Au Cameroun, le ministre de l'Administration territoriale s'en est pris, sans les nommer, à deux leaders de l'opposition, Maurice Kamto du MRC et Cabral Libii du PCRN, ce 3 juillet 2024, dans un contexte préélectoral avec notamment la présidentielle en 2025. Ce 4 juillet, les deux partis d'opposition dénoncent les propos de Paul Atanga Nji. Explications.
Au Cameroun, c'est une nouvelle salve du ministre de l'Administration territoriale contre les opposants : le 3 juillet 2024, devant les gouverneurs des dix régions, Paul Atanga Nji s'en est pris, sans les nommer, à Maurice Kamto et Cabral Libii.
Alors que le Cameroun avance vers une année électorale en 2025 avec notamment la présidentielle, que le président Paul Biya est au pouvoir depuis 42 ans, le ministre s'est ouvertement moqué des deux hommes.
À commencer par Maurice Kamto : le président du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) qui, en mai, avait déclaré devant la presse être prêt à mourir en 2025. Paul Atanga Nji lui suggère de ne pas attendre : « Il va aller mourir seul, personne ne va l'accompagner dans sa tombe. Il n'a pas vraiment besoin de 2025 pour mourir. Il y a les cordes qui se vendent dans les marchés, partout. Il n'a pas besoin d'attendre 2025. »
Quant à Cabral Libii, dont la présidence du Parti camerounais pour la réconciliation nationale (PCRN), fait l'objet d'une bataille judiciaire depuis plusieurs mois, Paul Atanga Nji le compare à une « nounou » : « Vous prenez le parti de quelqu'un, vous allez à l'Assemblée et vous dites que vous voulez devenir propriétaire de ce parti politique. Mais nous avons les nounous dans nos maisons. Les nounous sont là pour garder les enfants. Vous voulez dire que la nounou va dire que "c'est déjà mon enfant". »
« On se serait attendu à ce que le ministre rassure la classe politique... »
Des rires dans l'assistance. Mais rien de drôle de la part d'un ministre dans un contexte préélectoral, selon Cabral Libii. « Il persiste dans une forme de bordelisation de la République du Cameroun, réplique l'opposant. Par des intimidations, par des menaces, d'abord, il démultiplie les stratagèmes pour éliminer des candidatures à l'élection présidentielle. Et puis, on l'a vu intervenir sur les listes électorales. Il intervient dans la vie des partis politiques. Mais si on le laisse faire - parce qu'il ne s'est pas nommé lui-même, il y a quelqu'un qui l'a nommé - eh bien, c'est celui qui l'a nommé qui saura en tirer les conséquences »...
Du côté du MRC, Joseph Emmanuel Ateba, secrétaire national à la communication du parti, estime ces propos indignes d'un ministre : « Pour une réunion semestrielle relative aux dispositions en vue d'une période pré-électorale, on se serait attendu à ce que le ministre rassure la classe politique sur les moyens de sécurité mis en place et les garanties de liberté pour leur déploiement. À la place, ce sont des menaces qu'il profère comme à son habitude.(...) Ce n'est pas le Cameroun qui est humilié à travers ce type de sortie d'un de ses ministres, mais c'est le système de Paul Biya qui est mis à nu. Tout le monde peut comprendre dans quel système les Camerounais vivent. »
Sans modification du calendrier, les opposants attendent les législatives et municipales en février prochain et la présidentielle en octobre 2025.