Afrique: Législatives anticipées en France - Quels enjeux pour le continent?

38 députés RN ont été élus dès le 1er tour, hier soir !

Près de 50 millions de Français ont été appelés aux urnes, hier dimanche, pour élire au suffrage universel direct à deux tours, les 577 députés qui devront siéger à l'Assemblée nationale, à l'issue des élections législatives anticipées les plus anxiogènes de ces dernières décennies, convoquées par le président Emmanuel Macron, le 9 juin dernier.

En attendant les résultats du second tour prévu pour le 7 juillet, la question qui taraude les esprits est celle de savoir si les Français ont, cette fois-ci, et pour la première fois, décidé de donner les clefs du palais Bourbon (siège de l'Assemblée nationale) à l'extrême droite dont les principales caractéristiques sont le chauvinisme, le racisme, la xénophobie, son non-respect des lois nationales et internationales de protection des droits humains, entre autres.

Après ce premier tour dont les résultats confirment, à quelques exceptions près, sa victoire annoncée par les instituts de sondage dans de nombreuses circonscriptions, le Rassemblement national (RN) de Marine Le Pen et de Jordan Bardella peuvent déjà rêver d'une majorité absolue à l'Assemblée nationale au soir du 7 juillet prochain, au grand dam de tous ces Français qui ont une dent atavique contre cette coalition iconoclaste.

La France pourrait bel et bien céder aux sirènes dangereuses du RN, le 7 juillet prochain

C'est un scénario fort bien possible ou réalisable, quand on sait qu'ailleurs, d'autres leaders de l'extrême droite comme Trump aux Etats-Unis, Orban en Hongrie, Milei en Argentine, ou Duda en Pologne ont déjà été élus sans coup férir. Si on ajoute à ces exemples, la percée historique de l'extrême droite lors des dernières élections européennes, on peut dire que la France pourrait bel et bien céder aux sirènes dangereuses du Rassemblement national, le 7 juillet prochain.

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C'est une perspective pour le moins inquiétante et même cauchemardesque pour beaucoup de Français et de partenaires européens de la France, et évidemment pour certains Africains qui redoutent, à juste raison, qu'une fois aux manettes du pouvoir, le RN ne mette fin au regroupement familial, et ne procède à l'expulsion systématique des clandestins et à la suppression du droit de sol, sans oublier les graves répercussions sur les migrants et les demandeurs d'asile qui sont présentés généralement comme des boucs-émissaires que Marine Le Pen et les siens jettent en pâture ou exposent à la vindicte populaire.

Dans les communautés étrangères de France et notamment d'origine africaine, toutes les alertes sont au rouge, et les banlieues considérées comme des réservoirs des abstentionnistes ont été appelées à se mobiliser pour faire barrage au scénario-catastrophe en cours.

Des sportifs de très haut niveau comme le footballeur Kylian Mbappé et le médaillé d'or du volley-ball, Earvin Ngapeth, tous d'origine camerounaise, le fils d'immigré congolais et star française du basket-ball, Victor Wembanyama, ont sonné la mobilisation en appelant ouvertement à voter contre le RN, mais, pour l'instant, tout porte à croire que c'est un pétard mouillé, d'autant que les candidats de ce parti qui entend donner un tour de vis à la politique de l'immigration sont, pour beaucoup d'entre eux, déjà en pôle position pour être élus députés.

Il y a beaucoup d'enjeux pour l'Afrique dans ces législatives françaises

Il est évident que l'extrême droite qui a toujours considéré les migrants comme les responsables de presque tous les maux qui minent la société française vont, une fois leur victoire confirmée au terme du second tour, mettre la pression sur les pays qui bordent la Méditerranée comme la Tunisie et le Maroc, pour qu'ils protègent les frontières hexagonales par tous les moyens.

Ceux qui arriveront miraculeusement à échouer sur les côtes européennes et à entrer clandestinement en France, feront l'objet de stigmatisation et de contrôles au faciès, avant d'être rapatriés menottes aux mains et sans ménagement. Pour ceux qui voudront rallier Paris régulièrement et par les airs, ils doivent, d'ores et déjà, savoir que les visas seront accordés aux compte-goutte, et il sera encore plus difficile pour les Africains de se rendre en France.

Il se pourrait qu'il y ait des mesures de rétorsion ou de réciprocité de la part de certains pays africains ; toute chose qui ne déplairait pas aux activistes et souverainistes du continent qui demandent urbi et orbi la fin du paternalisme rampant et sournois de la France et de son « gangstérisme » politique et économique dans ses anciennes colonies. L'éventuelle victoire aux législatives du Rassemblement national pourrait donc être, à leurs yeux, une solution à leurs préoccupations.

Mais ce serait une énorme méprise de leur part que de croire que la politique africaine de la France va changer du tout au tout, que le franc CFA ne sera plus fabriqué à Clermont-Ferrand, que les bases militaires françaises vont disparaitre du continent, et que les dictateurs africains ne pourront plus plastronner sur le perron de l'Elysée.

Il faudrait peut-être rappeler à ceux qui disent déjà que ça va bientôt "péter" entre la France et ses "valets locaux", que le Général Mahamat Deby Itno entretient des liens d'amitié presqu'indémaillables avec la figure de proue du RN, Marine Le Pen pour ne pas la nommer, alors que le président tchadien est connu pour être une véritable « encyclopédie de la marmaille politique ».

Bref, il y a beaucoup d'enjeux pour l'Afrique dans ces législatives françaises, surtout sur la gestion de l'immigration si l'extrême droite parvenait à remporter le scrutin comme le prédisent les sondages et les analystes politiques.

On attendra le soir du 7 juillet pour en dire davantage, surtout que la surprise est encore possible, avec la mobilisation tous azimuts des anti-RN afin de déjouer les pronostics en mettant fin au rêve de Jordan Bardella de diriger un gouvernement d'extrême droite dans ce berceau de la démocratie et des droits de l'Homme.

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