La Fondation des Médias pour l'Afrique de l'Ouest (MFWA) a appris avec grande préoccupation, que les autorités nigériennes ont réintroduit les peines d'emprisonnement pour diffamation, injures et diffusion de données troublant l'ordre public via les réseaux sociaux. A en croire les autorités nigériennes, cette décision a été prise dans le but de rétablir l'équilibre entre la liberté d'expression et la protection des droits individuels, ainsi que de préserver la tranquillité et la sécurité publique.
Chef de l'État du Niger, Général Abdourahamane Tiani, a signé le 7 juin, 2024, une ordonnance portant la modification de la loi n° 2019-33 du 3 juillet 2019 relative à la répression de la cybercriminalité. En vertu de l'article 29, toute personne reconnue coupable de diffamation ou d'injures par un moyen de communication électronique pourrait désormais être condamnée à une peine d'emprisonnement d'un à trois ans et à une amende de un à cinq millions de francs CFA (1,643.86 à 8,000 Dollars).
De même, la diffusion de données troublant l'ordre public ou portant atteinte à la dignité humaine pourrait entraîner une peine de prison de deux à cinq ans et une amende de deux à cinq millions de francs CFA, selon l'article 31 de la nouvelle loi.
Cette dernière modification renverse les efforts du précédent pouvoir civil, qui, en juillet 2022, avait apporté des amendements la loi du 3 juillet 2019 en supprimant les peines d'emprisonnement pour les remplacer par des simples peines d'amende.
La presse sous les bottes des militaires
Dans ce pays, la liberté de la presse est véritablement en danger depuis le coup d'Etat du 26 juillet 2023. La répression des voix critiques est tellement prononcée qu'avoir un journaliste qui accepte de témoigner à visage découvert sur le calvaire des hommes et femmes de médias, relève d'un parcours de combattant.
« Je pense que nous avons assez soufferts comme ça. Je préfère ne pas vous parler, plutôt que de me retrouver en exil ou en prison après vous avoir dit ce que nous traversons en ce moment... », a indiqué à la MFWA, Rachidatou Dramane (non d'emprunt), une journaliste nigérienne.
Ce propos de Rachidatou en dit long sur le climat qui prévaut entre les nouvelles autorités nigériennes et les journalistes de ce pays. Des rapports difficiles qualifiés de « froid et distant » par Adamou Aboubacar (nom d'emprunt), un autre acteur médiatique nigérien qui insiste sur le fait que tout journaliste pour un mot mal placé peut se retrouver en prison ou menacé par certains soutiens des autorités.
Plusieurs journalistes indépendants nigériens ont été menacés par les autorités et n'osent plus parler. Samira Sabou, journaliste et bloggeuse, a été enlevée et séquestrée pendant huit jours sans aucune nouvelle. Aujourd'hui encore, deux journalistes nigériens sont détenus par les autorités militaires. Il s'agit du Directeur de publication du journal l'Enquêteur Soumma Maïga et l'ancien directeur de la Radio Anfani, Ousmane Toudu.
C'est pourquoi, la MFWA s'inquiète des conséquences graves de la nouvelle décision des autorités nigériennes et les appelle à revenir sur leur décision.
En outre, la MFWA appelle à la libération des journalistes emprisonnés et exhortent le gouvernement nigérien à prendre les mesures nécessaires en vue de faciliter le travail des Hommes et femmes de médias, en toute liberté et en toute indépendance.