Ile Maurice: Questions sans réponses

C'est compliqué quand l'on est fatigué de critiquer et qu'il n'y a pas grand-chose à encenser ! Et pourtant, il faut bien...

Vous pensez que vous avez tout entendu et lu à propos de notre économie ? Vous avez digéré le fait que si l'on comptabilise le véritable endettement du pays, y compris les Rs 158 milliards provenant de la BoM, la dette nationale est à 95 % du PIB et non 65 % ? Vous avez compris que sans l'apport controversé du «Global Business», le déficit de la balance des comptes courants est d'un insoutenable 12 % ? Vous avez pris conscience que la CSG est nominalement déjà déficitaire et qu'avec une population vieillissante, cela va empirer et impacter le Consolidated Fund de plus en plus lourdement ? Vous appréhendez que, le revenu minimum garanti ayant été augmenté à Rs 20 000, le réajustement des 'différentiels' de salaires qu'étudie le Pay Research Bureau actuellement, nous promet des bouleversements ? En effet, soit le Budget du gouvernement et celui de nombreuses compagnies du privé, dont surtout les PME, va exploser, soit encore les 'différentiels' ne seront pas restaurés, dans lequel cas, ce sont les frustrations qui vont faire 'boom'...

Faisons une petite incursion additionnelle dans les paramètres et problèmes sérieux dont on parle peu ou pas du tout.

Le gouvernement est le responsable ultime de plus d'une centaine de corps paraétatiques. Si les plus récents se sont sans doute évertués à installer des fonds de pension selon le modèle Defined Contribution (DC), nombreuses sont les compagnies paraétatiques plus vieilles qui peinent (certaines croulent ?) sous des régimes de pension selon le modèle Defined Benefit (DB) qui coûtent plus cher. D'après le rapport du directeur de l'Audit, le déficit sur les pensions DB des corps paraétatiques et des autorités locales se montaient à Rs 46 milliards en juin 2022. Ce montant n'est toujours pas reconnu dans les comptes financiers ou dans la dette du secteur public. Le problème est réel et plus on repousse à demain, plus cela va coûter cher... Est-ce que le nécessaire a été fait depuis 2022 ou est-ce que cette transition aussi est repoussée «à demain» ?

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Le gouvernement a choisi, une fois encore, de ne pas respecter la recommandation/prescription du FMI de prendre le MIC sous sa responsabilité. Cela arrange sans doute ses affaires pour ce qui est de présenter l'endettement public du pays, mais cela a fragilisé le bilan de la Banque centrale, pourtant garante de la stabilité financière du pays. Pour s'en rendre compte, il suffit de comparer le bilan au 30.06.19, d'avant la pandémie, à celui du 30.06.2023. En 2019, un total de bilan de Rs 260,2 milliards bénéficiait de capital propre de Rs 27,8 milliards (10,7 % de couverture). En 2023, le total de bilan est de Rs 385,3 milliards et les fonds propres sont réduits à Rs 18,4 milliards (4,8 %).

Est-ce vraiment sans importance ? Notons que pour retrouver le même ratio qu'en 2019, soit 10,7 %, il faudrait une injection de capital de Rs 25,6 milliards...

Si on a bien compris le ministre des Finances dans son discours de Budget 2020-21, une des raisons principales qui justifiaient la mise sur pied de la CSG, était que le National Pension Fund était financièrement insoutenable dans la durée. Il s'appuyait alors sur des projections du FMI rendues publiques en 2015. Ces projections affirmaient que «the NPF appears relatively sound until about 2050, but it is projected to show a substantial deficit over the longer term». Cependant, plutôt que de réformer le NPF et d'en augmenter les cotisations au vu du vieillissement de la population qui allait s'aggraver, on nous a fourgué une CSG qui est insoutenable aussi dans le temps, mais bien plus rapidement et qui n'aide sûrement pas l'épargne nationale en attendant, puisqu'il n'y a plus de portefeuille d'investissements !

Ce qui poussait le FMI à inviter le gouvernement à «contain (its) generosity» sur les pensions, et qui menait à l'analyse que les décisions politiquement difficiles et donc courageuses (indexation de l'âge de la retraite sur l'espérance de vie, dépolitisation, means testing) avaient été mises de côté, pour choisir la voie facile, synonyme de victoire électorale (*). Le portefeuille du NPF estimé à Rs 146,6 milliards au 31 décembre 2023 est-il, par ailleurs suffisant, maintenant qu'il ne reçoit plus de contributions, pour assumer, dans le temps, toutes ses obligations vis-à-vis de ses contributeurs historiques ou est-ce qu'un futur gouvernement (l'actuel ne sera plus là... bien évidemment !) a une autre rallonge potentielle à assumer au nom du contribuable ? Par transparence, on devrait nous le dire, vous ne trouvez pas ?

Le PMSD de Xavier-Luc Duval (XLD) est aujourd'hui un petit parti qui a quelques solides réalisations à son actif, notamment sur le plan de la démocratie. L'abolition de la peine de mort (1995, 2016), son refus de voter le Prosecution Commission Bill en décembre 2016 et le rôle non-négligeable de XLD comme leader de l'opposition lors de la présente législature, en témoignent fortement. Ne serait-ce que pour cette seule raison, les avoir au gouvernement serait probablement utile.

Sur le plan politique cependant, le PMSD est, après son coup d'éclat pour s'éloigner du PTr/MMM, vraiment coincé. A priori, il ne lui resterait qu'une unique voie d'accès possible au pouvoir et ce serait dans une alliance largement contre-nature avec le MSM, qui est d'ailleurs maintenant en position de force pour imposer des conditions peu généreuses en termes de tickets et autres prébendes. Probablement même moins généreuses que celles que le PMSD refusait de Ramgoolam/Bérenger il y a peu... ?

Alors, dans ces conditions potentiellement humiliantes de toute manière ; est-ce trop tard, dans ce monde passablement cynique qui, depuis Gambetta, pense, presque unanimement, que la politique c'est «l'art du possible», pour que le PMSD considère aussi l'autre option 'humiliante', c.-à-d. un retour à Riverwalk ?

Un ND, cela doit pouvoir se régler entre amis de circonstance ? La seule alternative digne, n'est-ce pas, étant de devenir la locomotive de tous les petits wagons de l'opposition extraparlementaire... ?

L'express du 25 juin nous apprend que l'assistant Directeur des poursuites publiques (DPP), Me Roshan Santokhee, a été, cette semaine, invité à prendre sa retraite anticipée «in the public interest». Le bureau du DPP devant absolument opérer en toute impartialité, il s'était pourtant exposé à participer à une réunion jugée politique aux côtés de deux ministres MSM. D'évidence, il n'a pu convaincre la Judicial & Legal Service Commission (JLSC), seul organisme habilité à sévir contre un employé du système de justice pour infraction du code d'éthique, qu'il n'avait, au fait, pas affiché ses couleurs. La JLSC a donc tranché et dans ce pays plutôt vicié par tellement de 'centralisation' des pouvoirs, il est même devenu convenable de la remercier d'avoir seulement... assumé ses responsabilités.

Une question cependant

Me Santokhee a été imprudent, certes. Mais comment fait-on pour tout autre membre du système de justice qui démontrerait de la partisannerie, par exemple, dans ses seules décisions de justice ? C'est alors beaucoup plus difficile ? Comme démontré ces jours-ci par samuel alito et clarence thomas à la cour suprême des États-Unis... ou il faut désormais éviter les lettres majuscules qui marquent le respect ?

Les 223 maisons NHDC livrées à Bambous font plaisir à voir et semblent bien conçues. Bravo ! Encore ! Enlever la taxe sur les bouteilles plastique PET, par contre... Les producteurs paierontils, à la place, le retour des PET, pour le recyclage ?

La dengue, c'est du sérieux et ça s'aggrave ! Il y aura plus de 40 000 morts mondialement cette année, deux fois plus qu'en 2000, alors que les mortalités dues à la malaria baissent de 30 % en parallèle. Le moustique Anopheles qui répand la malaria et qui ne pique que la nuit est présent partout dans le monde. Contrairement à l'Aedes pour le moment, qui colporte la dengue et qui pique aussi le jour.

Au menu préventif actuel, on dépend d'armées d'employés éliminant l'eau stagnante et faisant des fumigations aléatoires. On peut faire mieux ! En attendant un vaccin, Singapour relâche, depuis 2016, des millions de moustiques infectés avec une bactérie, la Wolbachia, chaque semaine ( ** ). Celle-ci empêche le moustique et sa progéniture, de transmettre le virus de la dengue, les oeufs étant infertiles. Des essais en Colombie ont causé une baisse de 94 % des cas de dengue là où le Wolbachia a été relâché. Une usine produisant ces moustiques a été inaugurée au Brésil ( *** ) en avril. Une bonne idée d'achat pour le ministère de la Santé et de production pour notre technopole, si un marché africain devenait possible ? Un transporteur aérien sera crucial. Vous en connaissez un de fiable, par hasard ?

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