Afrique de l'Ouest: AES - « Chemin de non-retour » ou Impasse.

27 Juin 2024
analyse

Le Président de la Transition, chef de l’état du Mali, le Colonel Assimi Goita en visite à Ouagadougou cette semaine a déclaré que les états de l’AES notamment le Mali, le Burkina Faso et le Niger étaient, vis -a- vis de la CEDEAO, sur le chemin de non-retour. Autrement dit, il vient de confirmer sans ambages les propos tenus récemment à Niamey par son ministre des affaires étrangères Abdoulaye Diop.

Que faut-il en tirer comme conclusion ?

La plupart des observateurs semblent dire que cet avis tranché, de celui qu’on considère comme le moins prolixe parmi les chefs d’Etat de l’AES, à le mérite de dire  de manière explicite que  la médiation sénégalaise du Président Bassirou Diomaye Faye, si tant est qu’il y’en ait eu une, est d’ores et déjà désuète.  Il est vrai que jusqu’à présent, la CEDEAO, elle-même, n’a pas manifesté la même ardeur que celle dont elle a fait preuve pour décider des sanctions économiques, qui ont plongé ces pays dans de très grosses difficultés.

Les tenants de l’aile dure de l’époque semblent aujourd’hui emmurés dans un silence de cathédrale. Qu’il s’agisse du président Bola Tinubu, plus préoccupé par ses problèmes économiques internes, et dont le mandat à la tête de la CEDEAO devrait se terminer en juillet 2024, sauf s’il décide de  briguer   un second mandat, où d’Alassane Ouattara, à qui la perspective de la fin de son 3ème mandat ne laisse plus beaucoup de marge.

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Macky Sall du Sénégal a quant à lui été forcé de quitter le pouvoir à la fin de ses 2 mandats. Par conséquent il ne reste plus de cette « aile dure », que le Président Patrice Talon du Bénin. Or ce dernier  a d’autres priorités. C’est d’abord se sortir de la crise avec le voisin nigérien, qui risque d’étouffer son pays. On le sait, la fermeture de  la frontière commune compromet  près de 80% de ses exportations vers le Niger, sans oublier le pipe-line nigérien du terminal de Sémé Kpodji pour l’exportation du pétrole nigérien, aujourd’hui bloqué avec de graves conséquences économiques.

Le déplacement à Niamey de deux anciens  Présidents du Bénin, Thomas Yayi Boni et Nicéphore Soglo, au-delà du caractère symbolique, atteste quelque part de la faillite de la diplomatie officielle. Cette  initiative n’ouvre-telle pas une nouvelle ère dans la médiation, face à la carence de la Cedeao , à mettre au crédit des anciens présidents Béninois qui, sans préjuger du résultat, ont fait preuve de sagesse à « l’africaine » .

Espérons que cela aboutisse à renouer les fils du dialogue, car l’Afrique de l’Ouest ne peut pas aujourd’hui se payer le luxe d’autant de « conflits », appelons-les ainsi. A la frontière entre la Mauritanie et le Mali il ya des soucis, de même entre le Burkina et la Côte d’ivoire ce n’est pas la parfaite entente, sans oublier le différends entre le Niger et le Bénin, qui tourne à l’escalade,  on n’est pas loin de la « poudrière ». La rupture programmée des pays de l’AES avec la CEDEAO, serait l’étape de trop, qui risque de plomber les perspectives de développement en Afrique de l’ouest.  Les conséquences seront énormes.

Si cette spirale n’est pas enrayée, les grands projets d’intégration du continent risquent de connaître un retard d’une décennie encore, sinon plus.   On le voit, la CEDEAO, peine à garantir la libre circulation des personnes et des biens, la ZLECAF dont le siège se trouve à Accra, commence à trouver ses marques en   suscitant   beaucoup d’espoirs pour le plus grand marché qu’il va charrier. Des crises perlées de cette nature n’augurent de rien qui pousse à l’optimisme.

« Le chemin du non-retour » dont parle le Président Goita, conforté par ses homologues du Burkina et du Niger n’est plus ni moins, qu’une impasse.  Une telle position  semble postuler à une logique de combat, non pas pour le développement, mais contre la menace Djihadiste ; la seule constante qui vaille une mise entre parenthèse de l’idéal de l’intégration.

Si on observe bien le processus de réarmement qui est en train de se mettre en place entre les 3, il ya fort à craindre que les logiques qui ont prévalu pendant les  décennies de guerres froides, et qui ont fait de notre continent un espace de confrontation entre puissances occidentales, risquent de se reproduire une fois de plus. Pour respectable qu’elle soit, la cause défendue par les Etats de l’AES, risque d’enrichir les officines occultes de fabrication d’armes et de munitions qui fonctionnent à plein régime avec le conflit entre la Russie et l’Ukraine, et qui cherchent des débouchées.

Donnons une chance de plus à la paix, particulièrement en Afrique de l’Ouest, ou curieusement sa partie francophone est la seule à connaître des soubresauts risqués, et où pratiquement on retrouve les mêmes populations. Ne devrais -t-on pas s’interroger sur ce fait ?

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