La guerre au Soudan augmente considérablement les besoins de la population de l'autre côté de la frontière, au Soudan du Sud. Médecins Sans Frontières appelle à une augmentation immédiate de l'aide humanitaire pour les personnes fuyant la guerre et pour les communautés qui les accueillent.
La guerre au Soudan a forcé plus de 10 millions de personnes à fuir leur foyer, ce qui en fait la plus grande crise de déplacement au monde. Depuis le début du conflit en avril 2023, plus de 680 000 personnes [1] sont arrivées au Soudan du Sud alors que le système de santé du pays et l'aide humanitaire existante peinent déjà à répondre aux besoins de la population. D'ici la fin du mois de juillet, on estime que sept millions de personnes n'auront pas accès à de la nourriture en quantité suffisante [2].
Avant avril 2023, 30 à 50 enfants souffrant de malnutrition sévère étaient admis chaque mois au centre de traitement pour la malnutrition de l'hôpital MSF de Malakal. Depuis le début de la guerre au Soudan, le nombre d'enfants souffrant de malnutrition sévère admis dans ce centre a augmenté de 200 %.
Des milliers de réfugiés et de rapatriés vivent dans le centre de transit de Bulukat, près de la ville de Malakal. Les pénuries de nourriture, d'eau, d'abris et d'installations sanitaires adéquates ont entraîné la progression des diarrhées et des infections respiratoires.
A environ 300 kilomètres de là, à Renk, près de la frontière, quelque 13 000 réfugiés et Sud-Soudanais « rapatriés » sont bloqués dans le centre de transit de la ville et aux alentours. Ils attendent de pouvoir poursuivre leur chemin au Soudan du Sud ou de pouvoir rentrer chez eux au Soudan. A Renk, la nourriture, l'eau, les abris, les installations sanitaires et les soins médicaux manquent, les conditions de vie sont précaires.
« Il nous arrive de manger deux fois par jour, mais le plus souvent, nous ne mangeons qu'une fois au petit-déjeuner et nous nous couchons le ventre vide, même les plus jeunes », explique Dak Denj, un éleveur de bétail de 70 ans qui vit dans le centre de transit de Renk depuis décembre 2023.
De nombreuses personnes arrivent à la frontière blessées ou souffrant de malnutrition aiguë, après avoir marché pendant des semaines en quête de sécurité. Les organisations humanitaires leur fournissent de l'argent pour acheter de la nourriture pour sept jours, mais beaucoup de réfugiés et rapatriés restent bloqués au centre de transit de Renk pendant des semaines, voire des mois, avant de trouver un moyen de transport pour poursuivre leur route.
L'afflux continu de réfugiés et de rapatriés au Soudan du Sud risque d'aggraver les pénuries déjà aiguës parmi les nouveaux arrivants et les communautés d'accueil, et de rendre encore plus difficile l'accès aux soins médicaux.
Les pénuries d'eau dans la région obligent les gens à aller s'approvisionner dans les rivières. Boire de l'eau non traitée, qui peut être contaminée, présente des risques sanitaires supplémentaires, en particulier dans une région sujette aux épidémies de choléra. Ces risques s'accroissent à l'approche de la saison des pluies. De graves inondations sont à craindre dans toute la région, avec un risque de contamination des puits et des forages, entravant la réponse humanitaire.
Depuis avril 2023, MSF gère une clinique au principal poste frontière et deux cliniques mobiles autour de Renk et Bulukat, qui traitent environ 190 patients par jour, et soutient l'hôpital de Renk. Cependant, cela reste insuffisant.
« La réponse humanitaire reste inadaptée à la réalité des besoins, dans un contexte où le système de santé est déjà mis à rude épreuve, déclare Iqbal Huda, chef de mission de MSF. Nous appelons d'urgence les bailleurs internationaux à allouer des fonds pour répondre aux besoins des rapatriés, des réfugiés et des populations d'accueil au Soudan du Sud. Cela doit inclure la fourniture de nourriture, d'eau, d'abris, d'installations sanitaires et de soins médicaux, ainsi que les moyens financiers leur permettant de poursuivre leur voyage. »
[1] Données du HCR et de l'OIM
[2] Analyse de l'insécurité alimentaire aiguë et de la malnutrition de l'IPC, septembre 2023-juillet 2024