Malgré une année scolaire 2023-2024 qui est en phase d'être bouclée sans grandes perturbations, alors que des nuages noirs s'amoncelaient au-dessus du système éducatif avec le contexte politique et électoral agité, l'école sénégalaise est toujours confrontée au déficit d'enseignants et à l'existence des abris provisoires dans certaines académies de l'intérieur du pays.
Ce problème majeur n'est pas sans conséquences dans le bon déroulement des enseignements-apprentissages. D'ailleurs, le président de la République Bassirou Diomaye Faye a demandé d'accorder une importance particulière à ces questions en Conseil des ministres. La décision du ministre de l'Education de procéder à un recensement du personnel enseignant devrait également permettre de faire l'état des lieux du personnel enseignant en vue d'un recrutement ou d'un redéploiement d'enseignants.
En Conseil des ministres le 5 juin dernier, le président de la République Bassirou Diomaye Diakhar Faye a relevé la place de l'école dans le PROJET de transformation systémique du Sénégal. Dans ce cadre, il a évoqué plusieurs points dont le manque d'infrastructures scolaires et le déficit d'enseignants face à des effectifs d'élèves sans cesse croissants.
Il a ainsi demandé au Premier ministre d'accorder une attention particulière à « la planification, sur les cinq prochaines années, des recrutements d'enseignants dans toutes les matières face aux besoins exprimés et aux postes budgétaires arbitrés » mais aussi à « l'éradication des abris provisoires et à la mise en oeuvre avec les Ministres concernés (Education nationale, Formation professionnelle, Urbanisme et Collectivités territoriales, Finances et Budget) d'un programme concerté de réalisation d'infrastructures scolaires adaptées et d'amélioration de l'environnement pédagogique dans toutes les Académies du pays ».
C'est pour dire que la question du déficit d'enseignants et l'existence des abris provisoires est toujours d'actualité au Sénégal. L'école sénégalaise reste confrontée à ces difficultés qui compromettent le bon déroulement des enseignements-apprentissages.
Concernant le personnel enseignant, le ministre de l'Education nationale Moustapha Mamba Guirassy a pris les devants dès sa prise de fonction. Il a lancé un « recensement exhaustif du personnel enseignant en service dans les écoles, établissements et structures relevant de son département ». L'objectif de cette initiative est de « dresser une photographie exhaustive et précise de la répartition de nos ressources humaines », rapportait la note ministérielle. Une initiative saluée par les syndicats d'enseignants.
« Un recensement de personnel est toujours une bonne chose, en ce sens qu'il permet non seulement de faire l'état des lieux du personnel du secteur, mais aussi de connaître les éventuels besoins et de faire une bonne planification. Je ne sais pas quels sont les objectifs finaux ; mais à notre sens, ce recensement permettra de s'apercevoir du déficit que connaît le secteur et de se mettre à l'évidence qu'il faut, dans les meilleurs délais, avoir une politique bien réfléchie de recrutement conséquent d'enseignants.
Ce recrutement, que nous souhaitons de tous nos voeux, doit se faire en toute transparence et de manière démocratique », avait dit le secrétaire général du Syndicat des enseignants libres du Sénégal (Sels), Amidou Diédhiou. Pour sa part, le Syndicat des enseignants libres du Sénégal/Authentique (Sels/A), Pape Mbaye Mary Sylla déclarait : «Le recensement du personnel enseignant, annoncé par le ministre de l'Education nationale, est une décision normale que nous saluons.
Nous pensons aussi que tous les autres secteurs doivent faire la même chose parce qu'en réalité, il s'agit d'un audit pour voir si tous ceux qui émargent au niveau de son département, sont effectifs. Il ne faut pas perdre de vue que le système a un déficit de plus de 7000 enseignants. Donc, le recensement va lui permettre de faire deux choses. D'abord, ça entre dans le cadre de la bonne gouvernance des ressources parce que c'est sûr et certain que ceux qui ne seront plus là, vont voir leurs salaires coupés. Ensuite, ça doit préparer logiquement un redéploiement de personnel là où il y a un surnombre ».
Il faut dire que depuis quelques années, le déficit d'enseignants dans le milieu scolaire persiste, entravant ainsi le bon déroulement des enseignements. L'ancien ministre de l'Education nationale, Cheikh Oumar Anne avait attribué le problème aux retraites, aux décès, aux démissions, aux mises en disponibilité ou en position de stage.
Tout de même, le déficit d'enseignants a été aggravé par le fait que les concours de recrutement des élèves-maîtres et des professeurs ont connu des retards. Lors du conseil interministériel consacré à la rentrée scolaire tenu le 22 septembre 2023, Cheikh Oumar Anne, avait dénombré 8.883 enseignants manquants du préscolaire au lycée, en plus d'un manque de 110 inspecteurs de l'enseignement à travers le pays.
Concernant les abris provisoires, ils sont toujours en abondance dans les Académies de l'intérieur du pays comme à Sédhiou, à Kolda. Syndicats, société civile comme députés n'arrêtent pas de soulever la question qui plombent la qualité de l'éducation au Sénégal.
En 2023, en marge de la célébration de la Journée internationale de la langue maternelle, à Kaffrine, l'ancien ministre de l'Education nationale avait dénoncé les défaillances des entreprises sénégalaises sélectionnées dans le cadre du Programme de remplacement des abris provisoires et d'ouvrages annexes (PROPAP). A l'en croire, l'Etat du Sénégal a mis 50 milliards de FCFA, depuis 2016, alors que le nombre de salles réceptionnés ne fait même pas 800.
Ce, sur 6000 abris provisoires à remplacer. Les défis à relever dans le secteur de l'éducation restent donc nombreux et risquent de menacer à terme l'immense espoir placé dans la formation à la base de ressources humaines qualifiées et compétentes pour porter le projet de développement du pays.