Neuf ans après sa création, la Cour Pénale Spéciale estime que son travail reste mal compris, alors qu'elle est critiquée pour sa lenteur et son inefficacité.
Pour redonner espoir aux victimes des multiples crises qu'a connues la République Centrafricaine, le pays s'est doté de deux institutions clés : la Cour Pénale Spéciale (CPS) et la Commission vérité, justice et réconciliation.
L'Etat centrafricain est aidé, notamment, par les Nations Unies. Mais la Cour fait face à des critiques et inquiétudes persistantes des victimes. En neuf ans d'activité, elle a condamné par exemple les auteurs des massacres commis à Koundjili et Lemouna, ouvert plusieurs procès et arrêté plusieurs suspects en attente de leur comparution. Elle a notamment fait arrêter le ministre Hassan Bouba, réputé proche des mercenaires russes de Wagner. Lequel a ensuite été extrait d'entre ses mains par le gouvernement.
Lenteur des procédures
Pourtant, Bertin Botto, président de l'Association d'entraide aux victimes des événements (AEVI) n'est pas totalement convaincu par la Cour spéciale.
Selon lui, "en cinq ans, ils n'ont jugé qu'une seule affaire, un seul verdict a été prononcé par la chambre d'assise. Après il y a eu appel. Le constat est amer et c'est vrai que les choses n'avancent pas par rapport aux attentes des victimes".
L'opposition comprend que la CPS n'ait encore jugé que peu de dossiers. En revanche, Jean-Pierre Mara, ancien député en exil en France, doute de l'indépendance de la Cour.
Il estime que "le lien entre les neuf ans de mandat et la lenteur remarquée avec trois dossiers par an me semble juste une lenteur humaine propre aux interactions avec le gouvernement, l'influence locale ou internationale. Par ailleurs, comme nous avons tous vu avec le cas de Hassan Bouba, il y a un gros dysfonctionnement. La juridiction actuelle délivrée par la CPS n'est pas libre et ne sert strictement à rien".
La Cour se défend
Michel Landry Louanga, président de la CPS, assure pour sa part qu'il a "toujours eu l'impression que les gens ne comprenant pas bien, se focalisent beaucoup plus sur la phase réservée au procès. Mais pour arriver au procès et comme nous sommes une nouvelle juridiction, il faut d'abord commencer par les enquêtes et c'est ce qui a été réalisé dès les premières années et on continue à remplir notre mission dans le cadre du mandat pour qu'on puisse atteindre les objectifs recherchés".
Seulement le chemin est encore long et les ressources viennent parfois à manquer. L'autre défi de la Cour, pour gagner la confiance des Centrafricains, est désormais de parvenir à arrêter les dirigeants des groupes armés dont certains sont signataires de l'accord de paix du 6 février 2019.