Adopté par le Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l'Union africaine (UA) à 1218e réunion tenue le 21 juin 2024 au niveau des chefs d'État et de gouvernement pour examiner la situation au Soudan.
Le Conseil de paix et de sécurité,
Rappelant ses décisions et déclarations antérieures sur la situation au Soudan, en particulier les communiqués [PSC/MIN/COMM.1185 (2023)] adopté à sa 1185e réunion tenue le 15 novembre 2023, [PSC/HoSG/COMM.1156 (2023)] adopté par le à sa 1156e réunion tenue au niveau des chefs d'État et de gouvernement le 27 mai 2023, [PSC/PR/COMM.1149 (2023)] adopté à sa 1149e réunion tenue le 16 avril 2023 ; et les communiqués de presse [PSC/PR/BR.1213 (2024)] adopté à sa 1213e réunion tenue le 21 mai 2024, et [PSC/PR/BR.1154 (2023)] adopté à sa 1154e réunion tenue le 16 mai 2023 ;
Réaffirmant l'engagement continu de l'UA à respecter la souveraineté, l'intégrité territoriale, l'unité nationale et l'indépendance de la République du Soudan ;
Réitérant la solidarité de l'UA avec le peuple soudanais dans son aspiration légitime au rétablissement de l'ordre constitutionnel par la mise en place d'un gouvernement démocratique, inclusif et dirigé par des civils ;
Notant les remarques liminaires de S.E. Yoweri Kaguta Museveni, Président de la République d'Ouganda et Président du Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine (UA) pour le mois de juin 2024, la communication de S.E. Moussa Faki Mahamat, Président de la Commission de l'UA, la communication de Dr. Mohamed Ibn Chambas, Président du Comité de haut niveau de l'UA sur le Soudan et la déclaration lue au nom de S.E. António Guterres, Secrétaire général des Nations Unies ; notant également les déclarations de S.E. Workneh Gebeyehu, Secrétaire exécutif de l'Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), et de S.E. Ahmed Aboul Gheit, Secrétaire exécutif de la Ligue des États Arabes ; et
Agissant en vertu de l'article 7 de son Protocole, le Conseil de paix et de sécurité:
1. Condamne fermement la guerre en cours au Soudan et son impact néfaste sur le peuple soudanais et la région, ainsi que les violations des droits de l'homme, du droit international relatif aux droits de l'homme et du droit international humanitaire (DIDH/HIH) qui en découlent ;
2. Exige que les parties belligérantes, à savoir les Forces de soutien rapide (FSR) et les Forces armées soudanaises (FAS), mettent immédiatement fin aux combats et privilégient les intérêts du Soudan et de son peuple ;
3. Se déclare profondément préoccupé par la situation humanitaire catastrophique sans précédent, les tueries sans discernement de civils innocents et la destruction gratuite d'infrastructures, notamment les hôpitaux, les écoles, les installations de purification d'eau et de production d'électricité, ainsi que les infrastructures des missions diplomatiques, en violation flagrante du DIH et du DIDH , ainsi que de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques ; ces violations à l'encontre des civils constituent des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité ;
4. Se déclare profondément préoccupé par la poursuite des violences dans différentes régions du Soudan, en particulier dans la région de Khartoum/Omdurman, au Darfour, notamment dans les États d'El Fasher, d'Al Gezira et du Kordofan, et met en garde contre les dangereuses répercussions ethniques et communautaires potentielles du conflit ;
5. Souligne l'importance d'assurer la protection de l'État soudanais, de ses institutions et de son peuple ;
6. Souligne en outre qu'il n'existe pas de solution militaire viable et durable au conflit et que seul un véritable dialogue inclusif peut permettre de trouver une solution durable à la situation actuelle ;
7. Une fois de plus, exige de toute urgence que les belligérants observent un cessez-le-feu immédiat et sans conditions afin de reprendre les négociations et de mettre fin aux souffrances du peuple soudanais ;
8. Demande instamment aux parties belligérantes de permettre l'accès humanitaire et d'assurer la protection des travailleurs humanitaires en vue de la fourniture d'une aide humanitaire d'urgence aux populations qui en ont besoin, en particulier les femmes, les enfants, les personnes âgées et les autres groupes vulnérables pris dans le conflit et ce, sans délai et sans conditions préalables, conformément au droit international humanitaire et à la pratique en matière de protection des civils, des travailleurs humanitaires et sanitaires et des biens, et rappelle, dans ce contexte, la résolution 2736(2024) du Conseil de sécurité des Nations unies exigeant la levée du siège d'El Fasher ;
9. Dénonce, avec la plus grande fermeté, la perpétration présumée de crimes d'atrocité résultant du conflit entre les belligérants, en violation flagrante des instruments juridiques de l'UA relatifs aux droits de l'homme et des peuples, ainsi que du droit international humanitaire et le droit international relatif aux droits de l'homme, et charge l'Union africaine et ses organes compétents, en collaboration avec le Comité de haut niveau sur le Soudan et l'IGAD, de suivre et de signaler régulièrement ces crimes odieux commis sur l'ensemble du territoire soudanais, afin de mettre en place des mesures préventives et de réduire le risque de récidive, de formuler des propositions sur la manière d'y remédier pour éviter qu'ils ne s'aggravent davantage, ainsi que d'élaborer un plan de protection des civils, et met en garde les auteurs de ces crimes qui devront rendre compte de leurs actes ;
10. Prend note, avec satisfaction, de la communication du Président de la Commission sur les mesures prises pour le règlement du conflit soudanais et réaffirme la pertinence de la Feuille de route de l'UA sur le règlement du conflit au Soudan, qui a été adoptée par le Conseil de paix et de sécurité dans son Communiqué [PSC/HoSG/COMM.1156 (2023)] du 27 mai 2023; à cet égard, appelle à une action renouvelée et accélérée de toutes les parties, des acteurs nationaux, des acteurs régionaux et de la communauté internationale en vue de la réalisation des six (6) piliers de la Feuille de route de l'UA ;
11. Salue l'initiative prise par le Président de la Commission, par l'intermédiaire du Comité de haut niveau de l'UA sur le Soudan, en collaboration avec l'IGAD, de convoquer, du 10 au 15 juillet 2024, le prochain processus de dialogue politique inclusif du Soudan à Addis-Abeba, et exhorte tous les acteurs soudanais à soutenir activement le dialogue politique afin de trouver une solution durable et portée par le peuple au conflit, et de rétablir l'ordre démocratique constitutionnel au Soudan en vue d'un avenir plus radieux ;
12. Se félicite des efforts déployés par S.E. Ismail Omar Guelleh, Président de la République de Djibouti et Président de l'IGAD, pour trouver une solution négociée à la crise au Soudan ;
13. Souligne qu'un cessez-le-feu acceptable ne peut être obtenu que par des négociations directes entre les principaux acteurs de la guerre et, à cet égard, demande au Président de la Commission de l'UA de mettre en place d'urgence un Comité présidentiel ad hoc du CPS composé d'un chef d'État et de gouvernement de chaque région du continent et dirigé par S. E. Yoweri Kaguta, Président de la République d'Ouganda et Président du CPS pour le mois de juin 2024, pour faciliter, dans les meilleurs délais, un dialogue directe entre les chefs des Forces armées soudanaises et des Forces de soutien rapide ;
14. Demande au président du Conseil de souveraineté de transition et au commandant des forces de soutien rapide de se réunir sans délai sous les auspices de l'UA et de l'IGAD ;
15. Exprime sa gratitude aux pays voisins du Soudan pour avoir supporté le fardeau lié à l'accueil et à la prise en charge de millions de réfugiés soudanais et pour leur collaboration continue avec l'UA et l'IGAD en vue de trouver des solutions durables à tous les aspects du conflit et de son règlement, appelle tous les partenaires et les États membres en mesure de le faire, à apporter de l'aide humanitaire au peuple soudanais et aux États voisins qui accueillent un grand nombre de réfugiés soudanais et invite les donateurs à honorer les engagements qu'ils ont pris lors de l'événement de haut niveau d'annonce de contributions pour soutenir la réponse humanitaire au Soudan et dans la région, qui s'est tenu à Genève (Suisse) le 19 juin 2023, et lors de la Conférence humanitaire internationale pour le Soudan et les pays voisins, qui s'est tenue à Paris (France) le 15 avril 2024 ;
16. Se félicite des initiatives entreprises par les pays voisins, en coordination avec l'UA et l'IGAD, pour faciliter la promotion de la paix au Soudan, y compris les efforts actuellement déployés par la République arabe d'Égypte en vue du dialogue entre les acteurs soudanais, qui devrait se tenir au début du mois de juillet 2024 au Caire (Égypte) et qui vient compléter les efforts en cours pour la tenue du dialogue inclusif dirigé par l'UA et l'IGAD ;
17. Félicite tout particulièrement les Nations Unies et la Ligue des États arabes pour leurs efforts en faveur de la paix au Soudan et encourage la communauté internationale à soutenir pleinement le processus de dialogue politique de l'UA/IGAD ;
18. Réitère sa préoccupation face à la prolifération des initiatives de médiation et de paix, et souligne l'importance d'une coordination et d'une complémentarité accrues des efforts de paix dans le cadre de la collaboration entre l'UA, l'IGAD et les pays voisins et insiste une fois de plus sur la nécessité impérieuse pour toutes les parties prenantes de travailler de manière inclusive, coordonnée et synchronisée dans le cadre du mécanisme de coordination existant mis en place par l'UA - le Mécanisme élargi et son Groupe central pour le règlement de la crise au Soudan ;
19. Condamne toutes les formes d'ingérence extérieure qui alimentent le conflit, en violation flagrante de tous les communiqués pertinents du CPS et des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, en particulier la résolution 1556 (2004), et, tout en réitérant l'exigence qu'elles cessent immédiatement, exige que tous les acteurs, y compris les États et les entités non étatiques, cessent d'apporter tout soutien militaire et financier aux belligérants qui aggrave davantage le conflit au Soudan ; à cet égard, charge le Sous-comité des sanctions du CPS de travailler en liaison avec la Commission de l'UA et le Comité des services de renseignement et de sécurité d'Afrique (CISSA) pour identifier tous les acteurs extérieurs qui soutiennent les factions belligérantes sur les plans militaire, financier et politique, et de faire des propositions sur la manière d'endiguer l'action de chacun d'entre eux dans un délai ne dépassant pas trois (3) mois à compter de juin 2024 ;
20. Souligne la nécessité d'assurer la protection des civils au Soudan et, à cet égard, demande à la Commission de l'UA, en coordination avec la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (CADHP), d'enquêter et de faire des recommandations au CPS sur les mesures pratiques à prendre pour la protection des civils ;
21. Propose la convocation d'un sommet extraordinaire de l'UA pour examiner la situation au Soudan et, à cet égard, demande à la Commission de l'UA, en consultation avec le Président de l'Union, de se concerter sur la date et le lieu du sommet extraordinaire susmentionné ;
22. Demande à la Commission de l'UA de transmettre d'urgence le présent communiqué aux membres africains du Conseil de sécurité des Nations unies en tant que document de travail en vue d'assurer une meilleure coordination et harmonisation des efforts au Soudan ;
23. Décide de demeurer activement saisi de la question.