La question des enfants mendiants est une d'une grande acuité. La problématique est devenu beaucoup plus sérieuse ces derniers temps avec la présence d'enfants accompagnés par leurs parents et qui s'adonnent à la pratique. Plusieurs mesures ont été prises au fil des régimes, sans qu'on arrive à éradiquer la mendicité des enfants.
Le Sénégal a célébré avant-hier, lundi 24 mai, à Kaffrine, la Journée de l'enfant africain, une occasion aussi pour lancer la Semaine nationale de l'enfant. Le ministre de la Famille, Maïmouna Dièye, a rappelé à cette occasion l'importance du respect des droits des enfants et leur bien-être. Une question majeure plombe cependant la vie de nombre de ces mineurs : la mendicité des enfants. Le Sénégalais est habitué à ces bandes d'enfants qui trainent dans les rues, à la recherche de pitance.
En dehors de la présence des talibés, la mendicité des enfants est devenue un véritable trafic, une traite d'êtres humains. Les enfants, parfois de petites filles, sont en errance dans les rues de la capitale, en quête de pitance, sous le regard coupable de leurs parents. Beaucoup viennent des pays de la sous-région, pour se livrer à la mendicité. Ils sont contraints à une vie dans la rue, dans des huttes insalubres, dépourvues de toute commodité.
Et pourtant, l'Etat du Sénégal a toujours fait montre d'une volonté de lutter contre la mendicité des enfants. Des engagements sont pris, au fil des régimes, sans que Dakar ou les autres grandes villes de l'intérieur ne soient débarrassées de leurs hordes de mendiants.
En mars 2013, Abdoul Mbaye, alors Premier ministre du premier gouvernement de Macky Sall, avait indiqué la ferme volonté des autorités à mettre un terme à la présence des enfants dans la rue. «Le gouvernement s'oriente vers l'interdiction totale de la mendicité des enfants», avait-il dit, après qu'un incendie eût couté la vie à neuf (9) enfants à la Médina.
Ainsi, en annonçant des mesures drastiques, Abdoul Mbaye avait réédité la «chanson» entonnée par son prédécesseur, Souleymane Ndéné Ndiaye, (Dernier Premier ministre du régime de l'ancien président Me Abdoulaye Wade) sur un phénomène qui survit aux générations d'hommes politiques, dont la détermination à éradiquer ce fléau s'est toujours confrontée à la réalité du terrain. Souleymane Ndéné Ndiaye a lui aussi échoué à mettre en place un système capable d'éradiquer cette mendicité des enfants, à cause d'une farouche résistance de défenseurs d'un modèle de «daara» (école coranique) basé sur la mendicité.
Le président Macky Sall a rappelé plusieurs fois sa ferme volonté de mettre un terme à cette pratique. «Des mesures très fortes seront prises pour mettre un terme à l'exploitation des enfants, sous prétexte qu'ils sont des talibés», promettait-il au lendemain de l'incendie de la Médina. Le 1er juillet 2016, à travers un poste sur twitter (actuel X), il avait dit : «Pour la protection des groupes vulnérables, j'ai ordonné le retrait d'urgence des enfants des rues».
Plus tard, après la prière de la Korité du 6 juillet de la même année, il est revenu sur la question. «J'ai donné des instructions très fermes au gouvernement pour mettre un terme à cette image insoutenable d'enfants abandonnés dans la rue. Ce n'est pas parce qu'ils sont issus de milieux pauvres ou modestes qu'on doit les laisser à la merci de la rue», avait-il dit.
Pendant la Covid-19 aussi, il a donné «des instructions fermes» pour que les enfants soient retirés de la rue. Quelques déportations vers des pays voisins d'où sont originaires nombre de ces mineurs ont été notées ; puis, la lutte s'est encore estompée. En 2022, plus de mille mendiants ont été rapatriés dans leurs pays.
La désolante image de la capitale sénégalaise, avec la présence de mendiants dans toutes les grandes artères, ne donne pas l'impression que des actions de retrait ou de lutte ont été initiées. Pourtant, le Sénégal a adopté, le 10 mai 2005, la loi 2005-06 relative à la lutte contre la traite des personnes et pratiques assimilées et à la protection, signe d'une volonté politique manifeste de lutter contre la traite des personnes. Cette loi prend en charge les aspects relatifs à la traite des personnes et l'exploitation de la mendicité d'autrui.