Burkina Faso: Bobo-Dioulasso - Le cri de « détresse » des marchands d'art

Le commerce des objets d'art traverse actuellement une période difficile. Entre autres causes, les acteurs du domaine indexent l'insécurité, la baisse du tourisme international et le manque d'appui. Nous avons fait un tour au marché des arts de Bobo-Dioulasso où les artisans se tournent les pouces.

Il est 11 heures, dimanche 2 juin 2024, lorsque nous arrivons au marché des arts, situé au quartier Koko de la ville de Bobo-Dioulasso, jouxtant la Bourse du travail. Dès l'entrée, des ordures à même le sol et le silence des lieux sont frappants, laissant deviner une faible fréquentation.

Un groupe de quatre personnes sont en pleine partie de thé devant un magasin. Pierre Founa, artisan, en fait partie. Il façonne le bois local depuis 40 ans et s'est installé dans ce marché, il y a 17 ans. M. Founa raconte que les artistes occupaient une partie des magasins du grand marché de Bobo-Dioulasso.

Mais depuis que le business des objets d'art a commencé à péricliter, explique-t-il, les

acteurs n'arrivaient plus à payer le loyer de leurs magasins. C'est ainsi qu'ils ont rejoint le marché des arts. Moussa Sidibé exerce aussi le métier dans la ville de Bobo-Dioulasso, depuis 27 ans. Dans son magasin, sont disposés des objets d'art de toutes sortes, tout-couverts de poussière. On y compte des sacs en cuir, des bijoux, des chaines, des bracelets, des statuettes et bien d'autres.

A la question de savoir comment se porte le marché des arts, ce quinquagénaire répond que les choses vont de mal en pis. Chez le président de l'Association marchand d'art de Bobo-Dioulasso (AMAB), Aboubakar Kanou, le constat est le même. Jouant au damier sous un arbre avec ses camarades, il explique que l'activité a connu des jours meilleurs. La clientèle, surtout étrangère, permettait à de nombreux artistes de vivre de leur art.

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Mais aujourd'hui, se désole-t-il, la situation est telle que les artistes n'ont plus les moyens de participer à certains festivals et expositions à cause du coût du transport et du prix élevé des stands. « Le marché a commencé a chuté à partir de 2000. Depuis le début de l'insécurité en 2015, le marché va très mal », ajoute cet autre marchand qui a requis l'anonymat.

Booster le marché des arts

Cette morosité du marché, Pierre Founa l'attribue également à la situation sécuritaire nationale parce que soutient-il, « ce sont les étrangers qui constituaient une grande partie de la clientèle ». Et d'ajouter qu'à cause aussi du manque de la clientèle, certains artistes ont amené leurs objets d'art à la maison pour les stocker. « Certains sont obligés de donner nos objets à des artistes qui ne sont pas souvent des Burkinabè afin qu'ils les commercialisent à l'étranger pour eux. C'est la parade qu'ils ont trouvée subvenir aux charges de leurs familles », lance-t-il.

Aboubakar Kanou, créateur d'objets d'art appelle pour sa part le gouvernement à leur venir en aide dans le financement de leurs projets. Il souhaite également un accompagnement

pour permettre aux marchands d'art de participer aux différentes expositions et évènements dans les pays voisins afin de faire la promotion de leurs oeuvres. Pour Pierre Founa, les Burkinabè doivent valoriser ces produits locaux. « Ils doivent valoriser l'art comme ils ont su le faire avec le Faso Danfani et le Koko Donda.

Ils peuvent, par exemple, valoriser cela dans les services, dans les bureaux, à la maison et bien d'autres lieux. Cela contribue aussi au développement du pays », confie-t-il. Quant à Moussa Sidibé, il souhaite que les autorités organisent des ateliers d'initiations des enfants à l'art, car dit-il, ils sont la relève de demain.

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