Le sénégalais Pierre Thiam, chef cuisinier établi aux Etats Unis a apporté sa contribution pour faire face aux défis de la souveraineté alimentaire prônée aujourd'hui par les nouvelles autorités. Lors du forum Africa Days de SOS Sahel qui s'est tenu du 27 au 28 juin à Dakar, M. Thiam, répondant aux questions de Sud Quotidien, a indiqué que le système alimentaire doit changer son design.
Pouvez-vous d'abord revenir sur le sens du forum qui vous a réuni pendant deux jours ?
Cette année, le thème du forum « Africa Days » de SOS Sahel est la promotion des produits sous-utilisés du terroir africain. Ils sont connus sous différents sobriquets: « lost crops », « produits orphelins » ou « oubliés », « opportunity crops » ou même « miracle crops », entre autres. Rien que cette abondance d'appellations indique le caractère multi dimensionnel que pourrait revêtir le sens du forum.
En effet, ce thème adresse divers challenges et opportunités auxquels nous sommes aujourd'hui confrontés. Ceux-ci sont de dimensions à la fois continentale et planétaire. Ils concernent des défis liés à notre sécurité alimentaire et au changement climatique, mais surtout, ils présentent des opportunités de développement et plus particulièrement celui de la souveraineté alimentaire. En bref, le sens du forum est d'un caractère vital pour nos communautés rurales et pour notre planète.
Selon vous, quelle peut être la contribution des produits africains pour l'atteinte de la souveraineté alimentaire ?
Notre système alimentaire est confronté à une crise existentielle liée à son incapacité à nourrir une population globale qui, dans quelques années, s'élèvera à plus de 10 milliards de personnes. Cette situation est la conséquence d'un système qui nous a imposé un régime alimentaire global qui se limite à seulement 3 céréales (riz, blé et maïs).
Cette monoculture intensive use de méthodes d'agriculture non-durable tel l'abus de produits chimiques nocifs à la terre et à la nappe phréatique, cette même monoculture est l'une des causes principales de la déforestation,
Avec le fanion, le moringa et cie, sera-t-il facile de diversifier les habitudes alimentaires ancrées des Africains, en particulier les Sénégalais ?
Les produits que nous avons, que nous offrons, que l'Afrique a, tels que le fonio, le Bambara groundnut ou même les fruits de baobab, le moringa, imposent la façon dont nous devons diversifier notre système alimentaire. Donc, le système alimentaire doit changer son design et faire en sorte que nous puissions intégrer ces produits et le faire de façon durable.
Ce ne sera pas facile mais il suffît d'abord qu'il y ait une volonté politique. Ensuite, il faut faire en sorte que ces produits soient accessibles aux consommateurs. Évidemment, tout cela doit être accompagné d'une campagne de branding et de storytelling qui, éventuellement, nous permettra d'atteindre le « tipping point » qui facilitera un changement de narration dans l'esprit du consommateur et l'intégration de ces produits dans notre alimentation. Il faudra que chacun joue son rôle.