dégagé soutenait la thèse de la défense que le meurtre n'était pas intentionnel. Le juge n'a pas corrigé son erreur dans son résumé au jury, ne leur demandant pas d'ignorer l'idée que la chemise couvrait le nez et la bouche», déclarent les Law Lords.

Le Privy Council conclut que le juge a omis de poser au jury une question sur lequel il était seul à pouvoir décider. «Le juge a commis une autre erreur dans son résumé. Pour condamner l'appelant pour meurtre, le jury devait être certain que ce dernier avait l'intention de tuer M. Lagesse et que le meurtre était prémédité. Bien que le vol ait été planifié, il n'y avait aucune preuve de préméditation du meurtre avant l'entrée dans la salle des coffres. Les déclarations de l'appelant indiquaient que personne ne devait être gravement blessé. Le juge a correctement indiqué que la préméditation nécessitait une réflexion calme. Malheureusement, il a mal interprété les preuves en résumant les événements de la salle des coffres», soulignent les Law Lords.

Pour le Privy Council, la cour d'appel de Maurice aurait dû conclure que la combinaison de ces erreurs, toutes portant sur des questions de première importance, rendait impossible de maintenir la condamnation. Elle aurait dû constater que cette combinaison d'erreurs constituait une irrégularité grave et avait entraîné une grave erreur judiciaire. Elle aurait dû exercer son pouvoir pour déclarer le procès nul et ordonner un nouveau procès.

L'appel de Ruhumatally a été entendu le 24 janvier dernier. Le Directeur des poursuites publiques (DPP), Me Rashid Ahmine, a fait le déplacement à Londres pour les plaidoiries. Il avait argué que le Conseil privé pouvait demander à la Cour suprême de juger le prévenu à nouveau. Toutefois, la tenue d'un nouveau procès impliquait d'établir qu'il y avait eu une irrégularité lors de l'affaire en première instance. Ruhumatally était défendu par Meᣵ Zaredhin Jaunbaccus et Iqbal Dauhoo.

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