Je vis au Cameroun, mon pays natal dont les forêts contiennent plus de 90 % des écosystèmes d'Afrique et qui est classé cinquième pays du continent en termes de biodiversité, tant pour la faune que pour la flore. Mais toute cette biodiversité est menacée par l'exploitation minière, forestière, agro-industrielle etc.
De nombreuses communautés rurales dépendent aussi de cette biodiversité. Nous avons entre autres les peuples autochtones des forêts. Entre la non reconnaissance de leur statut légal et des droits spécifiques liés à leur condition, la coupe industrielle toujours croissante du bois dans les forêts, et les effets néfastes des changements climatiques, ces peuples frôlent l'agonie. La déconnexion d'avec leurs terres, forêts engendrent plusieurs maux parmi lesquels la perte de leur identité.
A ce jour, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) a reconnu qu'il faut sécuriser les terres des communautés car leurs usages traditionnels préservent les services écosystémiques et contribuent à la lutte contre les changements climatiques. En Avril 2024, la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH), dans un verdict audacieux et salutaire, a condamné la Suisse suisse pour violation de la Convention Eeuropéenne des droits de l'Homme par son inaction face aux changements climatiques.
La Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples avait condamné en 2001 l'Etat du Nigéria pour violation du droit du peuple Ogoni à un environnement sain. La Cour Africaine des droits de l'Homme et des peuples a dans un arrêt historique rendu le 26 mai 2017, conclut que le gouvernement du Kenya avait violé le droit à la vie, à la propriété, aux ressources naturelles, au développement, à la religion et à la culture des Ogiek, en vertu de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples.
Il faut affiner les stratégies pour préserver la biodiversité, lutter contre les changements climatiques et protéger les droits des communautés qui en dépendent. La célébration de la journée mondiale de l'environnement nous a donné l'opportunité de rappeler les difficultés auxquelles font face les communautés locales et autochtones au Cameroun.
Nous allons continuer d'effectuer le plaidoyer pour que le gouvernement camerounais se positionne comme leader en matière de gouvernance des ressources naturelles, de lutte contre le changement climatique et de protection des droits des communautés locales et autochtones. Dans le cadre dudit plaidoyer nous avons récemment:
Fait part de nos préoccupations concernant la déforestation à grande échelle qui a court
facilité un partage d'expériences entre les communautés forestières du Cameroun qui a débouché sur des recommandations;
lancé une pétition qui a obtenu plus de 2000 signatures du public soutenant les doléances des communautés formulées sur la base des recommandations qu'elles avaient faites.
lancé avec les organisations de la société civile au Cameroun le Mouvement pour la Justice Climatique pour mener des actions collectives en vue de contribuer à la promotion et à la protection du droit constitutionnel de tous à un environnement sain.
La cerise sur le gâteau reste la marche que nous avons organisée dans les rues de la Capitale politique, Yaoundé à l'occasion de la célébration de la journée mondiale de l'environnement le 06 juin 2024. Cette action a connu la participation des communautés forestières locales et autochtones, des chefs traditionnels, des organisations de la société civile et des centaines de camerounais.
L'articulation la plus importante de cette marche était la remise des doléances des communautés au Premier Ministre via le Ministre de l'Environnement, de la Protection de la Nature et du Développement Durable, Monsieur Hele Pierre. Près de 600 Camerounais se sont mobilisés pour demander la justice climatique et plaider pour de meilleures politiques environnementales.
Les regards sont désormais tournés vers le gouvernement, de qui nous attendons de vraies actions. En attendant, le travail se poursuit sur le terrain parce que le climat n'attend pas.