Congo-Kinshasa: Les pêcheurs du lac Edouard contre l'exploitation du pétrole

Dans un communiqué datant du 21 juin, les pêcheurs interpellent les autorités congolaises et leur demandent d'abandonner l'idée d'exploitation du pétrole qui menace leur activité.

Dans une lettre adressée à la Première ministre Judith Suminwa, les pêcheurs rappellent que le lac Edouard est leur unique moyen de subsistance, ainsi que pour toutes les personnes qui interviennent dans la filière poisson.

Ils précisent qu'ils "ne veulent pas que leur source de revenu soit sacrifiée au profit d'entreprises étrangères qui laisseraient la population dans la vulnérabilité."

Bantu Lukambo est pêcheur. Il est le secrétaire général d'Innovation pour le développement et la protection de l'environnement et il est contre ce projet d'exploitation du pétrole dans le bloc 5 du lac Edouard. Il insiste notamment sur les impacts sociaux et environnementaux que pourrait avoir un tel projet.

"Si on dit qu'on veut exploiter le pétrole du lac Edouard, cela revient à nous enterrer vivants. Pour nous, ce projet n'est pas du tout le bienvenu parce que c'est un projet qui va tout détruire. Nous avons l'expérience avec l'exploitation du pétrole dans le delta du Niger, au niveau du Nigeria, même à Moanda ici en RDC. Autant dire qu'il n'y a pas de risque zéro avec l'exploitation du pétrole " confie Lukambo à la DW.

Pour lui, "le Congo n'est pas un pays qu'on peut songer à développer avec le pétrole" puisque explique Bantu Lukambo "nous avons par ailleurs des minerais que le gouvernement peut utiliser."

Sensation de déjà vu

Ce projet n'aura aucune valeur ajoutée pour la population, précise pour sa part Jimmy Munguriek, chercheur à l'université de Bunia.

Il rappelle qu'il y a quelques années, des environnementalistes avaient déjà soulevé les risques encourus pour l'environnement lorsque la société britannique Soco International avait postulé, pour exploiter le pétrole du lac Edouard qui appartient au parc national des Virunga, un sanctuaire classé par l'Unesco qui abrite les dernières populations de gorilles de montagne.

"Sur le plan environnemental, l'exploitation risque d'entraîner l'extinction des espèces qui sont présentes. Même si on part de la loi congolaise, c'est une exploitation qui ne peut pas marcher. C'est d'ailleurs pour ces raisons qu'à un moment donné, la société britannique Soco avait postulé pour exploiter ce bloc," insiste le chercheur.

"A l'époque, lorsque les études ont été menées, les environnementalistes ont montré que ce projet d'exploitation de la Soco ne pouvait pas marcher dans ce bloc 5. C'est pour ces raisons que Soco avait abandonné ce projet d'exploitation. Si on décide aujourd'hui d'exploiter, cela remettra en cause tout ce qui a été fait avant" assure par ailleurs Jimmy Munguriek.

Quelles alternatives possibles ?

Pour Bantu Lukambo qui dirige la structure Innovation pour le développement et la protection de l'environnement basée dans l'est de la RDC, le gouvernement devrait investir dans la production d'énergie propre puisqu'aujourd'hui, le réchauffement climatique incite les Etats à ne pas exploiter leurs réserves de pétrole.

Il rappelle que la RDC possède de nombreuses aires protégées qui peuvent générer des revenus. Pour lui, le développement du secteur du tourisme reste une des nombreuses pistes à envisager pour développer le pays, sans recourir à l'exploitation du pétrole qui détruit à la fois le domaine de la pêche et celui de l'agriculture.

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