Dans une interview sur France 24, Aminata Touré qualifie ouvertement de « collusion » la nomination de Macky Sall comme émissaire d'Emmanuel Macron, soulevant notamment des questions de sécurité nationale
Dans une interview accordée à France 24 ce jeudi 27 juin 2024, Aminata Touré, ancienne Première ministre devenue opposante à Macky Sall, a lancé une charge virulente contre son ancien mentor, l'accusant de « collusion » avec la France.
En cause, la récente nomination de Macky Sall comme envoyée spécial du pacte de Paris pour les peuples et la planète par le président français Emmanuel Macron. Mme Touré n'a pas mâché ses mots : « Je ne l'insinue pas, je le dis ouvertement. C'est quand même assez particulier. »
L'ancienne Première ministre soulève des questions cruciales de sécurité nationale et d'éthique : « Nos présidents doivent avoir un droit de réserve parce qu'ils ont été commandant en chef de nos armées. Donc ils sont détenteurs de nos secrets militaires, ils connaissent la cartographie de nos ressources naturelles. » Elle ajoute : « Je ne pense pas que dans beaucoup de pays occidental ou dans aucun pays occidental cela n'aurait été acceptable. »
Aminata Touré plaide pour une réévaluation complète des liens entre le Sénégal et son ancienne puissance coloniale. Elle évoque notamment la présence militaire française au Sénégal et la question du franc CFA, affirmant : « Ce sont des questions effectivement qu'il faut vider et envisager une coopération dynamique gagnant-gagnante où chacun y trouverait un intérêt. »
Malgré ces critiques acerbes, Mme Touré a tenu à souligner la force de la démocratie sénégalaise, mise à rude épreuve lors des récentes élections. « La démocratie sénégalaise est beaucoup plus solide que les voeux de l'ancien président Macky Sall », a-t-elle déclaré, faisant référence aux tentatives de l'ex-président de se maintenir au pouvoir.
Elle rappelle les événements tragiques qui ont précédé l'élection : « Il y a eu quand même 60 morts en estimation de suite aux manifestations soit contre le troisième mandat qui était bien entendu illégal ou contre le report de l'élection présidentielle. »
L'interview a également abordé la question épineuse de la justice pour les victimes des violences pré-électorales. Mme Touré, se positionnant comme « militante des droits de l'homme », insiste : « Il ne peut pas y avoir de paix durable sans justice ». Elle critique la loi d'amnistie votée avant le départ de Macky Sall, tout en reconnaissant son rôle dans l'apaisement du climat politique.
Bien qu'ayant participé activement à la campagne du nouveau président Sall, Aminata Touré reste vigilante quant aux actions du nouveau gouvernement. Elle salue certaines mesures, comme la baisse des prix du carburant et les réformes concernant les scandales fonciers, tout en appelant à la responsabilité, notamment en matière de liberté de la presse.